Aubergine farcie

Pour intégrer les canons culinaires russes, l’aubergine est venue du Caucase, où elle représente pratiquement un groupe d’aliments en soi.

Tout le monde parle d’une montée de la xénophobie en Russie, mais de mon clocher à moi, le mot d’ordre reste « nation copieuse ». C’est drôle de voir ce que la Russie emprunte – et n’emprunte pas – de l’étranger. L’omniprésence des sushis me sidère toujours ; l’absence tenace de la série Downtown Abbey au prime time me déçoit encore. Et puis certaines choses me font simplement secouer la tête, comme le talk-show vespéral d’Ivan Ourgant (le plus célèbre des jeunes humoristes russes, ndltr), Vetcherny Ourgant (l’Ourgant du soir), une fusion troublante des émissions Late Night with David Letterman, Jimmy Fallon, The Jay Leno Show et The Tonight Show. Tout est imité des modèles américains ! Je suis complètement accro.

J’ai sérieusement flippé, toutefois, quand le « dîner progressif » s’est insidieusement introduit à Moscou. J’ai déjà assisté à quatre événements de ce type cette année, et je suis prête à agiter ma serviette de table blanche en signe de reddition. Cette pratique de changer d’hôte et d’adresse pour chaque plat est sans doute l’importation occidentale la plus barbare depuis que Pierre le Grand a introduit le passage sous la quille.

Personne n’est gagnant dans cette histoire de dîner progressif. Tout le monde doit ranger, personne ne peut échapper pour un soir à la routine domestique ou récolter les lauriers pour un repas de trois plats. Ces truismes m’ont été rapportés à la maison après le dernier (et j’espère l’ultime) dîner progressif auquel j’ai participé.

Mon futur ex-meilleur ami Jésus (prononcer comme il l’annonce lui-même : « Hey, Zeus ! ») et moi étions en charge des entrées. Jésus m’a complètement volé la vedette en achetant un kilo de caviar au marché Drogomilovski, sous le comptoir. J’ai crié au scandale. J’ai crié « c’est pas juste ! » et des tas d’autres choses que l’on ne peut pas imprimer. Il n’a fait que hausser ses épaules d’Armani vêtues et a marché d’un air décontracté vers sa voiture.

J’avais besoin, et vite, d’un plat tape-à-l’œil que j’aurais pu préparer à l’avance. Aubergines, à la rescousse ! Ce légume automnal est un autre trésor emprunté, qui précède le sushi de plusieurs siècles. Pour intégrer les canons culinaires russes, l’aubergine est venue du Caucase, où elle représente pratiquement un groupe d’aliments en soi. J’ai sérieusement envisagé de faire du « caviar d’aubergine », juste pour contrarier Jésus. Cette variation exquise sur la ratatouille allie aubergine grillée, tomate, oignon. Mais les grenades sur les étalages du marché m’ont donné une autre idée : les aubergines farcies aux noix et coriandre à la géorgienne, garnies de graines de grenade. Des aubergines grillées ou sautées, fourrées avec un mélange acidulé de noix, coriandre, citron, oignons et sauce grenade. L’ajout de boulgour est un écart de la recette traditionnelle, mais recommandé, car il lie la farce. Ce mélange de couleurs vives méridionales avec les saveurs de l’automne a fait un tabac !

Du moins, je crois. Nous avons dû tout avaler en vitesse puis attraper nos manteaux et partir en direction du plat principal. La prochaine fois, je vais préparer des aubergines farcies et rester chez moi devant la télé à regarder Vetcherny Ourgant toute seule.

Ingrédients :

6 petites aubergines bien fermes

1 tasse de noix

1 botte de coriandre

4 c. à soupe d’estragon frais

1/3 tasse de persil frais

4 gousses d’ail

4 c. à soupe de jus de citron pressé

2 c. à café de zeste de citron frais

4 c. à soupe de sirop de grenade

½ tasse d’oignons finement hachés

1 branche de céleri finement hachée

2/3 tasses de boulgour cuit (1/3 cru)

1 c. à café de sumac

1 c. à café de paprika

1 c. à café de sel

1/3 tasse d’huile d’olive

Garniture :

½ tasse de graines de grenade fraiches

Tiges de coriandre

Echalote

Préparation

1.      Enlevez les queues des aubergines et coupez-les en deux. Saupoudrez de sel et empilez dans une passoire au-dessus d’un saladier. Laissez égoutter pendant 45-75 minutes.

2.      Mélangez 1/3 de tasse de boulgour cru avec autant d’eau dans une petite casserole et laissez cuire pendant dix minutes. Laissez reposer sous couvercle pour 15 minutes supplémentaires pour achever la cuisson à la vapeur.

3.      Mélangez les noix, coriandre, estragon, zeste de citron, sirop de grenade et ail dans un mixer et mixez 2 minutes, jusqu’à obtenir la consistance d’une pâte. Transférez dans un saladier.

4.      Ajoutez les oignons, céleri, boulgour cuit, sumac, paprika et jus de citron. Mélangez. Ajustez l’assaisonnement avec sel et poivre.

5.      Séchez les aubergines avec du sopalin, placez-les sur un plat, recouvrez de sopalin et passez au four micro-ondes pendant 90 secondes.

6.      Faites chauffer l’huile d’olive dans une grande poêle à feu moyen. Disposez les aubergines chair vers le bas et faites sauter pendant dix minutes. Placez sur du sopalin pour laisser refroidir.

7.      A l’aide d’un petit couteau aiguisé et d’une petite cuiller creusez une cavité peu profonde au centre de l’aubergine en laissant au moins 1cm de chair.

8.      Placez les aubergines sur un plat puis remplissez les cavités avec le mélange aux noix. Recouvrez le plat avec du film alimentaire et réfrigérez au moins trois heures, ou pour la nuit.

9.      Décorez avec des graines de grenade, la coriandre et les échalotes, juste avant de servir.

D’après une de recette de “Please to the Table”, par Anya von Bremzen

 

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