« Le gouvernement russe doit lutter contre la corruption pour faire face à l’opposition »

Sergueï Gouriev (à gauche) craint que le gouvernement ne fasse le choix stratégique d’augmenter les dépenses budgétaires ce qui peut mener à l’impasse. Crédit : Maria Tchobanov

Sergueï Gouriev (à gauche) craint que le gouvernement ne fasse le choix stratégique d’augmenter les dépenses budgétaires ce qui peut mener à l’impasse. Crédit : Maria Tchobanov

Sergueï Gouriev, recteur de la Nouvelles école d’économie à Moscou, membre du Conseil d’administration de Sberbank, assiste à Paris, à une rencontre organisée par le MEDEF international sur le thèmes de « la situation actuelle et les perspectives de l’économie russe pour 2013 ».

Sergueï Gouriev, l’un des économistes russes les plus compétents, affirme que le frein principal à la croissance économique est la corruption.

D’après les indicateurs économiques de 2012, Gouriev montre que parmi les pays des BRICS, la Russie n’est pas la moins bien placée. Toutefois, il est peu probable qu’elle puisse récupérer le taux de croissance de 7% d’avant la crise de 2008. Au mieux, elle peut viser les 4%.

Pour relancer la croissance, la Russie a besoin d’investissements étrangers et donc d’une amélioration du climat d’affaires et d’investissement. La corruption, les risques encourrus se révèlent être le principal frein à la croissance économique et Gouriev affirme que le gouvernement en a bien conscience : « La corruption n’est pas uniquement un problème économique. Il entraîne des problèmes politiques ».

« L’opposition russe, malgré son manque d’homogénéité et ses points de vue politiques et économiques différents, est d’accord sur un point : il faut erradiquer la corruption. Si l’Etat ne parvient pas à des résultats dans ce domaine, ce slogan ne manquera pas de devenir la bannière commune qui unira l’opposition », assure Gouriev. Selon lui, Poutine le comprend parfaitement, d’où le limogeage du ministre de la Défense suite au scandale de corruption.

Gouriev rappelle que l’un des arguments majeurs de la campagne présidentielle de Poutine était la diversification de l’économie, or c’est « justement ce qu’il ne parvint pas à réaliser durant ces deux premiers mandats ». En effet, si les compagnies gazières et pétrolières peuvent très bien marcher, indépendemment du niveau de corruption, « les autres secteurs de l’économie, sur lesquels veut miser Poutine, attireront-ils des investisseurs dans un climat des affaires aussi tendu ? Rien de moins sûr », pense Gouriev.

Il souligne qu’il n’y a pas de mal en soi au fait que l’économie russe soit basée sur l’exportation des ressources naturelles (comme le Canada, l’Australie, la Norvège), le but est de ne pas se limiter à ce secteur. Le prix du gaz russe va certainement chuter, mais ce n’est pas dramatique, selon l’économiste : « La question est de savoir si la Russie est capable de produire autre chose que du pétrole et du gaz. »

« Il y a encore dix ans, les spécialistes affirmaient que la Russie est incapable de produire des produits alimentaire et que l’agriculture russe est un trou noir. Aujourd’hui, la Russie est l’un des exportateurs principaux de céréales. Et il existe beaucoup de secteurs qui peuvent être développés à condition d’avoir un climat d’investissement positif, ce qui est directement lié à un abaissement des barrières douanières et bureaucratiques et à une privatisation accrue. » Gouriev a ajouté qu’il est important de privatiser les entreprises avant que la Russie se retrouve en manque de pétrole, ce qui ne se produira pas de sitôt. 

Gouriev craint que le gouvernement ne fasse le choix stratégique d’augmenter les dépenses budgétaires ce qui, comme le montre l’expérience de certains pays européens, peut mener à l’impasse.

Dans l’ensemble, l’économiste voit l’avenir économique de la Russie avec optimisme, mais émet des réserves quand au système de retraites et préconise la réduction des  dépenses budgétaires, « tant qu’il n’est pas trop tard ».

Cette réunion avec Sergueï Gouriev était organisée par le Centre d’analyse franco-russe Observo, le MEDEF International et l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS).

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