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Malgré tous les progrès réalisés par certains pays membres depuis que l’Assemblée générale de l’ONU a adopté la convention des Nations unies contre la corruption, il n’est pas (encore) question de victoire.
Dans la plupart des cas, y compris dans les pays qui ont ratifié la convention, les efforts des autorités nationales pour lutter contre la corruption n’ont pas encore produit de résultats concrets. Les experts pensent même que la corruption augmente dans d’autres États.
Il est donc clairement temps pour les entreprises et la société civile de collaborer beaucoup plus sérieusement et de manière solidaire contre la corruption. Le programme pour un « Monde sans corruption »*, développé par notre organisation, promeut la participation à la mise en œuvre de la convention de l’ONU contre la corruption. Ce programme est différent des autres initiatives car il vise à éviter l’implication éventuelle des entreprises dans des activités de corruption en travaillant en amont, au lieu de simplement sanctionner les personnes qui enfreignent la loi.
Notre mission concerne plusieurs domaines, et implique des ONG intègres ainsi que les entreprises que nous espérons superviser et protéger.
Les ONG doivent d’abord effectuer un examen interne car les activités ont tendance à ne pas être coordonnées et la plupart des organisations ne connaissent pas l’existence des autres. En général, les activités des ONG pour lutter contre la corruption se limitent à évaluer les niveaux de corruption plutôt qu’à adopter de réelles mesures pour la réduire. Les préjugés négatifs et critiques qui ont prédominé par rapport aux actions anti-corruption des ONG empêchent les entreprises et les autres de participer ouvertement dans de telles activités, limitant ainsi encore plus les ressources des institutions de la société civile ainsi que leur potentiel.
Parallèlement, ce sont les organisations du secteur privé qui sont les plus touchées par la corruption et qui subissent le plus de préjudices. La corruption fausse les marchés, nuit à la concurrence équitable, entrave l’organisation des activités d’entreprise et réduit les bénéfices potentiels. Dans les marchés touchés par la corruption, les sociétés sont obligées de s’adapter, en versant des pots-de-vin par exemple, ce qui réduit la légitimité sociale de leurs activités. Jusqu’à présent, on ignore peut-être que les entreprises sont les alliées principales et naturelles de la société civile dans sa lutte contre la corruption.
Ces dernières années, le soutien du secteur privé au combat contre la corruption à l’échelle internationale s’est limité à des cadeaux visant à atténuer leur sentiment de culpabilité : la plupart du temps, l’objectif des contributions de ces entreprises privées est de se racheter suite à des sanctions pour corruption. Les fonds dépensés par ces sociétés ont ainsi pour unique but de parvenir à un accord à l’amiable. En retour, les organisations de la société civile reconnues par les autorités de contrôle utilisent les financements de ces entreprises pour mettre en œuvre des projets plutôt timides, inefficaces et qui n’ont aucune influence dans la pratique.
Aujourd’hui, la lutte contre la corruption dans le secteur privé vise principalement deux objectifs : financer les activités plutôt inefficaces de certaines ONG et mettre en œuvre des procédures de contrôle interne. Mais il s’avère que les ONG ne sont pas souvent tenues responsables de la façon dont elles gèrent les dons importants.
Pour combattre la corruption de manière efficace, chaque entreprise devrait avoir la possibilité de participer au financement de projets anti-corruption spécifiques qui correspondent à ses intérêts et à son expérience. L’entreprise ne devrait pas uniquement pouvoir contrôler entièrement l’utilisation par l’ONG des ressources allouées, mais aussi participer au projet de manière indépendante ou en collaboration avec l’organisation pour atteindre les objectifs définis. Et les ONG ne doivent pas considérer les entreprises comme des vaches à lait qui n’ont pas leur mot à dire.
Le développement d’une telle approche requiert évidemment de nouveaux mécanismes et techniques pour interagir entre ces forces sociales, ainsi que pour adapter les points de vue et opinions en présence sur de telles interactions.Et il est grand temps d’agir. Notre organisation a développé les mécanismes et techniques nécessaires qui ont été testés sur le terrain dans le cadre de projets mis en œuvre durant les six dernières années.
Un de nos principaux succès a été obtenu dans un secteur de l’économie fortement touché par la corruption : la construction. Nous avons signé à Syktyvkar, ville située au Nord de la Russie, un accord avec une entreprise de construction pour nommer un expert indépendant qui supervisera chaque étape du processus de construction. Le prix du mètre carré dans le bâtiment en question est ainsi passé d’environ 2 500 à 1 000 dollars !
Nous avons également mis en place le « Concours pour exposer la corruption dans les médias en Russie », qui a permis à 400 reporters de tout le pays de recevoir des prix à Moscou pour avoir mis à jour des cas de corruption. Ce concours est primordial pour nous car les médias, en tant que principale plateforme de dialogue entre l’État et la population, jouent un rôle important dans la lutte contre la corruption.
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Les systèmes de contrôle ne permettent pas de réduire la corruption
Les systèmes de contrôle qui font désormais partie intégrante de la politique d’entreprise des grands groupes – code de conduite, contrôles internes et formation du personnel – ne permettent pas de réduire la corruption, qu’ils soient appliqués en interne ou par des consultants qui coûtent cher.
Premièrement, les systèmes de contrôle anti-corruption sont conçus pour vérifier l’intégrité des niveaux de gestion les plus bas et pour réduire au maximum leurs éventuels actes de corruption. Cependant, dans les marchés où le niveau de corruption est élevé, c’est grâce à ces services que la plupart des fraudes sont réalisées. Les systèmes de contrôle anti-corruption sont inutiles lorsque les cadres supérieurs effectuent ce type d’exactions.
Au lieu de compliquer davantage ces systèmes de contrôle, des techniques plus simples et moins onéreuses pourraient être mises en place pour combattre la corruption. De telles technologies doivent pouvoir bénéficier à tous grâce à un système mûrement réfléchi avec les ONG anti-corruption. L’expérience pratique de la Commission de lutte contre la corruption de l’ONG interrégionale montre qu’aucune entreprise ne peut résister seule et de manière fiable et efficace à la pression de la corruption.
Les ONG anti-corruption et toutes les autres institutions de la société civile seront incluses dans cette lutte, y compris les universités, les syndicats de journalistes, les associations artistiques et culturelles, les associations d’enseignants et de professeurs, les organisations professionnelles, les associations religieuses, les associations de consommateurs et les organisations opérant au sein des collectivités.
Les universités pourraient fournir des études approfondies ainsi que des explications sur les causes de la corruption et ses mécanismes. La communauté des journalistes exerce une grande influence sur l’opinion publique et devrait dès lors faire le maximum pour diffuser des informations, non seulement sur des cas spécifiques de corruption et les enquêtes sur les personnes impliquées, mais également sur tous les cas plus ou moins réussis de lutte contre la corruption au sein de la population et des organisations du secteur privé.
Les associations religieuses peuvent quant à elles jouer un rôle important dans l’opposition éthique à la corruption. La condamnation de tout acte de corruption devrait devenir une règle morale.
Les organisations professionnelles ne s’impliquent pas assez dans la lutte mondiale contre la corruption. Les syndicats possèdent des ressources et une influence politique significatives pouvant avoir un impact considérable dans ce combat. Ils peuvent notamment motiver les organisations du secteur privé à s’abstenir de toute forme de corruption en soutenant activement de tels refus, prendre en compte les intérêts des parties concernées pour mettre en œuvre les procédures d’entreprise pour contrer la corruption et exercer une pression sur les sociétés qui utilisent ces méthodes. Ces objectifs pourraient être atteints en introduisant des dispositions anti-corruption dans les contrats de travail, en organisant des grèves ou en boycottant certains employeurs.
Les associations de consommateurs et les organisations opérant dans les collectivités locales peuvent également influencer les positions des entreprises dans certains marchés, et ce en fonction de la volonté de ces sociétés de lutter contre la corruption. Les efforts coordonnés de ces organisations pourraient exercer un impact considérable sur la rentabilité de telles entreprises.
Parallèlement, les expériences passées démontrent que les forces sociales ne peuvent obtenir pas de résultats en combattant la corruption en solitaire. Seules la consolidation et, dans la mesure du possible, la coordination des efforts conjoints grâce à l’échange constant d’informations peuvent offrir les synergies requises. Même un petit nombre d’organisations et l’impact de leurs activités conjointes peuvent grandement dépasser les résultats visés pour lutter contre les activités isolées d’un plus grand nombre de projets anti-corruption.
Pour plus d’informations sur le programme pour un « Monde sans corruption », consultez http://www.un-wwc.org
* L’intitulé complet du programme est : « Collaboration entre la société civile et le secteur privé pour mettre en œuvre la Convention des Nation unies contre la corruption : progrès grâce à la synergie »
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