Crédit : Anna Kharzeeva
En réalité, les choses se corsent en essayant « de trouver un peu de viande » ; même aujourd'hui, trouver de la viande de bonne qualité, en particulier du bœuf, est tout sauf simple. On produit très peu de viande de bonne qualité en Russie, elle est généralement importée.
Pour autant que je sache, le problème s'est posé quand Staline s'est débarrassé de tout le cheptel de bœufs et qu'il a décidé d'utiliser les vaches laitières à la fois pour leur lait et leur viande, ce qui donne une viande vraiment coriace nécessitant souvent d'être attendrie. Parfois, même cuire la viande lentement est inutile, et ne parlons pas d'obtenir un morceau suffisant pour faire un steak.
Il y a sept épiceries à dix minutes à pied de mon domicile, mais je sais qu'aucune ne propose de la bonne viande. Enfin si, il y en a une qui vend un excellent bœuf d'importation mais elle coûte les yeux de la tête. Je préfère garder mes yeux, et heureusement pour moi, je préfère de toute façon la volaille.
Mais ce n'est rien comparé à ce que ma grand-mère me racontait sur l'achat de viande en URSS : « Les bouchers étaient les plus riches du pays. En connaître un était un énorme avantage. Les bouchers vendaient toute la viande à leurs connaissances avant même de la mettre en rayon – en fait, il ne restait plus que les os dans les magasins. La belle-mère de ma collègue tenait un magasin de fruits et légumes, et nous allions acheter de la viande chez elle. Cependant, même la gérante du magasin dépendait du bon vouloir du boucher, elle ne recevait pas forcément un beau morceau de viande. »
Crédit : service de presse
Ainsi, Monsieur et Madame Tout-le-monde ne pouvaient quasiment pas s'offrir un petit-déjeuner riche en glucides et en protéines. On se démenait pour trouver de la viande pour des occasions spéciales – comme quand je vais au meilleur marché de la ville acheter un gigot d'agneau – mais pas pour le petit-déjeuner quotidien.
Le poisson était moins cher, et il y avait du caviar rouge et noir, mais mon arrière-grand-mère ne pouvait pas s'acheter le poisson le plus cher et sûrement pas du caviar : c'était une mère célibataire qui avait perdu son mari en 39-45 et qui jonglait entre trois métiers, dont celui d'institutrice.
On dirait que le « petit-déjeuner soviétique idéal » était une idée aussi réaliste ou accessible que décrocher le premier rôle au Bolchoï après quelques cours de danse.
Ma grand-mère raconte qu'ils mangeaient beaucoup de porridge – mon grand-père raffolait du porridge de semoule avec de la confiture de cerises – beaucoup de pain (là encore avec de la confiture ou du salami), et parfois des œufs.
Je crois que moi aussi, je préfère ça à manger de la viande de bœuf coriace pour mon petit-déjeuner.
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