Le bonheur de Zakhar

Titre
Le Péché

Auteur
Zakhar Prilepine

Editeur
Éditions des Syrtes

« Je me sentais heureux à la folie jusque dans mon sommeil. » Zakhar est heureux. N’allez surtout pas en déduire que la vie est belle ! la vie n’est pas belle, elle est précieuse, chaude et fragile comme un matin d’été avant le départ pour la guerre, comme la nuque duveteuse d’un enfant endormi, comme le sommeil de la femme qu’on aime.

Le Péché est un « roman en nouvelles » qui retrace des moments de la vie de Zakhar. Ici, l’enfance, avec ses jeux, la perte irréparable de l’ami, l’adolescence et les premiers émois amoureux ; là, le père de famille comblé, plus loin encore, le célibataire trentenaire, sérieux compagnon de bouteille, tantôt videur de boîte de nuit, tantôt fossoyeur, soldat ou journaliste comme le fut en son temps l’auteur.

Écrivain à la réputation sulfureuse, Zakhar Prilepine s’efface ici devant son héros, Zakhar (qui porte son nom, en fait son pseudonyme), faisant de nous les témoins attendris de sa perception de la vie, de son bonheur d’autant plus vif que la mort lui fait pendant et qu’il n’est pas toujours donné de lui échapper. La vie palpite, elle bouillonne comme le sang dans la blessure ouverte. Et, tandis que le héros clame comme un leitmotiv son bonheur, la mort veille, toujours prête à ravir la vie de l’adolescent insouciant qui part à la guerre, de l’ivrogne frôlé par les roues du train, du conducteur distrait qui échappe à l’accident, du soldat qui tombe dans l’embuscade.

Même si Le Péché s’appuie largement sur des faits vécus par l’auteur, ce n’est pas pour autant un texte autobiographique. Plus qu’un prétexte pour mettre en scène son bonheur ou l’analyser, le choix de la fiction offre à Prilepine celui d’affirmer dans la prose et la poésie son goût de l’écriture et, par son travail d’écrivain, de « gagner un espace inondé de soleil tiède et blond comme une bière, où est offerte à chacun une gloire de son vivant, où il est promis l’amour posthume peut-être pas éternel, mais suffisant pour qu’on ne l’oublie pas, ne serait-ce que le temps d’un repas funèbre. »

Avec Le Péché , Zakhar Prilepine peut être rassuré, il a déjà sa place au premier rang des écrivains russes.

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