Le souvenir d'un tank fait des bulles dans une bière belge

L’ancienne brasserie en pierre brute de la petite ville belge d'Anthisnes. Crédit photo : Leonid Sokolnikov

L’ancienne brasserie en pierre brute de la petite ville belge d'Anthisnes. Crédit photo : Leonid Sokolnikov

Les brasseurs belges de Fulltime Hops consacrent une bière russo-belge à un corps de blindés belges qui combattit au sein de l'armée russe lors de la Première Guerre mondiale.

En août 1914, les troupes allemandes portent un coup terrible à la Belgique. Les Allemands occupent la majorité du pays, mais les Belges ne se rendent pas sans combattre. 

Dès le début de la guerre, les survivants du Royaume conquis par les Prussiens sont parmi les premiers à utiliser massivement les blindés sur le front. La Belgique disposait d'une base industrielle pour la production de véhicules avec le constructeur de voitures de luxe Minerva Motor Car Company, implanté à Anvers. 

Au début de la guerre, ces objets de luxe furent transformés en véhicules blindés. Mais quand Anvers fut prise à son tour, les belligérants se retrouvèrent dans la tristement célèbre « impasse de position ». 

Heureusement, les blindés belges n'ont pas disparu de l'histoire – ils attirèrent l’intérêt de l’attaché militaire russe. La demande officielle du tsar ­Nicolas II fut rapidement adressée au roi Albert de Belgique. Cette demande fut satisfaite.

Un corps expéditionnaire volontaire belge fut rapidement formé et envoyé sur le sol russe en mars 1915. Il était composé de 58 véhicules, dont 12 blindés, ainsi que de 23 motos et 120 vélos.

Il'a dit

Marcel Thiryle, commandant de la division des blindés belge

« Si nous ne devions garder qu’une chose du peuple russe et de la vie russe, ce serait que l’amour est plus fort que l’amertume des défaites et des déceptions. Pour nous, ce sera toujours le pays où nous avons passé trois merveilleuses années ».

Le centenaire du début de la Première Guerre mondiale et le souvenir de cet épisode étonnant de l’histoire belge et russe inspirèrent une idée intéressante aux brasseurs de Liège. Pour l'occasion, ils ont préparé une sorte de bière très particulière, appelée bière russo-belge.

Eric Hendrikx et Christophe Sarlet, auteurs de cette idée, ont souvent entendu leurs proches et leurs amis parler de cette célèbre division de blindés. Ils ont contacté les musées russes et communiqué avec des historiens militaires. Bien sûr, on leur a rapidement raconté que la bière mélangée à la vodka est une boisson répandue en Russie qui porte le nom de « Iorch ».

Toutefois, elle est dangereuse pour la santé et n’a strictement rien à voir avec les sortes de bières belges célèbres dans le monde entier. Il fallait à tout prix maintenir ce haut niveau de qualité qui fait sa notoriété dans le monde.


 Crédit photo : Leonid Sokolnikov

L’expérience a nécessité l’utilisation de technologies spéciales et, au final, a été couronnée de succès. Comme vous le savez, les bières brunes sont obtenues grâce au traitement thermique du principal ingrédient de la bière – l’orge. 

Les amis ont enrichi le processus de torréfaction du malt de l’arôme de copeaux de bois consumés, obtenus à partir de vieux fûts utilisés pour la fabrication du rhum. 

La manipulation des températures, la durée de cuisson des grains d’orge et l’ajout d’une petite quantité de cristaux de sucre naturel a permis d’obtenir un produit fini aux saveurs uniques, rivalisant avec les productions les plus raffinées de vodka russe et même d’un whisky écossais de qualité. Par ailleurs, les processus de fermentation et de maturation répondent aux plus hautes exigences de brassage belge.

Le processus compliqué de préparation de la bière russo-belge ne permet de réaliser qu’une fermentation tous les trois mois. Cela représente environ 1 000 bouteilles qui se vendent très rapidement. 

Les amateurs comme les dégustateurs professionnels s’accordent à dire que cette bière « n’assomme pas », qu’elle a une saveur agréable et, très franchement, assez familière des meilleures vodkas russes doublée d’une belle couleur ambrée et qu’elle rencontre un franc succès.

L’ancienne brasserie en pierre brute de la petite ville belge d'Anthisnes, perdue aux pieds des Ardennes, accueille de plus en plus de Russes. Les photographies, affiches et reliques historiques vieilles de cent ans y conservent la mémoire des courageux Belges et de leurs aventures incroyables en Russie.

Le « Minerva » va à l'Armée russe

Crédit photo : Getty Images / Fotobank

Les historiens militaires racontent que les Belges avaient pas mal de succès au front – au cours des opérations militaires, ils ne perdirent qu’un seul blindé (capturé par les Allemands). Les exploits militaires des blindés ont été récompensés royalement : 104 Belges furent décorés de l’ordre impérial et militaire de Saint-Georges, les commandants étaient choyés par la cour impériale, les courageux Wallons et Flamands avaient beaucoup de succès auprès des dames. 

Une autre Minerva blindée servit la révolution d’Octobre. Elle transportait l’or, l’argent et les objets de valeur dans les réserves d’État. La veille des grands événements, l'incarnation du prolétariat mondial Vladimir Lénine grimpa sur le blindé pour adresser aux soldats et matelots rebelles un discours enflammé à la gare de Finlande de Saint-Pétersbourg.

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