Les Russes ne sont pas contre le rôle politique de l’Église

Ses six derniers mois, l’Église othodoxe russe s’est beaucoup trouvée impliquée dans la vie politique du pays. Crédit photo : Itar-Tass

Ses six derniers mois, l’Église othodoxe russe s’est beaucoup trouvée impliquée dans la vie politique du pays. Crédit photo : Itar-Tass

La moitié de la population russe pense que l’Église orthodoxe influence la politique de l’État, sans que ce constat n’entraîne de désapprobation. Au contraire, un quart des interrogés souhaiteraient que l’Église s’implique davantage dans les questions essentielles pour le pays.

 D’après un sondage du Centre panrusse d’étude de l’opinion publique (VTsIOM), l’Église ortodoxe joue un rôle croissant dans l’État mais leur relation semble plutôt harmonieuse. Un interrogé sur deux remarque l’influence de l’Église sur la politique intérieure, avec une nette augmentation ces deux dernières années : 44% en 2010, contre 50% aujourd’hui. Par ailleurs, 12% des citoyens qualifient cette présence de l’Église dans les affaires d’État comme significative.

Il faut noter que la plupart des Russes ne voient pas d’objection à cette présence de l’Église: 43% considèrent que l’Église othodoxe « établit sa relation avec la société et l’État de la bonne manière : en affirmant son point de vue quand nécessaire sans se mêler des questions qui ne la concernent pas ». Un quart des citoyens pensent que l’Église othodoxe « ne joue pas un rôle suffisant dans la vie sociale et politique » et qu’elle devrait prendre davantage part aux discussions et à la résolution « de questions cruciales pour le pays ». Seule une minorité des interrogés (19%) considèrent que l’Église est trop présente dans la vie sociale et politique, alors qu’elle devrait se concentrer davantage sur « les questions de religion et de morale ».

Ses six derniers mois, l’Église othodoxe russe s’est beaucoup trouvée impliquée dans la vie politique du pays. Ainsi, le 26 février dernier, le patriarche Cyrille prenait part à un congrès du Front populaire panrusse (formation sous l’égide de Vladimir Poutine). Le 21 février, les Pussy Riot chantaient leur prière punk « Sainte Marie, mère de dieu, chasse Poutine » à la cathédrale du Christ-Sauveur à Moscou. Suite à quoi, ce 17 août, les membres du groupe risquent une condamnation pour « hooliganisme ». Le Premier ministre et président de Russie unie Dmitri Medvedev, lors d’une réunion du Conseil général du parti le 16 juin dernier, parlait de la nécessité de s’appuyer « sur des valeurs traditionnelles propres à notre gouvernement et à notre société, en mettant l’accent sur la morale et l’Église ».

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Selon le directeur général du VTsIOM Valéri Fedorov, les anticléricaux peuvent être définis comme des personnes qui « n’approuvent pas le travail du président et du gouvernement ». Pour la plupart, ils ne font pas parti de l’« opposition libérale » mais sont plutôt « à tendance traditionnaliste », comme par exemple les communistes ou les membres de Russie juste. Tandis que ceux qui se prononcent pour le renforcement de l’Église sont des de vrais traditionnalistes qui considèrent que l’État devrait être « orthodoxe ». « Ce sont les adeptes du renforcement des valeurs morales, les adeptes du modèle de la symphonie de l’Église et de l’État», souligne Fedorov dans un entretien avec le journal Kommersant. Malgré la campagne anticléricale, les gens ont conscience de la nécessité des « institutions qui servent à unir et souder la société », a affirmé à Kommersant Valéri Soloveï, professeur à l’Institut d’État des relations internationales de Moscou (MGIMO) . « Le pouvoir, lui, s’en tient au modèle soviétique, selon lequel l’église doit servir de courroie de transmission du Kremlin », affirme-t-il.

Selon Mikhaïl Vinogradov, président du fond Peterburgskaïa politika, il ne faut pas s’attendre à un regain du cléricalisme prochainement. Durant la campagne présidentielle nous avons assisté à un « pic » de la relation entre l’Église et l’État et il ne faut pas s’attendre prochainement à une « nouvelle vague de cléricalisme », assure le politologue Dmitri Orlov, membre de la Chambre sociale de Russie. « Le pouvoir fait appel et utilise l’Église comme institution conservatrice », précise-t-il. Mais elle n’a pas assez de poids pour « se positionner comme organe indépendant ou être à l’origine d’un parti ». D’autant que « la religion orthodoxe n’apparaît pas vraiment comme un régulateur très significatif de la vie sociale ».

Version originale de l’article (en russe) sur le site de Kommersant.

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