L’action de la police a permis de stabiliser la situation dans le quartier, la suite dépendra des actions des forces de l’ordre et de l’administration. Crédit : AP
1 200 migrants ont été interpellés au cours du raid effectué par la police à l’entrepôt de légumes, ont annoncé lundi les représentants de la police. Les personnes interpellées ont été conduites au commissariat de police pour des vérifications de leur possible implication dans le meurtre. En outre, au cours du raid la police a découvert un véhicule suspect contenant plusieurs millions de roubles, trois pistolets pneumatiques, deux couteaux et une batte de baseball. Les autorités envisagent, désormais, de fermer l’entrepôt.
Le raid a eu lieu après le conflit ayant provoqué les troubles. Dans la nuit du 10 octobre, dans le sud de Moscou, Egor Chtcherbakov, âgé de 25 ans, a été tué. Le jeune homme a pris la défense de sa fiancée, importunée par un homme d’apparence caucasienne. Au cours de l’altercation, ce dernier a porté un coup de couteau à Egor Chtcherbakov. Une manifestation spontanée a eu lieu le 12 octobre, devant le commissariat de police local, les manifestants exigeant l’arrestation du meurtrier et la fermeture de l’entrepôt de légumes. Le lendemain, une autre manifestation spontanée a eu lieu à proximité du lieu du crime, celle-ci s’est transformée en émeute.
L’action de la police a permis de stabiliser la situation dans le quartier, la suite dépendra des actions des forces de l’ordre et de l’administration. Les tensions entre les habitants du quartier et les migrants s’accumulent depuis longtemps, la résolution d’un seul incident ne permettra pas de les apaiser.
Serguei Gontcharov, président de l’Association des vétérans de l’unité spéciale Alpha, député de la Douma, estime qu’il est injuste de faire porter l’entière responsabilité des événements aux forces de l’ordre, car les fonctionnaires et les représentants du service des migrations étaient, sans doute, au courant de la situation dans le quartier. « La population locale se plaint régulièrement qu’il est dangereux de circuler à proximité de ce maudit entrepôt de légumes, car à l’intérieur il y a des armes et des drogues. Mais aucune action de prévention n’a été entreprise tant que ce meurtre n’ait eu lieu et que les gens ne soient sortis dans la rue, explique le député. Pourquoi notre police n’attaque qu’à la volée ? » Gontcharov est persuadé que désormais, la police conduira des vérifications dans tous les entrepôts de légumes de Moscou, mais que rien ne changera.
Alsambek Paskatchev, membre de la Chambre civile, président du Présidium du Mouvement publique panrusse Congrès russe des peuples du Caucase rejoint l’opinion du parlementaire. Il estime que ces manifestations massives se produisent en absence de travail de prévention auprès des migrants. « Notre organisation a étudié des événements de ce type pour conclure qu’à la base il y a souvent un conflit courant, mais celui-ci est détourné par d’autres forces pour leurs propres intérêts. Il est clair que si une personne commet un crime, elle doit être arrêtée, mais si les forces de l’ordre ne font pas cela, à terme un sentiment d’impunité apparaît. Et là, les gens expriment leurs griefs sur tous ceux qui se trouvent sous le coude », explique-t-il.
Paskatchev estime qu’afin d’éviter de nouveaux conflits, il faut déterminer le pourcentage de migrants qu’un entrepreneur peut employer, puis veiller à ce que tous les migrants employés dans les services aient une maîtrise correcte de la langue russe.
Cette vision n’est pas tout à fait partagée par Gontcharov. Il explique que les gens ne sont pas alarmés par la migration externe, mais la migration interne en provenance des républiques du Caucase du Nord, ces migrants n’étant pas soumis aux quotas et ayant souvent une bonne maîtrise du russe. « Des notions comme lois nationales ou communautaires n’ont pas leur place chez nous. La Russie est un état de droit et tout le monde doit respecter la loi. Tout abus doit être puni. Sinon, nous donnons l’impression de ne pas avoir de volonté politique », conclue Gontcharov.
Alexandre Brod, directeur de l’ONG Bureau de promotion des droits humains de Moscou explique que des mesures pour empêcher ces manifestations publiques devenues typiques sont élaborées depuis longtemps, mais elles ne sont pas utilisées. « Le premier cas est celui de Kondapogui, petite ville dans le nord-ouest du pays, puis dans le sud dans la région d’Astrakhan, dans le kraï de Stavropol et l'oblast de Saratov, à Moscou. Tous ces événements n’ont rien appris ni aux autorités ni à la société. Notre politique migratoire reste opaque : les sans-papiers enrichissent les fonctionnaires, les forces de l’ordre et les employeurs », explique le militant.
Il estime que tout événement de nature criminelle peut provoquer des protestations. « Il faut apaiser les tensions entre les citoyens et les migrants. Il faut réfléchir aux moyens d’assainir la situation dans le pays, rechercher et identifier les personnes en situation irrégulière, réformer les forces de l’ordre. Après des incidents de ce type, il faut traduire les policiers et les fonctionnaires en justice », estime Brod.
La société est tellement « chaude », que tout événement, même une pacifique fête musulmane, peut servir de prétexte aux provocations, à « l’activation » des « justiciers du peuple », qui tentent de rétablir l’ordre eux-mêmes, estime l’expert.
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