Crédit : Vitali Beloussov/RIA Novosti
Le grand magnat russe et ancien président de Ioukos Mikhaïl Khodorkovski a passé son 50ème anniversaire en prison. Dans le même temps, la chaîne de télévision publique NTV diffusait un documentaire intitulé Meurtre pour un cadeau et accusant les fondateurs de Ioukos d’avoir participé à un meurtre. La police de Moscou a de son côté arrêté plus de 40 activistes qui ont tenté d’organiser une manifestation non autorisée en soutien à Khodorkovski au centre de la capitale russe.
Selon le quotidien Novaïa Gazeta, proche de l’opposition, près de 200 personnes ont voulu se rassembler pour des protestations non autorisées en soutien à Khodorkovski dans le centre de Moscou. Plusieurs actions similaires mais de moindre importance ont eu lieu à travers le pays afin de soutenir le magnat emprisonné.
Parallèlement, la chaîne publique NTV a diffusé le documentaire « Meurtre pour un cadeau » qui accuse les fondateurs de Ioukos, dont Mikhaïl Khodorkovski, d’être impliqués dans l’assassinat en 1998 de Vladimir Petoukhov, maire de Nefteïougansk, en Sibérie occidentale.
Il importe de souligner que ces accusations ont été confirmées par des enquêteurs le jour de l’anniversaire de Khodorkovski. Alors que le magnat du pétrole incarcéré nie toute implication dans ce meurtre, les analystes voient ce film comme une tentative de lancer une campagne afin de préparer le terrain pour un troisième procès contre Khodorkovski et son partenaire Platon Lebedev.
Khodorkovski et Lebedev devaient initialement être libérés par le tribunal en 2014, mais la commission d’enquête est en train de réexaminer un rapport d’expertise relatif au deuxième procès Ioukos. Selon les enquêteurs, ces experts avaient été payés par Ioukos pour mener leurs recherches.
L’un d’entre eux, l’économiste renommé Sergueï Gouriev, a quitté la Russie pour la France après avoir été interrogé par les enquêteurs sur cette affaire. Une autre experte, l’ancienne juge de la Cour constitutionnelle Tamara Morshakova, doit quant à elle répondre aux questions des enquêteurs jeudi.
Plusieurs politiciens haut placés et figures de la
culture, ainsi que trois législateurs européens, ont souhaité un joyeux
anniversaire à Khodorkovski dans des communiqués rendus publics
mercredi.
Parmi ces personnes, on trouve notamment le leader
d’opposition et activiste anti-corruption Alexeï Navalny, le magnat
russe et ancien candidat à la présidentielle Mikhaïl Prokhorov, le
célèbre écrivain d’opposition Boris Akounine, et bien d’autres.
}
L’histoire de Khodorkovski
Mikhaïl
Khodorkovski, richissime homme d’affaires russe et ancien propriétaire
de Ioukos, défunt géant du pétrole, a fêté ses 50 ans mercredi derrière
les barreaux après avoir passé près de 10 ans en prison pour fraudes,
détournements de fonds et évasion fiscale. Beaucoup d’observateurs
considèrent cette sanction comme une revanche du président Vladimir
Poutine pour l’engagement politique trop prononcé du magnat du pétrole.
Après
dix années de détention, Khodorkovski est devenu une sorte d’icône pour
les politiciens libéraux et les opposants. Il devrait être libéré en
octobre prochain, à moins qu’il ne doive faire face à de nouvelles
charges.
Lorsqu’il a été arrêté, Khodorkovski était considéré
comme le plus riche de Russie et un des sept hommes d’affaires les plus
influents. D’après certains médias russes, il a également soutenu
financièrement l’opposition libérale et les communistes.
Selon un sondage publié mardi par le Centre indépendant Levada, un tiers des Russes soutiennent la libération conditionnelle de Khodorkovski, soit deux fois plus que ceux qui souhaitent qu’il reste en prison. Ce sondage a été mené auprès de 1 600 personnes dans 45 régions, avec une marge d’erreur de 3,4%.
Interrogé par téléphone, le directeur du mouvement russe « Pour les droits de l’Homme » Lev Ponomariov décrit Khodorkovski comme « une personne sous les feux des projecteurs de la vie sociale et politique de la Russie », avant d’ajouter qu’il était « un leader indiscutable ». « C’est un exemple unique de personnalité emprisonnée qui continue à avoir une influence sur l’environnement politique de son pays », explique-t-il.
Sergueï Mitrokhine, leader du parti libéral d’opposition Iabloko, parrainé par Khodorkovski en 2003, affirme que Khodorkovski a été écroué parce qu’il avait « osé défier Poutine ».
Avant son anniversaire, le magazine d’opposition New Times avait interviewé Khodorkoski. Ce dernier a notamment révélé les secrets sur sa vie en prison, la politique et sa famille. « J’ai du mal à penser à une possible libération car je me suis habitué à la prison », a-t-il ainsi indiqué.
En
ce qui concerne la politique, Khodorkovski a critiqué à la fois le
Kremlin et l’opposition russe. Il accuse le gouvernement russe d’être
corrompu et de restreindre la liberté d’expression et économique, tout
en reprochant aux opposants de « parler au lieu d’agir » et de « manquer
de sincérité ».
Avant son incarcération en octobre 2003,
Khodorkovski n’avait fait aucun mystère sur des actes de corruption au
sein du géant du pétrole Rosneft. En avril, le magnat avait révélé ses
plans pour financer les partis libéraux d’opposition Iabloko et l’Union
des forces de droite (SPS), qui a disparu depuis, avant les élections
parlementaires de décembre 2003. Par la suite, le Conseil pour la
stratégie nationale, groupe de réflexion renommé et dirigé par
l’ancien membre du Kremlin Stanislav Belkovski, a publié un rapport
accusant la direction de Ioukos de comploter pour renverser Poutine en
finançant l’opposition libérale et les communistes.
Cet article est basé sur plusieurs sources du Moscow Times.
Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.
Abonnez-vous
gratuitement à notre newsletter!
Recevez le meilleur de nos publications directement dans votre messagerie.