Sanctions : pourquoi la Russie vend des actifs pétroliers aux sociétés européennes

Crédit : Sergueï Savostianov/TASS

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Lors du Forum économique international de Saint-Pétersbourg, qui s'est déroulé du 18 au 20 juin, le géant britannique BP a annoncé l’achat de 20% d’un gisement pétrolier russe à la société Rosneft. C'est la première grande transaction entre un investisseur occidental et une société représentant la Russie, pays frappé de sanctions européennes et américaines. Les experts estiment que la vente d’actifs est pour les compagnies russes l’unique moyen d’obtenir des capitaux supplémentaires.

Contourner les sanctions

Le directeur général de BP, Robert Dudley, a déclaré ce mois-ci dans une interview à CNBC que la société « étudierait des moyens supplémentaires  d’investir » en Russie.

Sergueï Pikine, directeur du Fonds de développement énergétique, estime que BP a sans doute reçu le feu vert des autorités britanniques en vue de cette transaction. En outre, il fait remarquer que les activités de BP ne sont pas directement concernées par les limitations. « Il ne s’agit pas de l’achat d’actions de Rosneft (frappée par les sanctions – ndlr), mais d’une participation au gisement. Juridiquement, la transaction n’est pas touchée par les sanctions », explique-t-il.

Malgré les sanctions décrétées par l’UE, les autres sociétés européennes ne comptent pas non plus interrompre leur coopération avec la Russie. « La collaboration se poursuit avec l’Italien Eni, le Norvégien Statoil et le Français Total. Ces sociétés s’adressent en privé aux autorités de leurs pays pour obtenir l’autorisation de réaliser un projet en Russie. Et souvent, elles obtiennent satisfaction », constate Alexandre Passetchnik, directeur du département analytique du Fonds de sécurité énergétique nationale. Ainsi, Eni et Statoil ont reçu l’aval en vue de coopérer avec Rosneft. Le géant Shell, qui travaille actuellement avec Gazpromneft, a lui aussi reçu le feu vert des autorités néerlandaises pour plusieurs projets avec des compagnies russes.

« Les sociétés pétrolières européennes forment en grande partie le budget, ce qui explique l’attitude attentionnée des autorités locales à leur égard », rappelle Sergueï Pikine. 

« Le marché de la Russie présente pour les multinationales moins de risques géopolitiques que l’Iran, l’Irak ou l’Amérique latine. En outre, la Russie dispose toujours de riches ressources », ajoute Alexandre Passetchnik. 

Alarecherched’investissements

Les experts rappellent que le problème des sanctions introduites contre la Russie se résume principalement à l’absence de financement occidental. Contracter des crédits à l’étranger devient aujourd’hui cher et compliqué, même pour les sociétés qui ne sont pas victimes de sanctions, souligne Sergueï Pikine.

« Au lieu d’emprunter à des taux d’intérêt élevés, notamment en Asie, les sociétés préfèrent vendre des actifs, poursuit-il. C’est un moyen moins cher de drainer des investissements. Bien que pour l’Etat ce ne soit pas la meilleure solution, étant donné la vente d’actifs économiquement intéressants. »

« Grâce à sa transaction avec BP, Rosneft obtiendra non seulement des investissements, mais également du bon matériel technique, les deux étant cruciaux car ils permettront à la société d’intensifier l’extraction de pétrole », indique Alexandre Passetchnik.

L’année dernière, l’extraction de brut de Rosneft a baissé de 0,9%, jusqu’à 190,9 millions de tonnes (selon les données du ministère de l’Energie). En 2015, les experts de Gazprombank prévoient une réduction de l’extraction de 0,5% supplémentaire suite à l’épuisement de gisements. « Rosneft court le risque de ne pas pouvoir respecter les contrats à long terme de livraison de pétrole en Chine », explique Alexandre Passetchnik.

En 2013, la société a signé avec la Chine un accord prévoyant de fournir au pays 300 000 barils par jour par le biais du gazoduc Sibérie orientale – Pacifique. Selon les prévisions, le chiffre pourrait augmenter jusqu’à 900 000 barils.

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