Crédit photo : ShutterStock/Legion-Media
Paris, qui faisait l’objet d’un véritable engouement ces dernières années parmi les Russes, reflète bien la baisse récente de la fréquentation. De janvier à août 2014, la capitale française a accueilli 7% de touristes russes de moins qu’à la même période en 2013. « Le chiffre n’est pas catastrophique en soi, mais il faut le mettre en rapport avec l’évolution fulgurante de ces dernières années », commente Charles-Henri Boisseau, chargé d’études à l’Office du Tourisme et des Congrès de Paris.
De 2010 à 2011 en effet, la fréquentation hôtelière des touristes en provenance de Russie avait bondi de près de 20% dans la capitale, de 7% l’année suivante et de plus de 15% entre 2012 et 2013, selon les chiffres de l’Office. Il convient de relativiser cependant l’impact économique : « Pour un touriste russe à Paris, on compte cinq touristes américains – de janvier à août 2014 la fréquentation globale est donc restée très satisfaisante », nuance M. Boisseau. Au total, sur 6 millions de réservations hôtelières de janvier à août 2014, plus d’un million avaient été effectuées par des Américains contre 220 000 depuis la Russie.
Un repli sur Sotchi et la Crimée
L’été dernier, la vice-ministre russe de la Culture chargée du tourisme, Alla Manilova, faisait déjà savoir que la demande des Russes pour les destinations européennes avait commencé « à chuter après que l’Union européenne eut imposé des sanctions économiques ». Elle ajoutait que cette baisse pourrait atteindre 15 à 30% d’ici à la fin de l’année dans les pays d’Europe de l’Ouest, notamment la France.
Mais si les Russes se sont davantage tournés cette année vers les destinations intérieures comme Sotchi et la Crimée – au premier trimestre 2014, l’Agence fédérale du tourisme russe, Rostourism, annonçait un repli de 4,4% des voyages à l’étranger au profit de la Russie –, faut-il y voir pour autant un boycott des destinations européennes pour des raisons politiques ?
La chute du rouble pénalisante à l’étranger
Cette inversion de tendance est d’abord à mettre au compte de la dévaluation du rouble, selon Charles-Henri Boisseau. « Le cours de la monnaie russe, comme celle du Brésil et du Japon, a baissé brusquement cette année. Au final, voyager vers la France coûte plus cher qu’il y a deux ans », remarque-t-il.
Le calcul est simple en effet : si un aller-retour en avion sur Paris au départ de Moscou, au prix de 500 euros, coûtait environ 20 000 roubles à un Russe en 2011, il lui faut aujourd’hui en débourser 30 000 en tenant compte uniquement de l’évolution du taux de change – sachant que les salaires en Russie n’ont pas, de loin, augmenté à cette vitesse, voire pas du tout, et que l’inflation a atteint près de 8% cette année dans le pays, plombant encore davantage le budget des ménages.
Un constat confirmé par Maïa Lomidze, directrice de l’Association des Tours opérateurs de Russie, qui relève « une forte baisse des demandes de voyages en Europe à partir de la mi-mars en raison, en premier lieu, de la hausse du prix des billets d’avion ».
La thèse du boycott contestée
La vice-ministre russe de la Culture affirme que « le voyageur russe a une bonne estime de soi » et qu’il se rend « là où il sera bien accueilli – donc pas dans les pays qui ont pris des mesures politiques contre la Russie ». Faut-il en déduire que cette baisse de fréquentation serait aussi due à des motifs politiques ?
Pour M. Boisseau, un tel jugement serait un peu hâtif : « Les sanctions de l’UE ont certainement fait baisser le pouvoir d’achat des Russes, entraînant une baisse de fréquentation. Mais il n’est pas question d’un boycott à mon sens. D’une manière générale, les perspectives sont bonnes à moyen et à long terme. L’émergence d’une classe moyenne aisée en Russie contribue à augmenter le flux touristique vers la France. Je crois donc que ce ralentissement n’est qu’un effet conjoncturel ».
Après la crise économique de 2008, le nombre de touristes russes avait aussi connu une chute phénoménale (-26,4% en 2009) avant de rebondir pour retrouver son niveau normal dès 2010.
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