C’est notamment sur la plateforme de Siemens Desiro qu’a été mis sur rails le train électrique « Hirondelle » (sur la photo). Crédit : service de presse de RZD
Des promesses sérieuses
Selon les déclarations officielles de Joe Kaeser, Siemens appliquera scrupuleusement les sanctions dirigées contre les entreprises russes et les fonctionnaires. Le chef de la corporation a promis de mettre en œuvre les restrictions imposées de manière systématique. Il a néanmoins refusé d’évaluer les éventuels dommages dont pourrait souffrir Siemens s’il mettait en œuvre ces sanctions.
Curieusement, en mars, Joe Kaeser avait rencontré le président russe Vladimir Poutine, puis il avait publiquement annoncé que l'entreprise poursuivrait ses investissements en Russie malgré les tensions politiques montantes. « Depuis 2011, Siemens a investi dans l’économie russe près de 800 millions d’euros », avat-il déclaré. « Nous continuerons à investir tout en misant sur une collaboration à long terme dans le domaine des investissements ».
Siemens est actuellement le principal partenaire de la RZD (Société des chemins de fer russes) en construction de lignes à grande vitesse. C’est notamment sur la plateforme de Siemens Desiro qu’a été mis sur rails le train électrique « Hirondelle », dont 1200 wagons doivent être produits avant 2020. C’est justement ces trains qui devront transporter les supporters du championnat du monde de football 2018 sur tout le territoire européen de la Russie. De plus, Siemens participe à la livraison de nouveaux trains pour le métro de Moscou. Au total, le volume des commandes de Siemens en Russie, en Biélorussie et en Asie centrale a été d’environ 2,4 milliards d’euros pour l’année financière 2013 (évaluation au 30 septembre 2013).
Le principal concurrent de Siemens sur le marché russe est la société française Alstom. Elle aussi pourrait bien se retrouver dans une situation complexe à cause des possibles sanctions menaçant la Russie. Alors que la compagnie américaine General Electric est actuellement en pourparlers au sujet du rachat d’Alstom, Siemens n’en reste pas moins un acheteur alternatif. Alstom possède actuellement 25% des parts de Transmachholding, le plus gros producteur russe de wagons et de locomotives à voyageurs qui produit aussi des complexes de turbines pour des centrales nucléaires. Dans le même temps, Philippe Pégorier, président d’Alstom, a déclaré à l’agence d’informations ITAR-TASS que « le business européen est tacitement opposé aux sanctions ». Selon lui, Alstom prévoit notamment de prendre part aux projets de reconstruction des plus grandes lignes ferroviaires de Russie : la Magistrale Baïkal-Amour et le Transsibérien, qui traversent tous deux la Sibérie. Mais si Siemens ou General Electric s’approprie Alstom, la compagnie pourrait bien revoir ses positions.
Une réaction prudente
Pour l’instant, Siemens n’a rompu aucun accord avec les compagnies russes. Ainsi, d’après les données du service de presse de la corporation Rousskie machiny, partenaire de Siemens en Russie, leur projet commun de fourniture de wagons modernes au métropolitain de Moscou est en cours de réalisation, tel que cela avait été envisagé. Aucune modification n’a été apportée au projet sous l’influence des événements politiques, a-t-on affirmé à RBTH.
Dans les bureaux de la compagnie Siemens, on dément également tout changement dans le travail effectué en Russie. « Nous remplissons toutes nos obligations contractuelles et nos engagements d’études envers nos clients russes tant qu’ils ne sont pas limités par des sanctions économiques ou un embargo », déclare le service de presse de la compagnie. Selon Alexeï Kozlov, principal analyste d’UFS IC, le groupe a depuis longtemps des relations d’affaires avec la Russie et ne voudra guère abandonner un si grand marché. « Il faut plus considérer ce qui a été dit comme une exhortation à respecter la loi. Nous avons agi de manière préventive, si bien qu’il est désormais difficile d’accuser le groupe de déloyauté alors que nous avons conservé nos contacts avec la partie russe », commente un expert.
La Russie pourrait entrer dans une phase difficile si Siemens et Alstom renonçaient au projet de développement des lignes à grande vitesse. C’est actuellement Siemens qui assure le trafic ferroviaire à grande vitesse entre Moscou et Saint-Pétersbourg et Alstom qui fait la liaison entre Saint-Pétersbourg et Helsinki, soit deux itinéraires à grande vitesse primordiaux gérés par des fournisseurs européens. En cas de rupture des relations d’affaires, l’opérateur des chemins de fer russes se verra obligé de chercher de nouveaux fournisseurs prêts, entre autres, à desservir des itinéraires déjà mis en place par Siemens et Alstom, les compagnies chinoises et japonaises étant en tête de liste. « La Russie peut trouver assez rapidement de nouveaux fournisseurs de trains à grande vitesse parmi les acheteurs actuels des parts de Siemens. Les pays asiatiques, comme la Chine ou le Japon, ont une expérience et des compétences considérables dans ce domaine », explique Vladislav Ginko, économiste et conférencier de l’académie présidentielle russe de l’économie nationale et de la fonction publique. Néanmoins, il doute que le groupe allemand prenne une décision qui entrainerait la perte d’un des marchés les plus porteurs.
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