La filière du rail mène les chemins de fer russes en France

Sur le long terme, il fait le pari que « le rail russe aura un rôle croissant dans les transports entre l’Asie et l’Europe » avec la France comme un des principaux aboutissements du corridor ferroviaire. Crédit photo : Lori / Legion media

Sur le long terme, il fait le pari que « le rail russe aura un rôle croissant dans les transports entre l’Asie et l’Europe » avec la France comme un des principaux aboutissements du corridor ferroviaire. Crédit photo : Lori / Legion media

La société ferroviaire russe RZD a repris au groupe français PSA Peugeot Citroën 75% de sa filiale de logistique Gefco. Et s’est dans la foulée installée en plein centre de Paris.

Tout est allé très vite. Le 27 novembre, RZD entérinait son rachat de Gefco pour 800 millions d’euros. Puis ouvrait le 11 décembre, fièrement, son bureau de représentation sur les prestigieux Champs-Élysées.

Selon Ale-xandre Saltanov, vice-président du géant ferroviaire russe, « l’emplacement est très symbolique. Notre société considère comme prioritaire la coopération avec nos partenaires français ». Il souligne à l’occasion que le nombre de passagers voyageant en train entre la Russie et la France a plus que doublé en un an, passant à 9 000 personnes. 

Mais par partenaires, RZD entend surtout les groupes français SNCF, Alstom et Gefco. Ce dernier vient d’être racheté à PSA pour plusieurs raisons. D’une part, RZD souhaitait revenir en force dans le fret après avoir été contraint, par un plan de privatisation, à vendre à contre-cœur sa filiale PGK, qui lui assurait de solides profits. 

Dans le cadre des réformes du transport férroviaire, RZD a récemment dû vendre la compagnie PGK. « Très rentable, elle nous rapportait chaque année 20 milliards de roubles(environ 500 millions d’euros) de bénéfices. Il nous fallait remplacer cette source de revenus, explique le président de RZD Vladimir Iakounine. En outre, la politique du groupe est de fournir un service « porte à porte » au client, ce qui ne peut se faire de nos jours qu’au moyen d’un système logistique très performant ».

Le groupe russe espère obtenir un transfert de savoir-faire. Les spécialistes de Gefco seront notamment chargés de moderniser l’activité conteneurs de RZD, qui n’est pas tout à fait au niveau international, mais qui possède un potentiel énorme. 

Sur le long terme, il fait le pari que « le rail russe aura un rôle croissant dans les transports entre l’Asie et l’Europe » avec la France comme un des principaux aboutissements du corridor ferroviaire. Vladimir Iakounine souligne qu’il s’agissait d’acquérir « une des plus solides entreprises européennes de logistique ». Ce qui a été réalisé dès que PSA a fait savoir qu’il souhaitait se séparer de Gefco, qui travaillait déjà avec RZD pour l’approvisionnement de l’usine russe PSA près de Moscou.  

Le groupe russe a obtenu l’assentiment du régulateur et dispose de six mois pour gérer la transition. « Nous garderons le siège social en France, le PDG, la majorité de la direction et le personnel », a indiqué Vladimir Iakounine pour calmer les inquiétudes des salariés français. Ce qui n’empêche pas RZD d’optimiser la structure de Gefco dans un second temps : « Des changements qui seront décidés avec nos partenaires français », précise le patron russe. 

En chiffres

 

60% Activité de Gefco orientée vers l’automobile. Le groupe est leader européen de la logistique automobile avec un chiffre deux fois supérieur à son principal concurrent.

800 millions d’euros, c’est la somme versée par RZD pour monter à 75% du capital de Gefco. Une somme pour laquelle le groupe russe a réalisé des emprunts.

25% Pourcentage du capital de RZD que le gouvernement russe souhaite privatiser avant 2016. La direction du groupe reste cependant très prudente sur le calendrier.

Gefco emploie à ce jour 9 400 personnes, dont près de la moitié en France. La société devrait maintenir en poste son patron actuel, Luc Nadal. RZD indique de son côté vouloir conserver toutes les activités du transporteur, y compris celles liées à PSA. Gefco poursuivra sa stratégie d’expansion internationale, en Chine, en Inde et en Amérique latine, tout en accélérant son développement en Europe centrale et orientale et plus particulièrement en Russie, rapporte un communiqué de l’entreprise.

La société française est très exposée au secteur automobile, avec plus de 3 millions de voitures transportées, des usines vers les points de vente, en passant par les parkings de stockage et des ateliers de « post-production ». Gefco dispose de toute la panoplie d’un groupe logistique, avec des camions, des wagons et même des navires affrétés. PSA, qui détenait jusqu’ici 100% de sa filiale, gardera 25% d’une entreprise très rentable avec une marge opérationnelle de 5,8% en 2011, pour un chiffre d’affaires de 3,78 milliards d’euros et une croissance de 13%. 

Pour Vladimir Iakounine, il est « important que PSA garde sa part de 25% plus une action car cela permet de créer un vrai partenariat. Le fait que 60% du chiffre d’affaires de Gefco viennent de l’industrie automobile n’est pas un obstacle à nos projets de diversification ». 

La priorité de RZD avec Gefco est de développer les activités de fret entre l’Asie et l’Europe. La Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan prévoient de créer une entreprise commune de logistique ferroviaire. Gefco, tout en restant une filiale indépendante au sein de RZD, fera partie intégrante du futur corridor ferroviaire Asie-Europe. En tant qu’investisseur stratégique, RZD entend bénéficier d’un effet de synergie maximum à la faveur de cette acquisition en raison de la complémentarités des deux pôles. 

Par conséquent, le groupe français ne sera pas « digéré » par RZD, mais restera une entité à part bénéficiant d’une intégration idoine des processus commerciaux. Sur ce point, le groupe russe considère l’acquisition comme profitable sur les plans tant commercial que technologique. Vladimir Iakounine ne cache pas qu’au-delà de Gefco, il espère resserrer les liens avec la SNCF et profiter de son savoir-faire. L’installation à Paris est aussi un moyen d’intégrer « l’expérience française pour rénover les gares et créer des stations multimodales », assure le PDG de RZD.

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