De Mondrian à IKEA

En dépit de l’intérêt que suscitent ses œuvres tardives, largement diffusées, le principal intérêt de l’exposition réside ailleurs. Crédit : Itar-Tass

En dépit de l’intérêt que suscitent ses œuvres tardives, largement diffusées, le principal intérêt de l’exposition réside ailleurs. Crédit : Itar-Tass

La galerie d'État Tretiakov à Krimski val accueille l’exposition intitulée « Piet Mondrian, le chemin de l’abstraction ». Le projet, organisé dans le cadre de l’année croisée Russie – Pays-Bas, présente 37 tableaux de l’un des artistes les plus influents du XXe siècle provenant de la collection du musée municipal de La Haye (Gemeentemuseum Den Haag).

« Nous possédons la plus grande collection d’œuvres de Mondrian, explique Benno Tempel, directeur du musée de La Haye. Récemment, nous avons organisé un grand projet avec le Centre Georges Pompidou ainsi qu’un autre avec le musée Lenbachhaus à Munich. Mais l’exposition à la galerie Tretiakov va plus loin, ici Mondrian entre en dialogue avec les deux autres pères de l’avant-garde, Vassili Kandinsky et Kazimir Malevitch, en exposition permanente à la galerie. Ces artistes ont modifié à la fois l’art moderne et la perception de celui-ci ».

La période tardive du peintre hollandais exerça une influence majeure sur l’art contemporain. Toutefois, les toiles les plus reconnaissables de Mondrian sont rares à l’exposition. Quatre tableaux des années 1920-30 avec des lignes perpendiculaires traditionnelles et des plans de couleur viennent clore l’exposition. L’une des œuvres, Composition à quatre lignes jaunes, est doublée par une photographie agrandie du peintre qui semble expliquer sa toile. En effet, à côté de son art, Mondrian nous a laissé son héritage théorique. Ses recherches en néoplasticisme – c’est ainsi que le peintre qualifiait son univers pictural - sont formulées dans un exposé du même nom. « Se désintéresser de la forme et de la couleur, c’est le néoplasticisme, écrit Mondrian. Ne s’intéresser qu’aux rapports, à leur création, à la recherche de l’harmonie dans l’art et dans la vie ».

En dépit de l’intérêt que suscitent ses œuvres tardives, largement diffusées, le principal intérêt de l’exposition réside ailleurs. Les organisateurs ont voulu montrer les différentes étapes de la formation et de l’évolution artistique du peintre ; cette approche semble ravir le public. Anna, l’une des visiteuses de l’exposition décrit son impression : « Le plus inattendu pour moi est bien le fait que tout le chemin parcouru par l’artiste soit montré. On comprend que ce grand expérimentateur, en cherchant sa voie, a testé différents courants, avant de se trouver et de devenir celui que nous connaissons ».

L’exposition commence par des paysages des années 1890-1900, les années de ses débuts, qui permettent de ressentir à quel point Mondrian prend ses racines dans l’art hollandais classique avec sa tradition réaliste. Mais ces œuvres reflètent déjà une caractéristique importante de l’artiste, les rapports indispensables entre les lignes horizontales (des plans d’eau ou des bordures de la forêt) et les lignes verticales (arbres, moulins), dans l’espace pictural. Mondrian explorera ce motif tout le long de sa vie.

Plus tard, Mondrian expérimentera avec les principaux « ismes » du XXe siècle. L’exposition montre son clin d’œil à l’impressionnisme, par exemple, le Phare à Westkapelle en rose, au pointillisme (Maison ensoleillée, Eglise à Dombourg), à l’expressionnisme (la Dévotion, le Portrait d’une jeune femme, le Moulin rouge). Mais le courant principal, celui qui lui permit de passer à l’abstraction, est le cubisme. Il put voir les toiles de Picasso et de Braque à l’exposition à Amsterdam en 1911, qui l’impressionna grandement et fut à l’origine de sa série parisienne d’œuvres cubistes, exposées à la galerie Tretiakov. « Certaines de ces toiles me rappellent les motifs décoratifs du textile et de la vaisselle IKEA, note l’un des visiteurs de l’exposition, Mikhaïl. Maintenant, je comprends d’où vient le design contemporain. C’est fascinant comment les idées d’un génie trouvent leur chemin dans la vie quotidienne d’une personne lambda ».

Deux autres toiles inattendues sont présentées à l’exposition. Il s’agit de la Piété qui montre toute la maestria de Mondrian en tant que peintre classique. Et son autoportrait datant de 1918, soit la période où le peintre rejoint l’abstraction. L’un des génies du XXe siècle nous regarde de cette toile presque monochrome. L’homme dont l’art a influencé les peintres, mais aussi les designers, les architectes, les polygraphes. Le maitre qui, ironie du sort, n’est présent dans aucune collection russe.

L’exposition est ouverte jusqu’à fin novembre.

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