Gaz ou Atome, Poutine s’en trouve toujours bien

Crédits photo : AP

Crédits photo : AP

François Fillon est tombé d’accord sur presque tous les sujets économiques et politiques avec son homologue Vladimir Poutine à l’occasion du 16ème séminaire intergouvernemental franco-russe qui se déroulait à Moscou.

« Si la France poursuit l’aventure du nucléaire, nous poursuivrons nos échanges, qui se chiffrent à un milliard de dollars par an » a déclaré vendredi le premier ministre russe lors de la conférence de presse aux côtés de François Fillon. Faisant référence au débat qui agitent l’opposition française sur une possible sortie du nucléaire, Vladimir Poutine a glissé dans un sourire que « Gazprom se réjouirait de voir la France abandonner l’atome pour acheter davantage de gaz ». Une perspective qui n’amuse pas du tout François Fillon, qui a profité de l’occasion pour tacler des socialistes et verts « irresponsables » selon lui en matière de politique énergétique. Le premier ministre français souhaite voir l’industrie nucléaire française demeurer un domaine d’excellence hexagonal. Le séminaire intergouvernemental s’est conclut sur la réalisation d’une « feuille de route » commune entre le CEA et RosAtom pour le développement d’un réacteur de nouvelle génération à neutrons rapides à caloporteur sodium. Sur un plan plus immédiat et industriel, Vladimir Poutine a souligné qu’Areva travaillait déjà avec les Russes sur des projets internationaux, dont une centrale chinoise et se trouvait sur le même appel d’offre que RosAtom sur des centrales en Bulgarie, en Turquie. Il a invité les industriels français à faire des propositions sur la future centrale nucléaire de la Baltique.

Autre point capital pour le chef du gouvernement russe : le soutien de la France pour octroyer au futur gazoduc South Stream le statut de « projet d’intérêt européen ». François Fillon ne s’est pas prononcé sur un lobbying de Paris auprès de la Commission Européenne, mais il a rappelé sa présence lors de l’inauguration le mois dernier en Allemagne de l’autre grand gazoduc Nord Stream, qu’il a qualifié de « pas en avant dans la sécurité énergétique européenne ». Mais South Stream, auquel EDF participe en tant qu’investisseur, se trouve être un concurrent « mortel » pourrait-on dire, du gazoduc concurrent Nabucco, dont l’objectif est de réduire la dépendance européenne envers le gaz russe.

François Fillon était venu à Moscou avec une sélection de ministres (économie et finances, justice, enseignement supérieur et recherche, ville, transports) ainsi que des chefs d’entreprises du CAC40 (Sanofi Aventis, Bouygues, Alstom, EDF, GDF Suez, etc.). Tous ont signé des accords d’une portée relativement modeste, hormis Bouygues qui s’est entendu avec l’Administration Présidentielle russe pour construire à Paris le Centre Culturel Orthodoxe. Un contrat non chiffré mais qui est certainement un bon point pour le groupe français, très intéressé par les immenses marchés publics potentiels en Russie. Vladimir Poutine a rappelé à l’occasion de l’accord signé en personne par Martin Bouygues que « la France comme la Russie sont majoritairement chrétiennes et ce centre culturel aidera à rapprocher nos peuples ».

Un sujet où par contre les deux gouvernements ne parviennent pas à rapprocher leurs positions, c’est celui de la Syrie. François Fillon a réitéré le désir de Paris de voir Bachar El Assad quitté le pouvoir « car la répression féroce opérée contre son peuple lui a ôté toute légitimité ». Moscou est par contre hostile à toute sanction de l’ONU contre Damas, qui reste l’un de ses plus fidèles alliés au Proche-Orient, et un gros acheteur d’armes russes. Après l’intervention du premier ministre français, Vladimir Poutine a ironisé sur une France « telle qu’on l’aime », (sous entendu, donneuse de leçon) et l’a remercié, dans un sourire sardonique, « de ne pas intervenir militairement ». Il y a donc beaucoup de chances que l’histoire syrienne trouve une issue avant que Paris et Moscou tombent d’accord. Mais ce n’est pas cette divergence qui infléchira un commerce bilatéral en hausse de 37% par rapport à 2010 et atteindra 30 milliards de dollars cette année. Vladimir Poutine retombe toujours sur ses pieds.

Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.

Ce site utilise des cookies. Cliquez ici pour en savoir plus.

Accepter les cookies