Crédit : RIA Novosti
Nikolaï Sokolov est un personnage peu connu de l’histoire de Russie. Toutefois, c’est grâce à lui que le monde peut être sûr aujourd’hui de connaître l’histoire de la mort du dernier tsar russe.
Nikolaï Sokolov est né le 22 mai 1882 dans la région de Penza. Il reçoit une formation juridique et commence sa carrière en qualité de juge d’instruction.
Au moment de la Révolution d’Octobre de 1917, il enquête sur les affaires d’importance particulière au tribunal de la région de Penza (600 km au sud-est de Moscou). Après la Révolution et le renversement de l’autocratie, il reste fidèle au vieux régime.
« Il demande un congé en raison d’une maladie et part pour la Sibérie », raconte Vladimir Soloviov, enquêteur criminaliste en chef du Département criminalistique du Comité d’enquête de Russie.
M. Soloviov estaujourd’hui le successeur de Nikolaï Sokolov : de 1993 à 2011, il a dirigé l’instruction relancée sur le dossier Romanov, et l’a achevée.
A l’est de l’Oural, Nikolaï Sokolov rencontre des responsables du Gouvernement sibérien, mis en place par l’armée blanche pendant la guerre civile. Il entre au parquet d’Irkoutsk, puis celui d’Omsk.
A Ekaterinbourg, où s’est joué le drame de la famille impériale, il se retrouve avec l’armée du Gouvernement sibérien huit mois après l’exécution de Nicolas II.
« Le 5 février, j’ai été convoqué par l’Amiral [Alexandre Koltchak, chef de l’armée blanche – ndlr], qui m’a confié l’enquête », a écrit Nikolaï Sokolov. Il réalise qu’il instruit un dossier d’une importance particulière pour l’histoire de la Russie.
« Dans notre travail, nous cherchons souvent à percer un mystère en s’orientent sur des faits communs. Mais cette fois-ci, les événements revêtent une importance spéciale, car il s’agit de faits historiques », a-t-il souligné dans son livre Le Meurtre de la famille du tsar.
Il est clair que sans ses informations, il serait aujourd’hui difficile de se repérer dans les développements de l’époque.
« Le grand mérite de Nikolaï Sokolov est d’avoir prouvé que la famille du tsar a effectivement été fusillée, déclare Vladimir Soloviov. Or, à l’époque, les hypothèses sur le sort de la famille Romanov étaient très nombreuses et certaines ont fait apparaître de faux héritiers. »
Les dépositions des témoins et les pièces à conviction se recoupaient sur un fait : « Le meurtre a été commis le 17 juillet », a écrit Nikolaï Sokolov.
D’après les informations actuelles, les hommes de la police secrète (Tcheka) s’attendaient à l’entrée de l’armée blanche à Ekaterinbourg et s’empressèrent de transporter les corps des Romanov à Ganina Yama, où se trouvait une mine abandonnée.
« L’enquêteur y découvrit un grand nombre de fragments d’os, fendus et brûlés, ainsi que des affaires et des objets identifiés par des proches de la famille du tsar », raconte l’historienne Lioudmila Lykova.
Nikolaï Sokolov supposa alors que les corps avaient été incinérés, conclusion qui fut pourtant démentie par la suite. Il s’avéra que les tentatives de brûler les corps ayant été vaines, ces derniers ont été enterrés.
L’armée blanche essuie échec sur échec et recule vers l’Est, mais Nikolaï Sokolov poursuit son enquête. Il rassemble des documents précieux et les fait sortir du pays, poursuit Lioudmila Lykova.
Ces dossiers sont envoyés en France en deux fois : à bord d’un bâtiment de guerre et dans un wagon de courrier diplomatique. Nikolaï Sokolov quitte lui aussi la Russie à destination de Paris en mars 1920.
En Europe, les membres de la famille Romanov ne croient pas l’enquêteur, estimant que le tsar et ses proches sont toujours en vie.
A la fin de sa vie, Nikolaï Sokolov fait un compte rendu intégral de l’enquête pour l’impératrice Maria Fiodorovna, la mère de Nicolas II. Il écrit également un livre intitulé Le Meurtre de la famille du tsar fondé sur les documents de l’instruction.
Selon certains témoignages, il voulait rentrer secrètement en Russie pour poursuivre l’enquête. Il est décédé en 1924 en France à l’âge de 42 ans.
L’intérêt pour la fin de la famille du tsar resurgit après la chute de l’Union soviétique, en 1993. La recherche des documents collectés par Nikolaï Sokolov a été lancée dans le monde entier. Dans certains cas, il a été possible de s’entendre sur la remise de copies des documents, dans d’autres, il a fallu les racheter.
Les archives de Nikolaï Sokolov ont été acquises lors d’une vente aux enchères de Sotheby’s par le prince de Liechtenstein, qui les a remises à la Russie par la suite. De nombreux dossiers de l’enquête et pièces à conviction se trouvaient à Jordanville aux Etats-Unis, à Bruxelles et dans les cathédrales de l’Eglise orthodoxe russe hors frontières.
Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.
Abonnez-vous
gratuitement à notre newsletter!
Recevez le meilleur de nos publications directement dans votre messagerie.