Le concept de sécurité énergétique adopté lors du sommet de Saint-Pétersbourg en 2006 supposait que tous les participants du G8 devraient tourner autour de la Russie. Crédit photo : Kommersant Photo
L’organisation des sommets et la présidence dans les organisations internationales est une réjouissance onéreuse mais non sans intérêt pour les pays ôtes. Le pays receveur a la possibilité de définir les orientations des discussions pour tous. Par exemple, les États-Unis au G8 ont convaincu les autres pays développés de prendre à leur charge une part des dépenses pour le financement de la reconstruction de l’arme atomique dans les pays qui le refusaient.
L’Espagne, présidant l’UE au milieu des années 1990, a pu lancer le processus d’intégration de Barcelone en mer méditerranée, grâce auquel elle est devenue en Europe «le pays le plus important de la région méditerranéenne », et pour les pays de la région, le principal représentant d’une Europe unie. Déjà au temps de l’URSS, le leadership intellectuel et idéologique s’opérait parfois par le truchement de l’ONU, du mouvement des non-alignés et d’autres structures des pays en développement, pour lesquels Moscou rivalisait avec l’Occident pour y exercer son influence.
Depuis 1991, peu de forums internationaux d’une envergure comparable à l’APEC se sont déroulés en Russie. Tant de dirigeants mondiaux se sont réunis : au sommet de la sécurité nucléaire à Moscou en 1996, au sommet pour le tricentenaire de la ville de Saint-Pétersbourg en 2003, le 9 mai, l’année des 60 ans du Jour de la Victoire (de la Seconde Guerre mondiale – NDLT) et au sommet du G8 en 2006. En plus de cela, il y eut les forums de Saint-Pétersbourg et de Yaroslav, le premier sommet des BRIC à Ekaterinbourg, les sommets Russie-Union Européenne, ainsi que ceux de l'Organisation de Coopération de Shangaï (OCS) et de la Communauté des États indépendants (CEI), mais des événements d’une envergure mondiale comme celui de l’APEC n’ont jamais eu lieu.
En avril 1996, la Russie a, pour la première fois de son histoire, accueilli une rencontre officieuse des dirigeants du G7. La Russie n’en était pas encore membre de plein droit. Cette année-là il y eut déjà un sommet en juin, à Lyon et la Russie devint le pays organisateur définissant ainsi le programme. La Russie et la France présidèrent conjointement le sommet et Paris « partagea » ainsi avec Moscou sa stature, lui permettant de former le thème de la rencontre.
Au milieu des années 1990, la situation de la Russie dans la politique mondiale n’était pas simple : la situation économique, la guerre en Tchétchénie, l’image internationale catastrophique de Boris Eltsine avant les élections ont sérieusement limité la marge de manœuvre. Dans ces circonstances, la Russie a pu proposer comme programme des thèmes, dans lesquels elle restait un acteur influent à l’échelle mondiale, la sécurité nucléaire. Les dirigeants des pays du G7 avaient également leurs raisons pour venir à Moscou. Premièrement, la sécurité nucléaire était un thème d’actualité, et la conservation du nucléaire civile et militaire dans l’espace post-soviétique était discutée. Deuxièmement, la visite en Russie servait de soutien informel à Eltsine, aux yeux des partenaires étrangers, il paraissait être le favori des communistes.
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La Russie tira encore partie de la situation mondiale : déjà sous la nouvelle présidence eut lieu le sommet pour le tricentenaire de Saint-Pétersbourg, qui, à l'origine, n'était pas lié à aucun organisme international, mais accueillit plus de dirigeants que tout autre événement comparable en Russie. En conséquence, Saint-Pétersbourg reçu à la fois le sommet UE-Russie et le sommet informel de la CEI, mais également les dirigeants des États-Unis, la Chine, le Japon et l'Inde.
Le contexte politique était plus favorable qu'en 1996, bien que loin d’être idéal : c’était seulement quatre ans après la fin de la guerre en Yougoslavie et quelques mois après le début de l'invasion américaine en Irak. D’importantes dissensions perduraient sans toutefois gâcher la fête puisque Moscou n’essaya pas d’obtenir de décisions.
Le premier sommet du G8 en Russie eut lieu durant l’été
2006 à Saint-Pétersbourg.
Revendiquant ouvertement son indépendance dans la politique mondiale, la Russie
a pour la première fois identifié l’ordre du jour des priorités : la sécurité
énergétique, l'éducation, la lutte contre les maladies infectieuses. Moscou,
qui n’avait jusqu’alors pas pris part activement à la lutte pour l’éducation ou
la santé, s’intéressa évidemment principalement à l'énergie.
Au sommet du G8 à Saint-Pétersbourg, la Russie
proposa au monde une nouvelle approche concernant la sécurité énergétique. En conséquence, le document final du sommet sur la sécurité
énergétique a identifié le principe de « la création d'un système
transparent, équitable ... au cadre légal et réglementaire, y compris
l'obligation de respecter les contrats afin d'attirer les investissements
internationaux dans la ... production, la transformation et la
commercialisation des ressources énergétiques ». Cette feuille de route ne
fut toutefois pas très efficace car seule la Russie y avait des avantages.
L’expérience montre qu’obtenir la présidence d’un sommet n’est pas tout. Encore faut-il savoir formuler les thèmes de la réunion et proposer des solutions également bénéfiques et intéressantes pour le reste des participants.
Les vingt dernières années ont permis à la Russie d'acquérir une
expérience significative dans les sommets internationaux. En préparation de la
présidence de l'APEC (Coopération économique Asie-Pacifique), la Russie a
d'abord étudié en détail les expériences des anciens pays ôtes (principalement
le Japon et les États-Unis), et analysé les besoins et les intérêts de tous les
participants. Pour ce travail, en dehors des experts russes, des consultants
internationaux se sont joints au projet, comme Ernst & Young, McKinsey, et
PricewaterhouseCoopers, ce qui a permis de travailler et développer
conjointement des initiatives
intéressantes pour toute la région. Les résultats du sommet de Vladivostok
devraient désormais montrer si le gouvernement russe et le monde des affaires
ont appris à user du soft power.
La suite de l’article est disponible en russe sur le site Kommersant.ru.
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