La performance « révolutionnaire » de l'artiste Ekaterina Vasilyeva

Mathilde Geldhof. Droit à l'image: Camille Le Chantelier
Le 20 juin, ces 24 personnes ont quitté simultanément et à l’heure convenue les portes de la ville de Paris, direction les Halles. Devant chacun d’entre eux, près d’une heure de marche avec un gyrophare lumineux bleu entre les mains. Perçant, un son discontinu de sirène les accompagne, rompant l’harmonie. Ce n’est que plus tard, lorsque les marcheurs se retrouveront en plein cœur de la ville que les sons alarmants des sirènes s’entremêleront pour produire à l’unisson L’Art de la Fugue. Posés à terre, les gyrophares orchestreront une œuvre inachevée de Bach jusqu’à l’épuisement des batteries.

La révolution, tel est le maître-mot qui résume la nouvelle performance de l’artiste Ekaterina Vasilyeva. L’idée n’est pas nouvelle dans sa carrière artistique. Un des exemples en mémoire, sa traversée de Moscou avec un tube géant pesant 13,5 kilogrammes et ce en août 2014, lorsque la guerre dans un pays voisin, l’Ukraine, bat son plein.

Crédit : Crédit: Alex Martinelli 

Cette fois-ci, c’est Paris qui est devenu le laboratoire artistique d’Ekaterina, dont la création « se développe à partir du contexte à la fois sociopolitique et topographique ». « Le point de départ pour cette performance c'était l'installation de l'état d'urgence en France suite aux attentats de novembre », explique l’artiste.

« Ce projet AUGENMUSIK, et dont le curateur est Azad Azifovich, propose une réponse poétique à l’actualité, faisant corps avec la topographie de la ville et l’expérience propre de ses habitants. Les symboles du pouvoir sont remis entre les mains d’un être singulier. Ils sont à l’échelle d’un individu ; la marche, la géographie et la composition sonore interpellent de façon palpable le corps urbain », explique Ekaterina.

Crédit : Crédit: Alex Martinelli 

Puis elle plonge sa réflexion dans une philosophie plus profonde : « Les marcheurs passent le seuil de la ville par ses portes, points d’accès historiquement stratégiques permettant de la contrôler. Platon chasse les poètes de la cité idéale. Ils arrivent alors par l’extérieur, du dehors, en empruntant des axes menant à la place du marché. Centre de la vie sociale et lieu de rassemblement où se pratique la démocratie directe de la polis grecque ».

Unis dans un seul et même élan, les marcheurs deviennent une sorte de pèlerins, quant au gyrophare, « détaché de son utilité première (…) il en vient à éclairer par sa couleur, le bleu royal, la vacuité du pouvoir ».

L'Art de la fugue, considéré comme le testament du grand musicien, est plus que symbolique…

Bio : Ekaterina Vasilyeva

Née à Moscou en 1983, vit et travaille à Paris.nnDiplômée de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, depuis 2012 (DNSAP)nnMaster 2 en Sciences Politiques depuis 2005, Université Nationale Lomonossov de MoscounnDernières expositions et performances en date en France :nnJanvier 2016, exposition Là où nous sommes. Regards d’artistes sur l’anthropocène, Paris, organisé par un collectif de  jeunes commissaires "Marcel"nnDécembre 2015, exposition "- 8/+2", commissaire Azad Asifovich, galerie Mansart , ParisnnSeptembre 2015, exposition "Stranger than Paradise", Curry Vavart - CP5, ParisnnMars 2015, performance Skype  in situ "Human Voice. Translations" à l’Église Saint-Eustache en hommage à la pièce de Jean Cocteau La voix Humainen

Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.

Ce site utilise des cookies. Cliquez ici pour en savoir plus.

Accepter les cookies