Un souffle fantastique


TITRE : Je ne te mens jamais

AUTEUR : A. Seline

ÉDITION : L’aube

TRADUIT par Catherine Toussaint


C’est souvent aux traducteurs que nous devons la découverte d’auteurs nouveaux. C’est le cas de Catherine Toussaint, qui nous fait découvrir Alexandre Seline, auteur contemporain né dans les années soixante, dont les éditions de L’aube sortent un recueil de neuf nouvelles qui s’inscrivent dans la plus pure tradition de la littérature fantastique russe.


Alexandre Seline est ingénieur atomiste. Il fait partie de ces scientifiques qui apportent un souffle particulier lorsqu’ils se tournent vers la littérature, notamment par la dialectique qu’ils élaborent autour du réel. Souvent aux limites du fantastique, Seline met en scène des humains aux prises avec la vie qui les malmène, où ils brillent rarement et n’ont jamais le dernier mot.

Dans la plupart de ses nouvelles, nous sommes dans une logique de l’absurde. En dépit de toute vraisemblance, les choses s’enchaînent vers un dénouement inéluctable. Ainsi le héros de L’effet tunnel qui finit par se réjouir que sa fille, puis sa femme soient engrossées par Internet plutôt que par une machine à sous ou une marque de bière ! Au contraire, lorsque la logique et la vérité sont respectées, ce n’est que pour mieux dissimuler une réalité mensongère. 


Alexandre Seline s’amuse de ses contemporains, de leurs travers et de leurs petits arrangements cupides qui leur permettent de créer des illusions collectives en toute « sincérité », comme disent les habitants du village d’Alpatovka. Ces derniers ont conféré à leur forêt des pouvoirs magiques qui les dédouanent de leur responsabilité et garantissent la paix sociale, ou comme dans la réserve de chasse de Bratov. 
À Bratov, chacun contribue à la construction d’une énorme arnaque (il n’y a pas l’ombre d’un gibier, mais les tartarins sont nombreux et l’on fait la queue sur les routes pour aller chasser à Bratov), puis à son effondrement sous la vengeance d’un hérisson, car « un éboulement commence avec une pierre de deux cents grammes… un éboulement est l’accumulation d’une énorme quantité d’énergie potentielle qui se transforme en énergie cinétique ». 


Les éditions de L’aube publieront bientôt le premier roman d’Alexandre Seline, écrivain attentif aux bruits du monde et aux gesticulations de ses contemporains, qui semble avoir troqué pour de bon le microscope pour la plume, sans pour autant perdre la distance entre le regard et l’objet de l’observation.

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