Le 26 janvier, le social-démocrate Zeman a recueilli au second tour de la première élection universelle du président du pays près de 55% des voix. Crédit : Reuters
Le premier président de la République tchèque élu par le peuple, Milos Zeman, mènera à l'égard de la Russie une politique de rapprochement par le biais de la coopération économique. Il contribuera en outre à une intégration plus poussée du pays dans l'UE, estiment les experts interrogés par La Russie d'Aujourd'hui.
Le 26 janvier, le social-démocrate Zeman a recueilli au second tour de la première élection universelle du président du pays près de 55% des voix, battant son rival, le ministre des Affaires étrangères Karel Schwarzenberg (conservateur centriste).
Désormais, la classe politique russe peut pousser un soupir de soulagement, estime le président du Conseil pour la politique internationale et de défense Fiodor Loukianov.
« En cas d'élection de Karel Schwarzenberg, on aurait pu s'attendre à une position très dure de la République tchèque non seulement sur la Russie, mais aussi concernant l'Ukraine. Schwarzenberg s'est imposé comme un homme ayant une relation très déterminée avec ces pays. Une présidence de Schwarzenberg aurait rappelé celle de Vaclav Havel », a déclaré M. Loukianov à La Russie d'Aujourd'hui.
Les experts européens rejoignent l'avis de M. Loukianov.
« Milos Zeman est sûrement plus pragmatique concernant la Russie que Karel Schwarzenberg, qui est un homme politique ‘pro-occidental’. La gauche tchèque est généralement plus ouverte à la coopération avec la Russie, a indiqué à La Russie d'Aujourd'hui Kai-Olaf Lang, expert de l'Institut allemand des affaires internationales et de sécurité (SWP) basé à Berlin. En outre, les proches de Zeman ont des contacts assez étroits avec des sociétés russes. Le président Milos Zeman est susceptible de mener envers la Russie une politique de changement par le biais de la coopération ».
Ainsi, pendant de nombreuses années, l'un des plus proches collaborateurs de Zeman a été le lobbyiste Miroslav Slouf qui a travaillé avec la société pétrolière privée russe Lukoil. Zeman a également reçu une donation du chef du bureau tchèque de Lukoil Martin Nejedly pour financer sa campagne. Le candidat a expliqué qu'il s'agissait d'un don privé, mais ses opposants n'ont pas tardé à assimiler cet argent à un financement par le biais des entreprises russes.
Selon M. Lang, « la politique économique et énergétique est bien sûr mise en œuvre non pas par le président, mais par le gouvernement, et les liens économiques sont l'œuvre non du président mais des entreprises et des hommes d'affaires. Toutefois, M. Zeman peut soutenir certains intérêts et modèles de coopération », a poursuivi l'expert.
Les observateurs convergent dans l'ensemble : les relations de la République tchèque avec la Russie deviendront plus pragmatiques après l'élection de Milos Zeman, et seront principalement fondées sur des intérêts économiques communs. La mise en place par la République tchèque d'un équilibre énergétique, fondé à la fois sur l'importation d'hydrocarbures et le développement de sa propre énergie nucléaire, pourrait constituer être un élément important de cette coopération.
Bien que Prague ne soit pas aujourd'hui un acteur majeur dans la région, de bonnes relations avec ce pays revêtent pour la Russie une grande importance.
Selon M. Loukianov, la République tchèque reste un pays envers lequel les entreprises et les hommes politiques russes ont un sentiment particulier. Au début des années 1990, un grand nombre d'hommes d'affaires russes ont acheté de l'immobilier en République tchèque, dans l'espoir de bénéficier de l'entrée de la République tchèque dans l'Union européenne puis dans l'espace Schengen. Le pays a reçu des investissements actifs aussi bien de grandes entreprises russes – de la compagnie pétrolière Lukoil au géant russe de la sidérurgie NLMK – que d'un nombre important de petites et moyennes entreprises.
« Un grand nombre de citoyens russes vivent ici de façon permanente ou temporaire », a ajouté M. Loukianov.
L'élection de Zeman au poste de président tchèque pourrait induire un redémarrage des relations non seulement avec la Russie, mais aussi avec l'Union européenne. Comme l'a expliqué à La Russie d'Aujourd'hui le chef de la représentation à Prague de la Fondation allemande Konrad Adenauer, Werner Böhler, « l'actuel président élu Milos Zeman va suivre une voie pragmatique dans les relations avec l'Europe ».
« Zeman a évoqué la participation de son pays au pacte fiscal, et a également exigé une politique européenne commune de défense. Dans l'ensemble, on peut s'attendre à une participation plus active de la République tchèque dans le développement de l'Union européenne », a déclaré M. Böhler.
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