Un règne de 18 ans s’est achevé pour Iouri loujkov,le maire déchu de la capitale russe. Il était populaire à Moscou,mais agaçait le Kremlin. Crédits photo : RG
Fin septembre, les trois chaînes de télévision d’ État russes ont diffusé des reportages très compromettants sur le maire de Moscou, Iouri Loujkov. C’était la première fois, à l’ère Poutine, qu’elles étaient « utilisées » pour discréditer une personnalité politique appartenant à la majorité mais très critique à l’égard du Président Medvedev.
Aux commandes de la capitale depuis 1992, Loujkov a fini par être accusé de tout, depuis la démolition illégale de bâtiments historiques classés jusqu’à l’octroi controversé de contrats municipaux à la société de travaux publics de son épouse Elena Batourina, la seule femme milliardaire de Russie. La goutte d’eau qui a fait déborder le vase a été sa mauvaise gestion de la crise des incendies l’été dernier, alors qu’il passait ses vacances en Autriche. Mais l’ancien maire avait ses partisans : « il versait les pensions les plus élevées du pays quand nous étions au bord de la famine, il a su garder les rues propres et le chauffage en hiver », proteste Sergueï Danilov, propriétaire d’une petite entreprise, et résident moscovite depuis son enfance. Il est vrai que la capitale a bénéficié des grands travaux entrepris sous le règne de Loujkov : du périphérique en 1995 à la reconstruction, en 2000, de la cathédrale Saint-Sauveur.
La popularité de Loujkov (réélu à trois reprises en 1996, 1999 et 2003) s’explique par le paquet d’aides sociales qu’il offrait aux Moscovites grâce au riche budget municipal (presque toutes les grosses sociétés russes payent leurs impôts dans la capitale). Politicien très habile, il faisait abondamment relayer ses déclarations populistes par la chaîne de télévision appartenant à la mairie et par quelques quotidiens à grand tirage dont il avait les faveurs. Sa réputation était toutefois entachée par des projets de construction douteux en plein centre historique de la ville, une gestion calamiteuse de la circulation routière, et par des accusations de népotisme.
« Remplacer Loujkov par un réformateur radical serait une erreur », avertit pourtant Andreï Ryabov, du Centre Carnegie de Moscou. « Je ne veux pas faire l’apologie de l’homme, mais il faut reconnaître qu’il savait équilibrer les forces en compétition. Je ne vois personne d’autre dans le paysage politique actuel capable d’accomplir cela ».
« Un nouveau maire pourrait être tenté de conduire d’importantes réformes, d’introduire davantage de concurrence, et de remettre de l’ordre dans les fonds de pension et les services municipaux de la ville. Les prestations sociales seraient alors réduites. Nous aurions ensuite des retraités dans la rue, et cette instabilité serait néfaste pour les affaires. Vous ne pouvez avoir de réformes soi-disant libérales uniquement à Moscou. Elles doivent être entreprises à l’échelle nationale, et le Kremlin le sait », conclut Ryabov.
Chris Weafer, de la banque Uralsib, est convaincu du contraire : « lorsque vous avez un changement notoire dans une administration de longue date, les possibilités s’ouvrent pour les investisseurs. Cela s’applique à n’importe quelle grande ville
du monde. Quand une nouvelle équipe arrive, de nouveaux joueurs sont en mesure de soumettre une offre et de décrocher un contrat ».
Selon Mark Roubenstein, analyste à la banque d’investissement Metropol, « plusieurs solutions existent pour améliorer le climat d’investissement à Moscou. Le changement se fera progressivement, sur plusieurs années. Je ne m’attends pas à des changements notoires à court terme, qui que soit le nouveau maire ».
Changement de maire : Moscou s’interroge
Dmitri Medvedev a choisi Sergueï Sobianine (sur la photo) comme futur maire de Moscou car ce denier « possède une vaste expérience en tant que dirigeant » qui lui permettra de « résoudre les nombreux problèmes de la capitale ». Sergueï Sobianine, 52 ans, est né en Sibérie. Sobianine est juriste de formation comme Medvedev. Il a été remarqué en 2000 par Vladimir Poutine, qui l’a nommé gouverneur de la région de Tioumen. En 2005, Sobianine a été promu chef de l’administration présidentielle. Depuis lors, il est considéré comme l’un des hommes les plus proches de Poutine.
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