Russie-UE : Moscou instaure un rideau de lait

La Russie a introduit lundi 7 octobre un embargo sur les produits laitiers lituaniens, déclarant qu'ils ne répondaient pas aux normes russes. Crédit : Vostock-photo

La Russie a introduit lundi 7 octobre un embargo sur les produits laitiers lituaniens, déclarant qu'ils ne répondaient pas aux normes russes. Crédit : Vostock-photo

Sur les ordres du président Vladimir Poutine, les douanes russes n’effectuent plus un contrôle renforcé sur les produits en provenance de la Lituanie. Cependant, l’embargo sur les produits laitiers lituaniens n’a pas encore été levé.

Les autorités européennes estiment que les actions de Moscou représentent une réaction au rapprochement entre l’UE et plusieurs ex-républiques soviétiques, dont la Lituanie, qui envisagent à prendre part au sommet du partenariat oriental, prévu à Vilnius en novembre. D’après le journal russe Kommersant, le conflit pourrait avoir un impact négatif sur plusieurs aspects des relations entre la Russie et l’UE, notamment le dialogue sur les visas.

« Le président russe Vladimir Poutine a ordonné la levée du contrôle renforcé sur la frontière russo-lituanienne », a déclaré le Service fédéral russe des douanes (FTS) dans un communiqué publié mercredi 9 octobre. Cette mesure devrait aider à résoudre le problème des énormes embouteillages formés sur la frontière après l'instauration d’un contrôle douanier renforcé en septembre. Cependant, l’embargo sur les produits laitiers lituaniens n’a pas encore été levé. De plus, les médias ont annoncé que la Commission européenne pourrait intenter un procès à la Russie au sein de l’OMC à ce sujet.

« La Commission européenne n’a pas été informée officiellement par Moscou sur ses plaintes contre les produits laitiers en provenance de la Lituanie », a indiqué le porte-parole de la Commission européenne chargé de la Santé Frédéric Vincent. « Nous sommes absolument certains de la qualité des produits lituaniens. » D'après lui, conformément aux engagements de la Russie dans le cadre de l'OMC, Moscou ne peut imposer des restrictions sur les importations de produits qu’en prouvant qu’ils représentent un danger pour les consommateurs, ce qu’elle n’a pas fait.

La Russie a introduit lundi 7 octobre un embargo sur les produits laitiers lituaniens, déclarant qu'ils ne répondaient pas aux normes russes. « Dans le fromage blanc nous trouvons de la levure, de la moisissure, des bactéries coliformes ; la crème fraîche ne contient pas suffisamment d'organismes lactiques alors même qu’on y trouve du phtalate de dibutyle et du phtalate de diéthyle. Il s'agit d'une grande infraction de production », a déclaré Guennadi Onichtchenko, responsable de l'agence fédérale russe des services sanitaires Rospotrebnadzor.

Les produits laitiers lituaniens représentent moins de 1% du marché russe. L’embargo sur les produits lituaniens n’aurait pas un grand impact sur la Russie, qui importe un minimum de lait, de poisson et de viande de Lituanie, mais frappera durement le commerce lituanien : à titre d’exemple, les fournitures du poisson lituanien représentent 70% des ventes des producteurs du pays.

Selon les sources diplomatiques de Bruxelles et de Vilnius, ce conflit pourrait avoir de sérieuses conséquences pour les relations entre la Russie et l'Union européenne. L'UE est convaincue qu'il ne s'agit pas ici de bactéries mais de politique. Fin novembre, la capitale lituanienne accueillera le sommet du partenariat oriental où devraient être signés des accords d'association et de création de zones de libre échange entre l'UE et l'Ukraine, la Moldavie et la Géorgie. La Russie fait tout pour persuader Kiev et Chisinau de renoncer au rapprochement avec Bruxelles, mais sans succès jusqu'à présent.

La Lituanie, qui exerce actuellement la présidence de l’UE, avait appelé Moscou à « respecter le droit de choisir» des ex-républiques soviétiques. Le chef de la diplomatie lituanienne Linas Linkevičius avait même annoncé que les autorités du pays pourraient bloquer la circulation automobilière et ferroviaire entre la Russie et la région de Kaliningrad, enclave russe en Europe de l’Est, si Moscou ne « cessait la pression sur ses voisins. »

Pour l’instant, il ne s’agit pas d’un tel blocus. Toutefois, toujours d’après les sources diplomatiques de Bruxelles, interviewées par Kommersant, le conflit autour du partenariat oriental et les restrictions commerciales pourrait avoir un impact sur les autres aspects des relations entre la Russie et l’UE. « Dès que la Lituanie partage l’orientation de l’Ukraine vers l’Europe et les Pays-Bas lui reproche l’arrestation du navire Arctic Sunrise, Moscou réagit en instaurant des restrictions commerciale, mais cela ne se fait pas ainsi », a indiqué un des interlocuteurs du journal. « Cela donne aux sceptiques au sein de l’UE et, notamment, du Parlement européen des arguments supplémentaires contre la Russie ».

En raison d’une guerre commerciale russo-polonaise et du conflit politique avec la Lituanie, la Russie n’a pas réussi en 2007 d’établir rapidement un nouvel accord sur la coopération avec l’UE, et le document n’a pas toujours été adopté. Maintenant, c’est le dialogue sur les visas qui est menacé. Les diplomates russes espéraient auparavant de signer un accord avec Bruxelles sur la facilitation des visas en juin dernier, mais n’ont pas réussi à le faire et voulaient donc éliminer les différences pour parvenir à le conclure au sommet Russie-UE prévu décembre. Désormais, la Russie a diminué ses chances d’une percée.

Cependant, le communiqué du FTS montre que Moscou pourrait encore résoudre le conflit avant le sommet.

 

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