Lada rompt avec son passé et passe le contrôle à Renault-Nissan

Chaîne d'assemblage de Lada Largus, le premier véhicule d'AvtoVAZ basé sur la plateforme Logan. Crédit photo : AFP/EastNews

Chaîne d'assemblage de Lada Largus, le premier véhicule d'AvtoVAZ basé sur la plateforme Logan. Crédit photo : AFP/EastNews

L’alliance Renault-Nissan débourse 750 millions de dollars pour obtenir indirectement une part majoritaire dans l’ancien géant soviétique de l’industrie automobile. L’alliance compte ainsi ancrer ses positions sur l’un des marchés européens les plus dynamiques.

A l’issue d’une réunion jeudi à Paris entre les principaux actionnaires d’AvtoVAZ (marque Lada), les constructeurs français et japonais ont annoncé la formation d’une coentreprise avec le holding d’Etat Rostekhnologuii, qui jusqu’ici contrôlait la majorité des actions du constructeur russe. La coentreprise détient désormais 74,5% d’AvtoVAZ. Le montage financier complexe stipule que Renault et Nissan investiront par étapes jusqu’à la fin 2014, date à laquelle l’alliance aura consolidé une part de 67,13% de la coentreprise, soit exactement 50,01158% du constructeur russe. Renault, qui a déjà déboursé 1 milliard de dollars en 2008 pour une part de 25% d’AvtoVAZ, va débourser 300 millions de dollars supplémentaires. Au total, le groupe français aura payé 1,63 milliards de dollars depuis 2008. De son côté, le constructeur japonais va investir 450 millions de dollars. La banque d’investissement Troika Dialog, qui détient un quart du capital d’AvtoVAZ, va progressivement vendre ses parts à la coentreprise entre RosTekhnologuii et l’alliance Renault-Nissan. Rostekhnologuii prend à sa charge (en réalité, il s’agit du budget d’Etat) d’éponger la dette du constructeur russe (1,8 milliards de dollars).

L’acquisition d’une part de contrôle par l’alliance était attendue pour le mois dernier, mais comme bien souvent les dernières négociations ont traîné. Du côté de l’alliance, il y avait la volonté d’avoir davantage de clarté sur la future politique gouvernementale du troisième mandat présidentiel de Vladimir Poutine. Début avril, ce dernier, encore en qualité de premier ministre, a inauguré une nouvelle chaîne de montage de 350 000 voitures par an à l’usine AvtoVAZ de Togliatti. Cette ligne assemble la Lada Largus, le premier véhicule d’AvtoVAZ basé sur la plateforme Dacia Logan, qui fait depuis plusieurs années un tabac dans toute la Russie.

Le gouvernement russe, et Vladimir Poutine en particulier, priaient depuis plusieurs années l’alliance de monter au capital et d’accélérer les investissement dans un constructeur automobile stratégique pour le pays. Les économistes estiment que jusqu’à un million de Russes vivent plus ou moins directement de la production et de la distribution d’automobiles Lada. D’où la volonté gouvernementale d’assurer la survie d’une usine qui est aussi le poumon économique de la ville de Togliatti (région de la Volga). Moscou espère aussi que l’industrie automobile russe dans son ensemble profitera des dernières technologies apportées par l’alliance franco-japonaise.

Une partie des experts voient d’un bon oeil l’approfondissement des liens capitalistiques entre l’alliance franco-japonaise. « L’optimisation de la structure du groupe et de sa direction opérationnelle va continuer à porter ses fruits » juge Kirill Markine, analyste chez Investkafe. Mais pour Alexeï Zakharov, expert chez Finam, l’accord signé jeudi est une déception. « Il ne s’agit que d’un protocole d’intention sans d’obligation juridique ». L’expert souligne que « Les espoirs de voir Carlos Ghosn [patron de Renault-Nissan] prendre la direction opérationnelle d’AvtoVAZ sont de nouveau repoussés à plus tard. La question essentielle est de savoir combien de temps faudra-t-il au Kremlin pour comprendre que le sauvetage de l’industrie automobile russe est plus important que le contrôle des flux financiers, si cher à nos dirigeants ».

Les tensions sous tendant les négociations sont bien entendu tues par le patron de Renault-Nissan Carlos Ghosn, qui a déclaré jeudi que les constructeurs unissent leurs efforts et leurs compétences afin de potentialiser leurs ressources sur le marché russe. Un marché qui connaît une croissance très rapide à la différence du marché européen. La Russie devrait très bientôt détrôner l’Allemagne pour devenir le premier marché automobile européen. Les prévisions pour cette année sont de 2,9 millions de véhicules. 

Pour l’alliance, la Russie est déjà le troisième marché mondial après le marché étasunien et chinois. Renault, Nissan et AvtoVAZ ont ensemble vendu 878.990 voitures en Russie l’année dernière, dont 578.387 sous la marque Lada. Le constructeur russe est en fait en chute libre sur un marché qu’il dominait il y a encore 6 ans. Sur un marché russe en hausse de 13% au premier trimestre 2012, AvtoVAZ voit ses ventes chuter de 15% à 109.388 unités, avec une part de marché de 18%. L'alliance AvtoVAZ-Renault-Nissan possède à ce jour une pénétration de 31%.

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