La Russie représente 9% seulement des exportations espagnoles et 6% des exportations italiennes de bœuf congelé, 6% des exportations allemandes de porc et de fruit secs. Crédit : Shutterstock/Legion-Media
L’interdiction est introduite pour un an. Elle frappe la viande et le porc dans toutes ses formes, la volaille et ses dérivés, les saucissons et les produits fumés, le lait et tous les produits laitiers, y compris les fromages, ainsi que le poisson, les légumes, les fruits et les noix.
Pertes pour les exportateurs
Les pays de l’UE seront les plus affectés par les sanctions alimentaires russes. Ce sont les principaux exportateurs de produits alimentaires en Russie. Selon les statistiques de l’Institut de recherches stratégiques complexes (ICSS), la Russie achète 31,5% de sa viande, 42,6% de ses produits laitiers et 32% de ses légumes en Europe.
« Pour l’Union européenne, les dommages pourraient atteindre 12 milliards d'euros, car les denrées alimentaires représentent environ 10 % de nos exportations en Russie », a déclaré le représentant de l’UE à Moscou Vygaudas Ušackas dans un entretien avec la chaîne de radio Govorit Moskva. Il a par ailleurs souligné que ce sont des estimations approximatives qui nécessitent une analyse approfondie des produits interdits.
La Russie réintroduit une « taxe sur la vente » pour soutenir son économie
Les experts soulignent que la Russie est fortement dépendante des importations. Selon le Service fédéral des douanes, les importations d'alimentation en Russie ont atteint 43,1 milliard de dollars en 2013. Aussi, selon les statistiques de l’Institut des recherches stratégiques complexes, la Russie achète environ 70% de ses fruits et baies et quelque 50% de son lait en poudre et de son fromage à l’étranger.
Si nous devons analyser l’impact sur les pays de l’UE séparément, les exportations alimentaires vers la Russie sont particulièrement importantes pour la Lituanie, la Lettonie, la Pologne et la Finlande. Ces pays exportent principalement du beurre, du fromage et du fromage blanc. Par exemple, 41% du beurre exporté par la Finlande concerne le marché russe, un autre poste important – 47% – est celui du poisson congelé. La Russie représente également 43% des exportations lituaniennes et lettones de saucisson. La Pologne et la Lituanie exportent une grande partie de leurs légumes, fruits et noix en Russie.
Quant à l’Allemagne, l’Italie, la Grande-Bretagne et l’Espagne, seuls des productions spécifiques pourraient être affectées par les sanctions russes, estime l’Institut de recherches stratégiques complexes. La Russie représente, notamment, 9% seulement des exportations espagnoles et 6% des exportations italiennes de bœuf congelé, 6% des exportations allemandes de porc et de fruit secs (source IKSI).
Concernant les Etats-Unis, le Canada et l’Australie, la Russie y achète de la viande, du poisson et des légumes, mais la part de ces exportations est très faible. La part la plus importante des exportations américaines concerne la viande, et elle s’élève à seulement 5%.
Les sanctions priveront les pays ci-dessus d’un de leurs marchés. Mais les Russes seront également affectés.
Les rayons bientôt vides ?
Le quotidien Kommersant, citant une source au gouvernement, explique la logique et les délais des sanctions introduites par la Russie. D’une part, il s’agit d’assurer la « sécurité alimentaire » : d’ici quelques mois, la Russie aurait pu de toute manière être frappée par des restrictions nationales sur les exportations de biens alimentaires dans les pays qui ont introduit des sanctions. En outre, le gouvernement russe espère stimuler la substitution des importations. Les restrictions devraient être annulées par l’OMC : la Russie compte respecter les décisions de ses arbitrages. En attendant, les différends commerciaux devraient permettre aux producteurs agricoles de combler les marchés restés vacants.
Toutefois, les experts estiment qu’il serait difficile de lancer certaines productions en Russie : le pays devra, sans doute, rechercher de nouveaux fournisseurs. « La Russie ne peut pas colmater cette brèche avec ses propres produits si rapidement. Avec une bonne politique nationale, d’ici un an, 15 à 20% des produits visés par les sanctions pourraient être remplacés par des produits fabriqués en Russie. Mais pour le moment, la Russie devra se tourner vers des fournisseurs étrangers », nous a expliqué Alexeï Skopkine, directeur du département d’économie régionale et de géographie économique de l’École des hautes études en sciences économiques.
Les principaux candidats pour les exportations sont les fournisseurs d’Asie et d’Amérique du Sud, et il s’agit d’élargir des coopérations déjà existantes.
« Les étalages russes ne se videront pas : la Turquie et les pays d’Amérique latine sont prêts à intégralement remplir la brèche « européenne ». Le seul problème est l’augmentation des coûts de transport qui seront répercutés sur les prix. De plus, la qualité des nouveaux produits pourrait être inférieure à celle des produits européens », suggère Skopkine. Il estime que les prix des produits agricoles devraient augmenter de 5 à 10%.
Les acteurs du marché interrogés par RBTH confirment que les prix des produits devraient augmenter. Les représentants des PME affirment que, dans un contexte de déficit temporaire, les fournisseurs pourraient augmenter les prix même sur les produits russes.
Mais il y a une solution. Les produits européens pourraient rester sur les étalages sous d’autres marquages. Dmitri Potapenko de Management Development Group Inc. n’exclut pas que les importations puissent se poursuivre, mais à travers les pays de l’Union douanière (espace douanier commun de la Russie, de la Biélorussie et du Kazakhstan, où il n'y ni droits de douane, ni limitations économiques, ndlr).
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