Oleg Kachine : « La Russie est un pays dangereux »

Oleg Kashine. Photo : Kommersant.

Oleg Kashine. Photo : Kommersant.

Le 6 novembre 2010, le journaliste russe Oleg Kachine se faisait violemment agresser à la sortie de son domicile. La Russie d’Aujourd’hui l’a rencontré.

Quelle est la situation actuelle pour les journalistes en Russie ?

Je n’ai jamais considéré qu’il y ait un problème spécifique pour le journalisme en Russie. C’est un pays dangereux en soi. On y tue 40 fois plus de gens, en général, qu’en Europe. C’est pourquoi statistiquement, les journalistes sont tués 40 fois plus souvent qu’ailleurs. 

Le journal « Kachine » qui m’a été consacré pendant que j’étais à l’hôpital a présenté une liste des journalistes tués : j’étais embarrassé parce qu’elle contenait des noms de gens qui étaient de toute évidence morts pour d’autres raisons que leur métier.

Mikhail Fedotov a affirmé que la situation s’est améliorée, globalement, ces trois dernières années…


Il a aussi affirmé que « l’affaire Kachine était presque résolue ». Presque résolue c’est comme presque enceinte, ça n’existe pas. Malgré le travail assidu des enquêteurs, rien n’a bougé. Huit mois se sont déjà écoulés et j’ai de grands doutes que la lumière soit faite un jour. Vous comprenez que je suis un peu sceptique envers ce que peut dire Fedotov… Personnellement, je ne parlerais pas d’amélioration. Prenez la forêt de Khimki par exemple, sa défense est devenue une raison pour des agressions sérieuses de journalistes, la violence s’y maintient, y compris contre les écolos. Je ne dirais pas qu’on respire mieux dans le pays.

Comment travaillez-vous et vivez-vous depuis votre agression ?

Ma vie a évidemment changé. On me refuse parfois des interviews avec la formule : « Il s’est fait tabasser, c’est qu’il a écrit un truc qu’il ne fallait pas, il fera pareil sur nous »… Mais on me connait mieux, ce qui me facilite souvent la tâche aussi. En somme, je peux travailler comme avant.

Et la peur ?

Je pense que mon agression s’inscrit dans une longue lignée de provocations et d’agressions. Y penser tout le temps serait invivable.

Vous ne refusez aucun sujet d’article ?

Non. En plus, je pense que j’écris aujourd’hui avec plus de dureté contre les adversaires du bien.

Pensez-vous être devenu un symbole ?

C’était un risque. Mais heureusement que j’y ai échappé, justement en recommençant à travailler normalement. Et ma dernière publication, les mémoires imaginaires de Konstantin Ernst (le directeur général de la chaine publique Pervy Kanal, NDLR) pour le magazine Vlast a plus d’importance pour moi que les évènements de novembre car elle soulève des débats et des discussions d’actualité.

Par ailleurs, ce procès contre Iakemenko est la prolongation d’une polémique qui dure depuis 10 ans. Cette fois-ci, il m’accuse d’atteinte à l’honneur car j’ai exprimé ma conviction qu’il est mêlé à mon agression. La cour doit se prononcer aujourd’hui. (NDLR : Quelques heures après l’interview, la cour a donné gain de cause à Kachine.)

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