Le raz-de-marée pro-Macron aux législatives vu de Moscou

French presidential election winner, En Marche! leader Emmanuel Macron, center left, delivering his victory speech near Louvre, Paris.

French presidential election winner, En Marche! leader Emmanuel Macron, center left, delivering his victory speech near Louvre, Paris.

Irina Kalachnikova/RIA Novosti
​La victoire de La République en marche (LREM) aux législatives consolidera les positions politiques du chef de l’État à l’intérieur du pays et rendra plus forte sa politique étrangère. Pour ce qui est des relations entre Paris et Moscou, nous pouvons probablement nous attendre à de nouvelles initiatives de la part du président français, estiment les experts russes.

Crédit : Irina Kalachnikova/RIA Novosti Crédit : Irina Kalachnikova/RIA Novosti

À l’issue du second tour des élections législatives en France le parti d'Emmanuel Macron La République en marche (LREM) allié au Mouvement démocrate (MoDem) a obtenu la majorité absolue à l’Assemblée nationale avec 350 sièges sur les 577 que compte la chambre, ce qui renforce sérieusement les positions du président.

Selon les experts russes, bien qu’Emmanuel Macron ne soit ni favorable, ni défavorable à Moscou, la consolidation de ses positions rendra plus conséquente l’application de sa politique vis-à-vis de la Russie.

Sa politique sur l’axe russe sera définie par deux facteurs. Avant tout par la façon dont les relations franco-russes s’intègreront au concept européen du président français, a indiqué la spécialiste de l’histoire et de la politique étrangère de la France à l’Institut des relations internationales de Moscou, Evguenia Obitchkina. Aux côtés de Berlin, Emmanuel Macron a l’intention de se placer à la tête de l’intégration européenne et de renforcer les positions de Paris dans le tandem franco-allemand. Le second facteur sera la façon dont les contacts russo-français s’insèreront dans les relations euro-atlantiques dont le caractère reste toujours flou après la victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine.

La France rétablit son influence

Selon Evguenia Obitchkina, les législatives françaises ont été dominées par la politique intérieure, les dossiers internationaux se limitant aux démarches de la France dans le cadre de l’UE. « La France souhaite rétablir l’influence non seulement économique mais également politique du couple franco-allemand au sein de l’Union européenne, car sous François Hollande, Paris ne jouait plus qu’un rôle secondaire dans la politique », a-t-elle affirmé. Et là, la Russie pourrait être utile à Emmanuel Macron. Étant donné que les relations économiques et politiques entre Paris et Moscou sont aujourd’hui meilleures que les rapports entre Berlin et Moscou, les contacts avec la Russie pourraient aider la France à renforcer son influence non seulement face à l’Allemagne, mais également au sein de l’UE.

En outre, la Russie intéresse la France sur le plan économique et dans le cadre de la coopération antiterroriste. Ainsi, Paris souhaite préserver ses relations économiques avec Moscou, bien qu’il n’ait pas l’intention de prôner la levée des sanctions. Toutefois, il ne s’y opposera probablement pas si quelqu’un d’autre suggère de réviser la politique occidentale des sanctions contre la Russie, a poursuivi Evguenia Obitchkina. En outre, un éventuel renforcement de la coopération est envisageable dans la lutte antiterroriste. « Emmanuel Macron se propose – et il l’a d’ores et déjà annoncé – de déployer une sérieuse lutte contre le terrorisme et d’attaquer avant tout les réseaux terroristes à l’intérieur des pays », a-t-elle rappelé.

Propositions d’un « homme très ambitieux »

La politique étrangère étant la prérogative du président, les élections législatives n’influeront pas directement sur cette activité d’Emmanuel Macron, a fait remarquer dans une interview à RBTH Igor Bounine, président du Centre des politiques publiques. Mais après avoir renforcé ses positions à l’intérieur du pays à l’issue des législatives, le président français pourrait formuler à Moscou de nouvelles initiatives.

Celles-ci pourraient avoir trait à des solutions systémiques des grands problèmes comme les crises syrienne et ukrainienne. « Homme très ambitieux », il cherchera les moyens de les régler, a affirmé Igor Bounine. Il est difficile de préciser quoi que ce soit au sujet du contenu de ses propositions, mais il est évident qu’elles seront formulées parce que, aussi bien la Russie que l’Occident, souhaitent vivement trouver des compromis sur ces problèmes.

Invitation de Poutine

Les analystes soulignent qu’Emmanuel Macron réalise une politique bien définie et réfléchie vis-à-vis de la Russie. La preuve en est fournie par la récente rencontre des présidents russe et français. L’invitation de Vladimir Poutine à Versailles, fin mai, n’était pas fortuite, les experts n’en doutent pas. Premièrement, elle avait une dimension politique précise à la veille des élections législatives. « Les trois principaux rivaux de Macron à la présidentielle, qui ont totalisé environ 60% des voix au premier tour, préconisaient la normalisation des relations avec la Russie, une lutte commune contre le terrorisme et la cessation d’une nouvelle confrontation en Europe. Emmanuel Macron, très compréhensif envers les électeurs, a voulu prouver qu’ils avaient été entendus », a estimé Evguenia Obitchkina.

En outre, l’invitation de Vladimir Poutine à Versailles symbolisait le « niet » de la France à la politique de dissuasion de la Russie et « une révision conceptuelle de la politique de Paris », a dit Tatiana Stanovaïa, politologue russe indépendante qui habite en France. Toutefois, elle révèle les difficultés qu’Emmanuel Macron aura à surmonter en appliquant sa « nouvelle politique ». Réussira-t-il à formuler sa proposition géopolitique au nom de toute l’Europe ? Comment sa politique se rapportera au comportement « chaotique et imprévisible » du président américain Donald Trump ? Quelle sera l’attitude de l’Allemagne envers la politique « pragmatique-ambitieuse » de Paris ?

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