Crédits photo : Kommersant
N'exagère-t-on pas souvent le rôle de Gorbatchev dans l’histoire ?
Avant
Mikhaïl Gorbatchev, aucun des dirigeants n’avait même à l’esprit
d’entamer des changements démocratiques aussi radicaux. Quand
Gorbatchev est arrivé, une sorte de miracle s’est produit. Il a
proposé d’allier le socialisme à la liberté. À l’époque, la
liberté de parole n’existait que dans les cuisines. Et tout à
coup, le Secrétaire général en personne déclare que les
changements démocratiques sont indispensables et dans l’économie,
et dans la politique. De toute évidence, à contre-courant de
l’instinct de préservation du pouvoir.
Ou
au contraire, de peur de tout perdre…
C’est
encore une erreur tenace de notre intelligentsia occidentaliste.
Gorbatchev aurait lancé la perestroïka par crainte des vastes
programmes militaires occidentaux. Et c’est à cause de cette peur
que les dirigeants soviétiques, conscients de l’incapacité de
l’URSS à une riposte adéquate, auraient eu besoin de démocratiser
le pays. Étrange logique. Dans une telle situation, le Kremlin
aurait plutôt eu intérêt à suivre un chemin sûr : toujours plus
de mobilisation des ressources, durcissement de la discipline,
renforcement de la centralisation.
Autre erreur : la
perestroïka et son leader, Mikhaïl Gorbatchev, ont détruit l’Union
soviétique. En réalité, en réformant un état unitaire, il
n’aspirait qu’à le transformer en véritable fédération, un
alliage organique d’un centre fort et d’une grande autonomie des
républiques unifiées.
Mais
l’Union s’est tout de même écroulée…
On
peut reprocher à Gorbatchev d’avoir sous-estimé les conséquences
de la prise de conscience nationale dans les républiques.
L’agitation populaire a fait monter à la surface de la vie
publique toutes sortes de préjugés nationalistes, dont les hauts
fonctionnaires des républiques ont su faire usage pour accéder au
pouvoir. Gorbatchev s’inquiétait justement des conséquences de la
dislocation. Son grand mérite est d’avoir ouvert les vannes pour
des changements systémiques. En initiant l’abolition de l’article
6 de la Constitution soviétique ¨ [système de parti unique, ndlr]
, il a inauguré la compétition politique dans le pays. C’était
un moment de rupture dans l’histoire. En tant que politicien, il a
perdu à cause de ses propres erreurs de calcul mais surtout à cause
des égarements massifs de l’opinion. Il prenait des coups de tous
les cotés, des occidentalistes comme des slavophiles. Le peuple
voulait « tout, tout de suite ». Bref, à la fin de 1991,
il s’est retrouvé presque totalement isolé politiquement.
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