La beauté est une force effrayante! (+Diaporama)

Des dizaines, des centaines et même des milliers de femmes sortent de chez elles et se précipitent vers les arrêts de transport en commun pour arriver à l'heure au bureau.

La moitié d'entre elles, si ce n'est davantage, s’habille comme pour aller, non pas au bureau, mais à un cocktail. Maquillage sophistiqué, brushing, vêtements souvent moulants et surtout – surtout - talons aiguille. Pas question de s'en passer. Je précise de nouveau que cela se passe en Russie, où il fait froid la moitié de l'année, parfois même très froid, avec tout ce qui en découle de neige et de verglas. Le soir il a plu, la nuit il a gelé, et le matin, ce n’est plus un trottoir mais une patinoire ! Mais, bien entendu, ce n'est pas une raison pour ne pas mettre ses bottines à talons aiguille préférées. Un observateur extérieur doit avoir le cœur brisé en voyant une femme qui risque sa vie en faisant l'équilibriste sur le trottoir glissant. Cependant, demander à une femme pourquoi elle préfère souffrir plutôt que de mettre quelque chose de plus confortable, serait plus que manquer de tact, ce serait lui faire outrage. Elle ne souffre pas. Elle se sent bien, car elle est sûre qu'elle est magnifique, et c'est ce qui compte. Face à ce sentiment magique, le trottoir glissant ne représente qu’un obstacle mineur à ses yeux. Mais imaginez vous une seconde en train de courir après un bus avec des talons aiguille? Ou sur un escalator ?

On raconte que quelque part en Angleterre sont organisées des courses en talons aiguille. Pour autant que je sache, les Russes n'y ont pas encore été invitées. Les Anglaises ont bien fait, car elles n’auraient eu aucune chance face à leurs rivales surentraînées ! Croyez-moi, ce n'est pas une plaisanterie: la course en talons aiguille est notre sport national. Nous nous entraînons tous les jours, sans nous en rendre compte, alors même que nos talons se cassent régulièrement. Mais pour remédier à cette éventualité, il y a, à chaque coin de rue ou presque, des cordonneries avec de gentils messieurs prêts à réparer nos chaussures. C'est aussi en soi un autre sport national. En Russie, la réparation de chaussures est un business lucratif. Chaque femme qui se respecte compte obligatoirement un cordonnier parmi ses connaissances. Les chaussures fantaisie ne peuvent pas être confiées à n'importe qui.

On pourrait penser que les femmes russes s'habillent tous les jours comme pour se rendre à une fête uniquement pour plaire aux hommes. D’ailleurs, c’est ce que croient les hommes. C’est qu’il faut préciser un point important : il n’y aurait pas assez d’hommes pour tout le monde. De plus, ceux qui sont disponibles ne sont pas toujours dans une situation enviable. Bien souvent, ils boivent ou sont mêlés à des affaires dangereuses. Et en outre, on ne s’expose pas trop en affirmant que les gens bien, hommes ou femmes, sont partout en déficit. Pourtant, croire que jeunes filles et femmes sortent de chez elles en talons aiguille à 8 heures du matin avec pour unique but de trouver à l'arrêt de bus l'homme de leurs rêves serait un peu naïf. Croyez-moi, la femme russe ne s’en remet pas au destin. Elle est prête à affronter ses problèmes toute seule. Non, il s’agit d’autre chose. Faisons une démonstration par l'absurde. Il est totalement impossible d'imaginer une femme russe dans la rue en tailleur élégant avec des baskets aux pieds, comme le font parfois les Américaines qui ont le sens pratique et qui veulent pouvoir venir au bureau confortablement et changer de chaussures sur leur lieu de travail. Robe et baskets? Jamais de la vie ! Plutôt marcher pieds nus, et ce, malgré la longueur parfois considérable du trajet, avec deux, voire trois changements de transport en commun.

D'ailleurs, même les femmes qui conduisent ne sont pas prêtes à quitter leurs talons, bien que la conduite soit inconfortable, voire même dangereuse. Pour que le talon des chaussures fantaisie ne se dégrade pas à cause du frottement constant contre le tapis en caoutchouc, on met un morceau de carton par dessus. Le voilà, le sens pratique russe ! Au diable le confort, la beauté est toujours plus importante. Ainsi, la femme russe s'habille tout d'abord pour elle-même. Ensuite, pour rendre jalouses les autres femmes.

Et pour finir, bien entendu, pour les hommes. Dans le film soviétique « Cendrillon » des années 40, la remarquable comédienne Faïna Ranevskaïa qui joue la marâtre, prononce cette phrase devenue proverbiale : « La beauté est une force terrible !« Il me semble que, sans exagérer, nous pouvons affirmer que 90%, si ce n'est pas 100 % des femmes russes signeraient au bas de cette phrase. Et aucun talon cassé ne nous arrêtera !

Crédits photo : RIA Novosti

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