La collection d’art de Catherine la Grande part en Grande-Bretagne

Des chambres entières de ces peintures, incluant des œuvres de Rembrandt, Rubens, Poussin, Velázquez et Veronese sont revenues à leur ancienne maison, Houghton Hall (sur la photo). Crédit : Phoebe Taplin

Des chambres entières de ces peintures, incluant des œuvres de Rembrandt, Rubens, Poussin, Velázquez et Veronese sont revenues à leur ancienne maison, Houghton Hall (sur la photo). Crédit : Phoebe Taplin

Plus de 70 tableaux vendus à Catherine la Grande au XVIIIe siècle par la famille du Premier ministre britannique Sir Robert Walpole sont de retour à l’exposition dans le Royaume-Uni, et cela grâce au musée d’Etat de l’Ermitage qui a prêté la collection pour une exposition qui durera tout cet été.

Catherine qui présida sur un âge doré de la culture russe commença la collection d’art qui devint ensuite le musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg en 1764. En 1779, elle acheta plus de 200 tableaux d’Angleterre qui constituent le cœur de la galerie aujourd’hui mondialement connue.

L’historien de l’art Vladimir Levinson-Lessing auteur des Chefs d’œuvres de l’Ermitage a décrit l’achat comme « l’un des grands événements de la vie de l’Ermitage ». 

Des chambres entières de ces peintures, incluant des œuvres de Rembrandt, Rubens, Poussin, Velázquez et Veronese sont revenues à leur ancienne maison, Houghton Hall dans la campagne profonde à 140 kilomètres au nord-est de Londres.

Le Premier ministre britannique, Sir Robert Walpole, assembla cette collection de chefs d’œuvres européens au début du XVIIIe siècle avant que son petit fils ne perde au jeu la fortune familiale et qu’il soit contraint de les vendre. James Christie, fondateur de la maison d’enchères Christie, s’occupa de la vente pour Catherine la Grande et la commande voyagea sur la frégate Natalia à travers les mers agitées vers Saint-Pétersbourg.

Retour au XVIIIe siècle 

Dans la maison de Houghton Hall. Crédit : Phoebe Taplin

Le conservateur Thierry Morel a travaillé sur la nouvelle exposition, « Houghton revisité » pendant trois ans. Dans un entretien à La Russie d’Aujourd’hui, il s’est souvenu du moment à la fin 2010 où l’Ermitage a accepté pour la première fois de prêter quelques tableaux et les mois de persuasion qui suivirent pour culminer dans cette incroyable recréation.

Il décrit Houghton Hall, dont les intérieurs ont été dessinés par William Kent spécifiquement pour accueillir la collection de Walpole, comme « une maison vivante, et non pas un abri restauré à l’excès et ayant perdu son âme… c’est comme si vous aviez voyagé dans le temps jusqu’au XVIIIe siècle et que vous entriez dans la maison de Robert Walpole avec ses trésors »

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Des kilomètres de parcs avec des daims, des chênes, des hêtres, des châtaigniers, une allée de tilleul avec un cadran solaire et des vues immaculées entourent le palais palladien à Houghton. Des documents remis à la lumière montrent précisément l'endroit où chaque peinture était originalement accrochée dans les intérieurs de Kent qui sont restés remarquablement intacts, plein de soie brochée, de tapisseries artistiques et de chandeliers dorés. 

L’exposition a réuni l’art et l’architecture construite pour l’abriter, produisant ainsi de splendides résultats comme celui de rassembler les cadres et les peintures à nouveau pour la première fois depuis deux siècles et demi.

Un portrait du sculpteur Grinling Gibbons est maintenant accroché dans une couronne en bois que l’on pense avoir été faite de sa main.

Les vignes qui forment un motif décoratif récurrent dans le splendide Marble Parlour, sont en écho dans la Nature morte avec les Raisin qui est maintenant au dessus de la porte et, comme Kent le prévoyait, des pilastres blancs et d’or bordent deux portraits élégants de Van Dyck qui se font face à travers la pièce.

Une collection de niveau mondial 

La Chambre Carlo Maratta. Crédit : Phoebe Taplin

Quelques œuvres d’art, transférées ou vendues de l’Ermitage, ont été localisées dans des collections privées et publiques autour du monde, incluant la National Gallery de Washington DC et le Metropolitan Museum de New York.

Le Jugement de Paris de Carlo Maratta sert habituellement de panneau de plafond au dessus de la cage d’escalier dans le palais musée de Tsarskoye, Selo et Morel se souvient que le directeur lui avait dit au début qu’il ne le quitterait jamais.

La Chambre Carlo Maratta, où il est maintenant accroché, est, selon Morel, « la seule chambre au monde consacrée à l’artiste » qui était très à la mode dans la Rome du XVIIe siècle. 

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M. Morel voit des parallèles entre les deux propriétaires originaux de la collection : « De nombreuses personnes étaient plus riches à cette époque, mais Walpole choisit de dépenser son argent sur ce qu’il y avait de mieux et c’est aussi vrai de l’architecture… et des peintures. Quelques années plus tard, Catherine la Grande eut les mêmes ambitions, le même goût et l’intelligence. Elle créa l’un des plus belles collections d’art au monde. Ce qui a été créé en Russie était incroyable… L’exposition devrait encourager le public à aller à Saint-Pétersbourg pour voir ces trésors où ils appartiennent habituellement ». 

Une collaboration formidable 

Les tapisseries dans la maison de Houghton Hall. Crédit : Phoebe Taplin

Mikhaïl Piotrovsky, directeur du Musée d’État de l’Ermitage, a décrit « Houghton revisité » comme une « installation plus que comme une exposition », et comme un exemple d’une collaboration formidable entre la Russie et le Royaume-Uni.

« Dans le monde entier, on se poursuit en justice pour la possession de peintures, alors les gens ont vraiment peur de prêter des tableaux, a-t-il déclaré, mais dans ce cas, les bureaucrates, les diplomates et les employés du musée ont réussi à trouver une solution et à travailler ensemble »

Assurer la collection s’est révélé si difficile que le gouvernement britannique a dû intervenir et se porter garant. Pour plaisanter, le ministre de la Culture Ed Vaizey s’est présenté au diner d’ouverture comme un « agent d’assurance ».

David, septième Marquis de Cholmondeley, descendant de Walpole et propriétaire actuel de Houghton Hall, a déclaré qu’il était « impressionné » que l’exposition ait réellement lieu.

Quand M. Morel a suggéré l’idée pour la première fois il y a trois ans, il avait dit : « Je ne peux pas imaginer que l’Ermitage prête des tableaux à une maison privée dans la nature du Norfolk, mais nous pouvons toujours essayer ».

À la grande surprise de Lord Cholmondeley, « nous avons reçu un soutien immédiat de Mikhaïl Piotrovski et c’est vraiment grâce à lui et à ses merveilleux conservateurs que nous sommes ici aujourd’hui ».

L’exposition est de très bon augure pour l’année de la Culture entre la Russie et le Royaume-Uni de 2014. M. Piotrovski a déclaré à La Russie d’Aujourd’hui : « La Grande-Bretagne et la Russie ont démontré de la bonne volonté pour résoudre certains des problèmes les plus compliqués du monde de l’art ».

Il a expliqué qu’il avait visité Houghton Hall il y a 10 ans, « alors je savais de quoi nous parlions : nous avons mené des négociations, pas à pas, et avons obtenu les papiers qui nous ont permis de nous rassurer ». Le mécénat d’entreprise a réduit les coûts de transport et d’installation, mais l’Ermitage n’a pas été payé pour le prêt des tableaux, participant dans un esprit de « bonne volonté et d’échange culturel ».

« Houghton Revisité » est ouvert au public à Houghton Hall, King’s Lynn, Norfolk, jusqu’au 29 septembre 2013. Pour les billets et d’autres informations, allez sur www.houghtonrevisited.com

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