Repeupler les campagnes russes

L’exploitant a l’option de s’émanciper de l’entreprisegestionnaire. Crédits photo : Elena Nagornykh, Photoxpress

L’exploitant a l’option de s’émanciper de l’entreprisegestionnaire. Crédits photo : Elena Nagornykh, Photoxpress

Un schéma original est actuellement testé pour encourager les entreprises agricoles individuelles et tirer un trait final sur les kolkhozes.
« Novaïa Derevnia », ou « Village nouveau » : c’est le nom de l’ambitieux projet qu’accueille l’oblast d’Oulianovsk (900 km à l’est de Moscou). Youri Chevtchenko, directeur de l’entreprise « Agropark-Management » et Edouard Vyrypaev, copropriétaire de RTM, sont les moteurs derrière cette première expérience de « Village nouveau » dans la région de Novomalyklinsk : 28 habitations, 20 mini-fermes, trois usines de conditionnement de la viande (capacité : 10 000 tonnes par an), de fabrication d’aliments combinés pour le bétail et de produits laitiers, le tout complété par des bâtiments administratifs et de service. Douze familles se sont déjà installées, mais le nombre de candidatures s’élève à 18 500, soit 180 candidats pour une place. Il s’avère cependant que 70% des postulants sont plus motivés par l’accès au logement que par le développement de l’agriculture...

Pour autant, les promoteurs ne doutent pas du succès de leur entreprise. Le gouverneur d’Oulianovsk, Sergueï Morozov, a d’ailleurs estimé que le projet devrait permettre de créer 20 000 emplois dans la région, d’augmenter le salaire moyen et de résoudre le règlement de divers problèmes sociaux, comme la sécurité agro-alimentaire et 
la modernisation de la sphère 
sociale ; il devrait enfin favoriser « la formation d’une classe moyenne à travers la création d’entreprises familiales ». Le projet est novateur parce qu’il parie sur l’agriculteur individuel dans une culture rurale encore 
embourbée dans les schémas kolkhoziens et sovkhoziens.

Le modèle économique implique que les investisseurs prennent en charge la construction des infrastructures et des exploitations agricoles, pour les revendre ensuite aux propriétaires particuliers dont les paiements seront échelonnés sur cinq à dix ans. Autre possibilité : construire des mini-fermes dans les agglomérations voisines du « Village nouveau ». Dans ce cas, l’agriculteur souscrit un emprunt auprès de Rosselkhozbank (le crédit agricole russe), cautionné par les investisseurs qui financent la réalisation de la ferme. Ensuite, pendant les cinq à dix années suivantes, en travaillant au moins quatre heures par jour, l’exploitant reçoit 388 euros par mois de la part des investisseurs, jusqu’à remboursement complet du prix de la ferme. Ses revenus peuvent augmenter jusqu’à 1 162 euros mensuels, et l’exploitant a l’option de s’émanciper de l’entreprise gestionnaire pour se mettre à son compte. Il est aussi libre de quitter le « Village nouveau » à tout moment, avec des indemnités correspondantes à ce qu’il a investi dans l’acquisition de la ferme.

L’activité des agriculteurs du « Village nouveau » est contrôlée par l’entreprise gestionnaire, qui assure le suivi du cycle de production et de distribution, ainsi que l’entretien des exploitations. Les investisseurs n’ont pas inventé ce type d’unions agricoles, qui existent déjà en Europe et aux États-Unis. Mais ils se heurtent à un certain nombre de difficultés locales. Par exemple, l’absence d’agriculteurs et de spécialistes qualifiés. Le directeur général du holding agricole « Altyn », Valery Pokorniak, estime que le succès d’un tel projet repose sur trois composantes essentielles : une sélection rigoureuse et juste des candidats, des conditions claires et transparentes de contrat et de transfert de la propriété, ainsi qu’un système efficace d’achat de la production des exploitants.


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