La Russie au lendemain de l’incendie meurtrier de Kemerovo: les faits, pistes et réactions

AP
Au moins 64 personnes, dont des enfants, ont perdu la vie dans l’impressionnant incendie qui s’est déclaré dimanche dans un centre commercial de la ville sibérienne de Kemerovo. Si les causes de cette tragédie restent encore indéterminées, ce qui est déjà évident, c’est que l’administration du centre n’a pas dûment assuré la sécurité incendie au sein du bâtiment.

Le 25 mars, la ville sibérienne de Kemerovo (2 987 kilomètres à l’est de Moscou) a été le théâtre d’une terrible tragédie : le centre commercial à trois étages « Zimniaïa Vichnia » a pris feu. Selon les données préliminaires, l’incendie s’est déclaré au troisième étage, dans l’aire de jeu pour enfants, près des salles de cinéma. Comme le précisent les témoins oculaires, l’alarme incendie n’ayant pas fonctionné, plusieurs personnes se sont retrouvées piégées dans le bâtiment en proie aux flammes.

Lundi à 14h00 l’incendie n’était toujours par maîtrisé – 230 sapeurs-pompiers sont toujours à pied d’œuvre pour éteindre le feu qui s’est déclaré il y a plus de 24h. Selon les données actualisées du ministère russe des Situations d’urgence, le bilan des victimes est passé à 64 morts et 80 blessés, dont des enfants. En effets plusieurs classes s’y étaient rendues pour célébrer le début des vacances scolaires de printemps.

En outre, 16 personnes restent portées disparues et cinq ont été retrouvées vivantes ce lundi matin sous les décombres.

Quelque 200 animaux du zoo situé au deuxième étage du centre commercial ont également péri.

Qu’est-ce qui a mené à la catastrophe?

Au lendemain de la tragédie, les causes demeurent incertaines. Selon l’une des thèses avancées, l’incendie aurait pu être déclenché par un enfant, une autre version met en cause le système de câblage. Quoi qu’il en soit, les témoins oculaires assurent que personne n’a aidé les gens après le début de l’incendie.

« Aucune sonnette d’alarme n’a été tirée, rien. Mêmes les portes d’évacuation au rez-de-chaussée étaient fermées. Je n’arrive toujours pas à comprendre comment nous avons réussi à nous échapper », a déclaré au journal KP Dmitri Khorochavtsev qui se trouvait à l’intérieur du bâtiment au moment où les flammes ont commencé à le ravager.

Anton Gorelkine, un député de la région de Kemerovo, a écrit sur Facebook : « Les systèmes d'alarme incendie et de lutte contre les incendies [dans le bâtiment] ont complètement échoué. Quand le feu a commencé, il n'y avait même pas d'extincteur à proximité. Un extincteur au bon endroit aurait pu empêcher tout cela ». L’élu suppose que le centre commercial en question avait des problèmes bien évidents avec les systèmes de sécurité et indique que le fait que les fonctionnaires locaux aient signé tous les documents lui permettant de poursuivre son activité, laisse penser à une affaire de corruption.

« Nous avons plusieurs centres commerciaux à Kemerovo construits d’une manière identique : plastique bon marché, labyrinthes de couloirs et documents de propriété douteux. Ils doivent être tous contrôlés et s’il y a une quelconque violation, il faut les fermer au diable. Aucun argent corrompu ne vaut la vie d’enfants », s’indigne-t-il.

Pour sa part, le vice-gouverneur de la région, Vladimir Tchernov, a constaté que les autorités avaient toute une série de questions à poser aux propriétaires du centre commercial.

«Une leçon horrible»

Un deuil de trois jours a été décrété dans cette région sibérienne. Sans attendre cette déclaration officielle parvenue lundi matin, de nombreuses personnes des quatre coins du monde se sont empressées d’exprimer leurs condoléances aux familles des victimes. « Dimanche dans une grande ville, un centre de divertissement pour enfants, c’est tellement commun que chacun peut s’y reconnaître... Je ne peux rien faire, je pleure et j’embrasse sans arrêt mes fils. Seigneur, que des rescapés soient retrouvés sous les ruines »,a ainsi publié sur sa page Facebook Galina Youzefovitch, critique littéraire.

Le ton d’autres postes et messages est similaire. « Mes condoléances. Les appels des enfants, pris en otage par le feu et faisant leurs adieux à leurs proches, brisent le cœur », a écrit la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova. « Et encore, que chaque responsable sécurité incendie et d’accompagnement des enfants soit retrouvé et nommé. [...] C’est une leçon pour nous tous », a-t-elle ajouté.

Mais outre les condoléances, c’est l’indignation et l’appel à rétablir la justice qui sont exprimés. « On veut la justice et la punition de tous ceux qui étaient liés à la situation avec les sorties de secours. Punir ceux qui ont mis en service, autorisé, signé... Une leçon horrible », tel est le commentaire laissé sur Twitter par le journaliste Vassili Konov.

Nombreux sont ceux également qui critiquent les autorités pour leur incompétence et leur manque de réactivité : le gouverneur Aman Touleïev ne s’est par exemple pas rendu sur les lieux du drame. La raison invoquée pour justifier son absence – laisser les pompiers et les sauveteurs faire leur travail. Le gouverneur a par la suite déclaré que lui-même avait perdu une proche – une fillette de 11 ans - dans cet incendie, et qualifié la situation de chagrin commun.

Pendant ce temps, les Moscovites déposent des fleurs et des jouets devant la représentation de la région de Kemerovo dans la capitale. Dans la ville sibérienne, de longues files d’attente se sont formées devant les centres de don du sang – les volontaires étaient si nombreux que deux heures et demie après le lancement de la collecte, les médecins ont dû annoncer à tous les désireux de venir en aide que la quantité nécessaire de sang avait déjà été collectée.

Mise à jour : Les derniers rapports officiels en date du 27 mars portent le nombre de victimes à 64, dont 41 enfants. 68 personnes sont par ailleurs hospitalisées. Le président Vladimir Poutine a déclaré une journée de deuil, qui sera respectée le 28 mars.

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