Quand les Français dominent la glace

Crédit photo : Ria Novosti

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Comme tous les gens qui écrivent depuis des décennies sur le patinage artistique, j’ai beaucoup de souvenirs. Mais jamais les Français n’avaient été aussi bons en champions d’Europe…

J’ai toujours eu mes préférences. Alain Calmat, champion d’Europe et médecin, devenu  ministre des sports, et qui m’accordait des interviews franches sur la vie, la politique, et tout le reste. J’aimais beaucoup et j’aime encore Brian Joubert, talentueux mais malchanceux, à qui il faut un temps fou pour se remettre en forme après les vacances d’été.

Et ici, à Bern, dans le froid glacial d’une patinoire mal aménagée, où le thermomètre tombait presque jusqu’à zéro, les Français ont accompli un miracle. Le couple Nathalie Péchalat – Fabien Bourzat a vaincu nos jeunes Russes Katia Bobriva et Dima Soloviev. Mais cette victoire, nous y sommes un peu pour quelque chose, nous les Russes. Les deux Français ont été attirés dans notre culture nationale du patinage artistique triomphant par l’entraineur russe Alexandre Jouline. Mon vieil ami, ancien champion du monde lui-même, a accompli, selon moi, l’impossible. Il a insufflé l’inspiration artistique russe à un couple de Français, plus très jeune pour des patineurs, lui la trentaine, mademoiselle a 27 ans. Alexandre me racontait qu’il aime bien travailler avec eux. Il a réussi à transmettre à ses pupille cette légèreté triomphante, si difficile à acquérir, et qu’ils ont saisie comme nos danseuses saisissaient les leçons de Marius Petitpas ou les étoiles françaises, à l’Opéra Garnier, apprenaient tout de notre Rudolf  Noureïev. Et ce n’est pas le premier succès franco-russe dans le domaine de la danse sur glace. En 2002, à Salt-Lake City, les champions olympiques de danse sur glace ont été Marina Anissina et Gwendal Peizerat. Ces victoires permanentes de deux écoles de patinage artistique si proches ne sont pas un hasard.

Mais même ces succès blêmissent à coté de la perfection du jeune Florent Amodio. Ça, c’est de l’internationalisme total. Jamais les championnats d’Europe n’ont été remportés par un athlète avec autant de sang brésilien. Mais Amodio est aussi un véritable Français, entrainé par le Russe Nikolaï Morozov. Cet entraineur est qualifié de génial partout ces derniers mois. Il travaille avec un bataillon de patineurs russes et étrangers, dont des Japonais qui ne parlent que leur langue maternelle. Comment trouve-t-il le temps de tout faire ? Ce sont les caractéristiques de la jeunesse d’avoir envie de faire dix choses à la fois et d’y parvenir. En plus Morozov a un sang-froid hors normes. J’ai été témoin d’une grosse tuile : à l’aéroport allemand, Nikolaï s’est fait voler la pochette qui contenait tous ses papiers. Il n’a jamais perdu la maitrise de soi. Évidemment, les voleurs n’ont pas été retrouvés, mais Morozov est resté impérial, en faisant tout ce que de telles situations requièrent : police, déposition, et départ à l’hôtel se sont déroulés sans la moindre note de panique. Je pense que c’est comme ça qu’il entraine Amodio : dignement, calmement, sans émotions superflues, si caractéristiques pour certains patineurs artistiques exaltés.  

Mon favori Joubert a aussi fait sensation. Il rampait littéralement sur la glace pendant son programme court. Toutes les chutes étaient pour lui. Subitement, la transfiguration. D’une place lointaine, Brian s’est hissé en deuxième sur le podium. Triomphe français à Bern.

Transfiguration russe aussi. Après l’échec et le départ de tous les grands, notre patinage artistique traversait une crise profonde. Enfin, pas si profonde que cela si quelques années ont suffi à la surmonter. Une flopée de fillettes solitaires est en train de grandir chez nous, trop jeunes encore pour participer aux championnats européens et mondiaux. Tandis que dans la compétition en couple, nous préparons une grande surprise au monde. L’Ukrainienne devenue Russe Tatiana Volossojar s’est mise en duo avec Maxime Tarnkov pour apparaitre pour la première fois devant le public au mondial de mars à Tokyo. Ce sera un sacré couple ! Et l’un des entraineurs du duo est encore l’infatigable Nikolaï Morozov. Tout le monde en profite, et vous et nous.

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