Moscou, une ville à part ?

Crédits photo :  RG

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Comme de nombreuses capitales, Moscou ne reflète pas totalement son pays. Elle est dotée d’une économie plus dynamique et de droits politiques plus étendus, et les Russes estiment que leur capitale est bien plus qu’une foule de gens pressés, ou autres clichés habituellement colportés par les provinciaux.

« Un Moscovite dans une ville de province est facilement identifiable : il sera forcément hyperactif », raconte Roman Ivanov, natif de Tchita, en Sibérie orientale. Son père, qui a travaillé dans les forces armées, a beaucoup voyagé.

« Les Russes des régions sont préoccupés par les inégalités de salaire. Les mêmes emplois sont beaucoup mieux rémunérés dans la capitale », déclare-t-il au journal Moscow News.

Le Centre de Recherche Stratégique (TsSR) et l’Académie nationale d’économie ont cherché ensemble à analyser les causes du creusement des inégalités entre les villes et les campagnes russes. L’économie est au cœur de ce malaise, assurent-ils, encourageant la recherche d’une nouvelle voie politique pour protéger les biens et les emplois menacés par la crise.

Cette orientation politique a fait de la capitale l’épicentre des manifestations anti-gouvernementales, comme l’a montré récemment le mouvement d’opposition Solidarité réuni sur la place Bolotnaia (photo ci-dessus).

Propriété privée et influence

« Compte tenu de la dévaluation des revenus du patrimoine et, simultanément, de l’inflation des salaires, on observe que l’immobilier est devenu la principale source de revenu des Moscovites », a indiqué à Vedomosti, le président de TsSR, Mikhail Dmitriev.

L’acquisition d’actifs négociables a augmenté de façon spectaculaire la demande par les Moscovites d’une application effective de la primauté du droit, en particulier dans la protection de la propriété privée, a-t-il ajouté.

Un système juridique défaillant, une administration peu démocratique, et l’incapacité des tribunaux à régler les différends ont forcé les Moscovites à utiliser d’autres canaux d’influence pour se faire entendre, notamment par le biais de liens au sein du gouvernement. Au travers de médias métropolitains efficaces, de la télévision nationale et de l’Internet, la classe moyenne de la capitale diffuse ses valeurs à travers l’ensemble du pays, affirme M. Dmitriev.

Pouvoir et influence semblent primordiaux pour les Moscovites, contrairement aux régions. « Les habitants de Saint-Pétersbourg pensent que VIP signifie Very Intelligent Personne, alors que pour les Moscovites, c’est Very Important Person », raconte Svetlana Mironova, résidente pétersbourgeoise. Originaire du Tatarstan, Elvira Shakirova affirme que dans sa ville natale, à Kazan, les gens sont « plus humains ».

Scepticisme

L’argent n’apporte pas toujours le bonheur , et grâce aux revenus des locations, les Moscovites ont plus de temps libre pour protester, contrairement au reste du pays. Alors que les Russes des provinces commencent à s’enrichir et ont tendance à accroître leur loyauté envers le pouvoir, les plus riches des Moscovites pourraient bien se sentir plus rebelles que jamais.

Ils sont également plus sceptiques concernant les plans de modernisation du Kremlin, en particulier les hommes, rapporte le quotidien russe Vedomosti.

Une société ouverte

Pourtant, le désir d’une plus grande ouverture exprimée à la fois par la société et le gouvernement ne colle pas avec le comportement des habitants de la capitale. « Les Moscovites sont des gens plutôt fermés. A Kazan, ils sont plus ouverts, et toujours prêts à aider », perçoit Mme Shakirova.

Elena Medvedeva vient de Surgut, dans le nord de la Sibérie, et elle approuve cette observation. « Les gens semblent plus souples à Moscou parce qu’ils doivent penser à beaucoup de choses dans la journée ! Ils font tout au pas de course, mais au final, nous sommes plus confiants, ou peut-être plus naïfs », a-t-elle déclaré par téléphone.

« Les Moscovites sont très méfiants », explique Dmitri Tchaïkovski, un citoyen russe né au Kazakhstan qui vit désormais à Moscou. « Ils se soucient beaucoup d’eux-mêmes, et sont moins communicatifs, plus prudent. Peut-être parce que Moscou est une ville dangereuse ».

L’exagération poussée aux extrêmes

Mais Alex Nikolaichuk, ex-résident de la capitale et actuellement étudiant à Saint-Pétersbourg, pense que les écarts sont surestimés. « Je ne suis pas sûr qu’il y ait tant de différences. A Saint-Pétersbourg, on dit que les Pétersbourgeois sont plus polis et agréables que les Moscovites. Mais si on parle des intelligentsias, elles se ressemblent dans les deux villes. Franchement, je ne vois pas de différence », assure-t-il.




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