Crédit : Tatiana Chramtchenko
De Moscou à Kalouga, il faut trois heures en voiture. Sur le bord de la route, des arrêts de bus vétustes, repeint aux couleurs du drapeau russe, un château d’eau abandonné avec un arbre poussant au sommet, puis les villages Oziora et Karavaï. A en juger par leurs noms, le premier est connu pour ses grands lacs, le second pour son pain traditionnel russe appelé « karavaï ». Mais pas si simple d’expliquer d’où vient le nom du village qui accueille le festival de land-art et d’architecture Archstoyanie dans la région de Kalouga, le village de Nikola-Levinets (Nicolas-le-paresseux). Pour sa neuvième édition, le festival a nommé pour la première fois un commissaire d’exposition étranger, le Français Richard Castelli.
Woodstock à la russe
Ce n’est pas la première fois que M. Castelli se rend en Russie. Crédit : Tatiana Chramtchenko
Ce n’est pas la première fois que M. Castelli se rend en Russie. Dans les années 90, il a eu l’occasion de travailler dans le milieu théâtral moscovite. La proposition faite par les organisateurs d’Archstoyanie a été rapidement acceptée par le Français, qui s’est rendu dans la région de Kalouga. La nature ravissante de la province russe, parfois quelque peu envahie par les insectes, a immédiatement ravi le cœurdu Français, même si elle n’a pas été le facteur déterminant de sa venue.
« Le lieu en soi n’a pas beaucoup d’intérêt, affirme Castelli. S’il un même type de projet était organisé dans une autre partie de la Russie, j’irais aussi là bas. Ce qui est intéressant ici, c’est l’opportunité de faire ce type de projet ».
Archstoyanie est traditionnellement organisé en week-end, afin que les gens puissent se déplacer facilement et profiter de la nature le temps de quelques jours, tout en s’ouvrant à l’art et à la culture. Richard Castelli a tout de suite été emballé par le concept : « Pour exercer une activité créative entière, il faut un équilibre, souligne-t-il. Il faut mélanger le côté particulièrement actif de la ville à celui plus tranquille et réflexive de la vie provinciale ».
« Pour moi ce festival ressemble à Woodstock, le concert de rock, confie le commissaire. Les gens arrivent comme des sauterelles dans un lieu, puis, quelque chose se passe, ça buzze et enfin le dimanche, tout le monde part ».
Le Temps c’est l’essentiel
Mark Formanek a représenté le temps à l’aide d’une horloge numérique. Crédit : Tatiana Chramtchenko
Pour Richard Castelli, la question du thème ne s’est même pas posée. Il a tout de suite su que ce serait Le Temps.
« J’ai regardé ce qui avait été fait avant. Ce qui m’a frappé, c’est qu’il n’y avait eu aucun projet sur le temps, a-t-il expliqué à RBTH. Pour moi c’est une chose essentielle. Bien sûr, qu’il y a l’espace, mais il y a aussi le temps. Tout est relatif au temps. La dégradation des bâtiments c’est aussi le temps ».
Dans cette optique, Castelli a choisi les participants du programme principal : l’Allemand Mark Formanek et son projet « Les montres de Nikola-Lenivets » (Nikola-Lenivets Time), la Japonaise Sachiko Abe et sa performance « Ciseaux et papier » (Cut papers), et l’artiste russe Aleksander Alef Wiseman et son installation « Fonts baptismaux » (Fonte). Chacun d’eux a ainsi pu exprimer sa propre vision du temps.
Pour Sachiko Abe le temps c'est la possibilité de méditer. Crédit : Tatiana Chramtchenko
Mark Formanek a représenté le temps à l’aide d’une horloge numérique construite à partir de poutres en bois réparties au milieu du champ. Chaque minute, des employés de Nikola-Levinets juchés sur un escabeau poussent les aiguilles de poutre, en accord avec le temps réel.
La Japonaise Sachiko Abe représente le temps différemment. Elle y voit la possibilité de méditer. Dans une feuille blanche de papier, sans se presser, elle découpe à l’aide d’une paire de ciseaux une spirale longue et fine. Petit à petit, la spirale occupe tout l’espace où se trouve l’artiste, créant un nuage de papier blanc autour d’elle.
Aleksander Alef Wiseman conjugue dans son installation les notions de temps et d’espace. Il arrive à créer un portail spatial, grâce à la lumière et à des miroirs disposés dans un petit pavillon plongé dans l’obscurité, où l’on peut observer des couloirs s’étendant à l’infini, sans pour autant voir son reflet dans le miroir. Des expériences similaires ont été menées par le réalisateur américain Busby Berkely, dont Richard Castelli se dit un fervent admirateur
Aleksander Alef Wiseman créé un portail spatial grâce à la lumière et à des miroirs. Crédit : Tatiana Chramtchenko
Mission accomplie
Enivrés du soleil de juillet et de l’odeur des fleurs des champs, les curieux d’Archstoyanie se promènent de site en site. Ici, il peuvent prendre le temps d’observer des œuvres sur le temps, sans toutefois perdre leur temps. Richard Castelli aime cette idée : « J’espère qu’ils sont contents », sourit-il, ravi. Sa mission est accomplie.
« J’arrive à Archstoyanie pour proposer des choses qui n’auraient pas été mises en place ici si je n’avais pas été là pour être utile, fait observer le commissaire de l’exposition. Je ne peux pas rester ici pendant dix ans, ça n’a pas de sens. Maintenant c’est au directeur actuel et aux artistes qui sont ici de faire le travail sur la localité ».
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