Cliché signé Igor Moukhine. Source : Service de presse
Parmi les rendez-vous devenus habituels, de la gastronomie aux concerts de chanson russe, le festival Russenko explorera cette année le thème « l’art et la rue », question qui devient vite politique lorsqu’un artiste prend la rue en photo tandis qu’un autre y installe des créations subversives…
Même les Parisiens les plus réfractaires quitteront la ville intra-muros pour la première rétrospective en France d’Igor Moukhine, infatigable chroniqueur de la vie moscovite depuis les années 80, et certainement le photographe russe le plus connu à l’étranger.
L’un des premiers photographes en Russie à avoir intégré le concept de série, Moukhine pratique la chasse urbaine à la recherche d’objets et de scènes souvent insolites. Son regard repère ce que le commun des mortels ne voit guère – Moukhine a le talent de percevoir l’âme des objets, de capter le regard d’une personne dans la foule. « Je trouve que n’importe quelle poubelle dans la rue est animée. Imaginez seulement : quelqu’un l’a ruée de coups, un autre craché dedans, un autre encore la nettoie et la repeint. C’est un sujet servi tout chaud : un portrait de la poubelle abîmée par la vie ».
La découverte de son œuvre par le public français fait d’autant plus figure de révélation que Moukhine, bien que nourri aux clichés de Cartier-Bresson, a été coupé du public occidental et des expérimentations formelles de ses contemporains américains : dans les années 1970 et 1980, la photographie russe ne dépassait guère les frontières de l’URSS...
Sa chronique moscovite va de la jeunesse rock des années 90 aux monuments soviétiques abandonnés, des meetings pro-staliniens aux manifestations pro-Pussy Riot. L’affaire des Pussy Riot a d’ailleurs rappelé à quel point la question de la présence de l’art dans la rue pose problème aujourd’hui en Russie : thème qu’Igor Moukhine abordera lors de la table ronde « L’art et la rue » en compagnie du graffeur français Nebay, du danseur hip-hop Boubacolorz et de l’artiste-plasticien urbain P183 (le Banksy russe).
Ce dernier illustre à lui seul l’essor du Street Art en Russie. P183 utilise les bâtiments et le mobilier urbain comme autant d’éléments de mise en scène pour ses constructions visuelles. Des illusions presque parfaites : là un lampadaire transformé en branche de lunettes, ici des portes de métro à travers lesquelles on aperçoit des policiers anti-émeute...
Depuis que le journal anglais The Guardian a publié certaines de ses œuvres, le jeune homme (dont on ne sait que le prénom, Pavel, et l’âge, 28 ans) est célébré comme le Banksy (célébrité britannique) russe, et assoit sa nouvelle réputation en faisant des installations sauvages dans les grands musées du monde. En Russie, ses œuvres sont effacées avec une grande célérité par les autorités - raison de plus de venir à Kremlin-Bicêtre pour voir P183 et Nebay créer ensemble (samedi 26 janvier).
La sélection cinématographique du festival présente le regard que porte la société russe sur la famille. On passera de la gaieté de La Noce de Pavel Lounguine à un mariage sous surveillance dans la Russie de Staline (Loin de Sunset Boulevard de Minaev), des frictions entre les générations dans Enterrez-moi sous le carrelage de Snejkine ou le méconnu La Parentèle de Mikhalkov, au délitement des relations lorsqu’un héritage se profile à l’horizon (Alexandra de Sokourov).
Le politique n’est jamais loin dans ces drames de famille, car derrière les cinq histoires individuelles se cachent autant de portraits d’époque, des années 1930 à aujourd’hui.
Le nom du lauréat du septième Prix Russophonie sera connu lors de la cérémonie de remise du prix, qui se déroulera pendant les Journées du livre russe à la mairie du 6ème arrondissement de Paris, les 15 et 16 février 2013.
La manifestation, unique en son genre, réunira cette année encore une pléiade d’écrivains venus de France et du monde russophone, Asie centrale, Ukraine, Russie : d’Andreï Makine à Boris Akounine, en passant par Maïlis de Kerangal, Vassili Golovanov, Jean-Pierre Milovanoff, Iouri Bouïda, Olga Sedakova, Andreï Kourkov ou Bernard Werber.
Un rendez-vous à ne pas manquer !
Du 25 au 27 janvier 2013 au Kremlin-Bicêtre, renseignements sur www.russenko.fr.
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