Source : Service de presse
Les experts russes constatent que les rapports russo-européens se normalisent plus que mollement, tandis que certains évoquent sans ambages une stagnation.
« Je vois une dynamique prudente dans le sens d’une embellie, ce qui est lié au changement de la position de plusieurs pays, avant tout de la Grèce, de la Hongrie, de Chypre et de l’Italie. Toutefois, la plupart des pays de l’UE, y compris l’Allemagne, occupent toujours une position stricte », indique Dmitri Souslov, directeur adjoint du Centre des études européennes et internationales de la Haute école d’économie.
« Les sanctions seront vraisemblablement reconduites en été parce que, premièrement, « l’axe balte » dans l’UE est assez fort et, deuxièmement, il ne faut sans doute pas s’attendre à des changements stratégiques de la situation en Ukraine avant le mois de juin », note pour sa part Oleg Barabanov, directeur scientifique de l’Institut de l’Europe de l’Institut des relatons internationales de Moscou (MGIMO).
Dans ce contexte, les forces qui, en Russie, préconisent la ligne dure face aux sanctions de l’UE estiment que puisqu’il est impossible d’infléchir la politique de Bruxelles, il faut la briser. Et espèrent se servir du premier ministre grec comme d’un bélier.
« Des pays isolés de l’UE redoutent d’évoquer le sujet de la levée des sanctions à Bruxelles, fait remarquer Oleg Barabanov. Alexis Tsipras est le premier des leaders de l’UE à ne pas avoir peur d’en parler. Et si l’UE ne lui force pas la main, d’autres mécontents pourraient suivre son exemple. »
M. Tsipras est d’ailleurs prêt à jouer le rôle de bélier : il est arrivé au pouvoir en arborant le refus d’effectuer de nouvelles coupes dans les dépenses, ce qui suppose un sérieux conflit avec l’UE. S’il réalise ses promesses électorales, il n’aura pas grand-chose à perdre, même s’il brise la solidarité européenne dans le domaine des sanctions. « De toute façon, la Grèce est au bord du défaut de paiement. Elle peut repousser le désastre pendant encore un moment, mais il est inévitable », affirme Oleg Barabanov.
La question est de savoir ce que la Russie peut proposer à Alexis Tsipras en échange de son rôle de bélier. « Seulement un prêt important, car ni les livraisons de produits agricoles, ni les questions gazières ne pourront régler le problème. La Grèce a besoin d’argent pour survivre pendant les premiers mois de scission de l’UE et pouvoir payer les salaires et les retraites, soit environ 4 milliards de dollars US », explique-t-il.
Selon les données officielles, Alexis Tsipras n’a pas soulevé la question d’un prêt éventuel à Moscou. Cependant, la Russie a d’ores et déjà manifesté sa disposition à soutenir la Grèce financièrement, quoique sous forme d’investissements dans l’économie grecque et non par le biais de crédits.
Certains experts doutent de l’opportunité du « bélier grec ». En effet, il est inacceptable pour Moscou que la guerre des sanctions débouche sur la sédition de certains pays membres de l’UE. « Dans cette situation, la scission deviendra évidente au sein de l’UE et cette dernière sera grandement affaiblie, explique Vladimir Brouter, expert de l’Institut international des sciences politiques et humaines. Ce qui ne recèle rien de positif pour Moscou. »
Car finalement, ce vide se remplira de forces antirusses, notamment celles de la Grande-Bretagne. Moscou doit plutôt déployer des efforts pour modifier la vision européenne générale. Notamment par le biais de relations avec les pays européens sympathisants. Dans ce contexte, il serait utile de lever l’embargo agricole contre les pays dont les gouvernements prônent ouvertement l’annulation des sanctions européennes.
« Si des pays comme la Grèce clament haut et fort la nécessité d’abroger les sanctions antirusses et si Moscou lève unilatéralement son embargo sur les importations agricoles grecques, les autres pays seront tentés eux aussi de préconiser l’assouplissement des sanctions. Toutefois, cela prendra du temps », reconnaît Dmitri Souslov.
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