Industrie : la production en hausse grâce à une dévaluation et aux sanctions

La récente hausse concerne premièrement les secteurs de constructions mécaniques et de métallurgie. Crédit : Vladimir Pesnya/RIA Novosti

La récente hausse concerne premièrement les secteurs de constructions mécaniques et de métallurgie. Crédit : Vladimir Pesnya/RIA Novosti

Malgré une stagnation du PIB, l’industrie russe affiche une croissance insolite. D’après les experts, cet élan est principalement lié à la dévaluation douce du rouble, qui a eu lieu en 2014, et au soutien apporté par l’État aux entreprises manufacturières dans le cadre du programme de substitution à l’importation. Le lancement de ce dernier a été précipité par les sanctions européennes et américaines, imposées contre la Russie sur fond du conflit ukrainien.

En dépit d’une stagnation du PIB, les analystes constatent une croissance plutôt inhabituelle de l’industrie russe. D’après les études de la banque HSBC et l’Institut de la politique économique Egor Gaïdar, la production industrielle est en hausse depuis trois mois. « D’une façon tout à fait naturelle compte tenu de la demande actuelle, et pour l’instant en dépit de la situation économique générale et des prévisions d’experts, la production industrielle reste toujours en croissance », stipule notamment l’étude de l’Institut.

Les leaders

La récente hausse concerne premièrement les secteurs de constructions mécaniques et de métallurgie, qui ont pu se faire une place plus importante sur le marché intérieur après l’interdiction des importations en provenance de l’Ukraine, estiment les auteurs de l’étude. En outre, les domaines axés sur la consommation intérieure - notamment l’agriculture, cherchant également à substituer une partie de produits importés - ont aussi été remis sur les rails de la croissance en août 2014. D’après les analystes, le programme de substitution à l’importation n’a pas pu être lancé en juin 2014, et la hausse de la production industrielle est plutôt l’un des résultats des événements survenus entre février et mars 2014 – c’est-à-dire, la dévaluation douce du rouble.

D’après Alexeï Kozlov, analyste en chef de la société d’investissement UFS IC, la croissance de la production industrielle constatée en août a plusieurs raisons. « La première est la hausse de la demande pour les produits métallurgiques, entraînée par le besoin de substituer les importations en provenance de l’Ukraine », note-t-il. Les projets de construction de pipelines, comme le South Stream et la Force de Sibérie, ont également contribué à l’augmentation de la demande pour les métaux, dit l’expert. « La deuxième raison est l’augmentation de la commande publique en matière de la production du complexe militairo-industriel », poursuit M.Kozlov. Le troisième facteur, selon ses dires, est la croissance de la production alimentaire et agricole, causée, elle aussi, par la nécessité de substituer les importations.

Comme le note Dmitri Bedenkov, chef du département d’analyse du groupe d’investissement RUSS-INVEST, la hausse de la production industrielle est due aux secteurs de l’industrie manufacturière. « Ainsi, sur les sept premiers mois de 2014, la croissance de ces secteurs s’est élevé à 2,6%, contre 0,8% pour les secteurs de l’exploitation minière », estime-t-il. Selon Anton Soroko, analyste du holding d’investissement FINAM, c’étaient la dévaluation du rouble du début de l’année et la hausse de la demande de la Chine qui ont principalement provoquée la hausse de l’industrie manufacturière russe. « Les producteurs alimentaires [russes] bénéficient actuellement de profits excédentaires en raison de la forte réduction de l’offre de produits importés qui dépassaient auparavant les aliments produits localement selon un ensemble de critères », ajoute M.Soroko.

Une croissance soutenue

Au total, l’indice de la production industrielle en janvier-juillet 2014 s’est chiffré à 101,5% en glissement annuel, avec l’industrie manufacturière augmentant le plus rapidement, dit Olga Izriadnova, de l’Institut des recherches économiques de l’Académie russe de l’économie nationale. D’après elle, la production de biens de consommation a augmenté pour la même période de 3,3%, celle de voitures de chemins de fer de 5,7% et celle de wagons de 12,7%. La production du textile et de vêtements s’est accrue de 6%, et celle de composants électroniques pour la communication de 17,6%.

Cependant, certains secteurs de l’économie russe n’ont pas affiché de croissance. « Parmi les industries en retard, à cause desquelles le PIB n’a pas augmenté durant le deuxième trimestre de 2014, figurent le secteur financier et celui des services. Des banques qui perdent en masse leur licences, l’instabilité du rouble et la montée des risques géopolitiques ont eu un impact négatif sur les activités des établissements financiers », dit Alexeï Kozlov. Comme l’estime Olga Izriadnova, la baisse de la consommation des hydrocarbures exportés par la Russie a également freiné la croissance de l’économie russe. « La baisse d’exportation de matières premières traditionnelles et des produits dérivés, ainsi que le déclin du secteur de construction et d’investissement, ont un effet négatif sur les indicateurs économiques principaux », explique-t-elle. De plus, la production de voitures en janvier-juillet 2014 a reculé de 0,7% et celle de camions de 21,1%.

Toutefois, si la croissance de la production industrielle se poursuit, elle pourrait dépasser à la fin de l’année même les prévisions du ministère russe de l’Économie qui envisageait une hausse de 1,7% par an. Puis, dans le meilleur des cas, l’industrie russe pourrait maintenir la croissance jusqu’au premier ou deuxième semestre de 2015, c’est-à-dire, jusqu’au moment où la politique de substitution à l’importation dans le domaine de la production alimentaire portera ses fruits, lit-on dans l’étude de l’Institut Gaïdar. Ainsi, l’économie russe pourrait bien sortir de la stagnation. Néanmoins, selon Anton Soroko la confrontation avec l’Occident va en tous cas freiner l’économie russe à court terme.

 

Réagissez à cet article en soumettant votre commentaire ci-dessous ou sur notre page Facebook


Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.

Ce site utilise des cookies. Cliquez ici pour en savoir plus.

Accepter les cookies