Le père d’Aznavour, un Arménien, portait le prénom russe de Micha. Lui et sa famille quittèrent la Russie, en proie à une guerre civile, pour la France en 1922. Ils devaient partir aux Etats-Unis, mais s’attardèrent à Paris et décidèrent que cette ville était faite pour eux. A la naissance de leur fils, le futur chansonnier, les Aznavour ouvrirent un petit restaurant au 3, rue Champollion. Le restaurant s’appelait « Le Caucase », mais la cuisine et la musique étaient plutôt russes. « Le Caucase » accueillait souvent des émigrés russes, on y entendait parler la langue de Pouchkine.
Dans un entretien avec le quotidien new-yorkais Russian Bazaar, Aznavour raconte : « Mes parents parlaient le russe et connaissaient de nombreux Russes à Paris. Je sais comment me tenir quand je suis en Russie. Je connais quelques gros mots et quelques bons mots… Je sais quoi dire quand j’arrive dans un hôtel ou un restaurant. Si je me perds dans la rue, je sais me faire comprendre. Mais je ne sais pas construire des phrases… »
Des troupes de théâtre et de ballet russes venaient souvent en France. Aznavour assistait volontiers aux spectacles. Il a même étudié le ballet, notamment les danses russes. « C’est un très bon exercice pour un artiste, raconta-t-il plus tard. Le ballet aide à apprendre à se tenir sur scène ».
Avec des liens si profonds avec la Russie, il n’est pas étonnant qu’Aznavour ait donné à ses trois enfants par des prénoms russes : Micha, Katia et Nicolas (le russe Nikolaï est difficile à prononcer pour les Français, explique Aznavour). L’aîné Micha a encore renforcé les liens familiaux avec la Russie. Il est tombé amoureux d’une jeune femme russe, Nastia, et s’est installé avec elle à Moscou. Plus tard, ce dernier a raconté cette histoire dans son livre, écrit en russe, Paris, Moscou, Amour…. « Peut-être, un jour, dit-il au magazine Elita Obchestva, je publierai mes poèmes en russe, et, les chanterai éventuellement en musique, comme mon père ».
« Je me rappelle bien de mon grand-père, se souvient-il, qui à la question « Es-tu Arménien? » répondait toujours : « Non, je suis un Géorgien russe ». C’est comme ça que j’ai toujours considéré notre famille et moi-même. Nous sommes russes ».
Charles Aznavour est aimé du public russe depuis longtemps, et cet amour ne fait que croître. A l’époque soviétique déjà, on copiait ses chansons sur des cassettes, on offrait ses disques aux proches pour leurs anniversaires. En 2007, quand Aznavour est venu en tournée à Moscou, le prix des billets pouvait atteindre 35 000 roubles (1 000 euros à l'époque).
Il a terminé cette tournée avec la chanson Une vie d'amour. Il a chanté une partie de la chanson en français, et l’autre partie en russe : « Жить, любя одну тебя — навсегда…» (Mon amour, t'aimer encore et toujours, traduit par Natalia Kontchalovskaïa).
Cette chanson est le hit du célèbre thriller d’espionnage franco-hispano-helvético-soviétique Téhéran-43. L’un des rôles y est joué par Alain Delon.
C’est la guerre. On est en 1943. Staline, Churchill et Roosevelt se rendent à la conférence de Téhéran afin de décider le sort du monde. Les services secrets allemands préparent un attentat contre eux. Des navires explosent, des bombes tombent et puis arrive cette musique magique :
Source : YouTube de male10paradise
Lire aussi : Disparition de Charles Aznavour: l’ambassade de France à Moscou ouvre un livre de condoléances
Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.
Abonnez-vous
gratuitement à notre newsletter!
Recevez le meilleur de nos publications directement dans votre messagerie.