Dans la correspondance professionnelle, en Russie, il est de coutume de s’adresser à son interlocuteur en utilisant son nom et son patronyme. Crédit : CNDD
Quand Tania Brahmann, cadre dans une société internationale de systèmes de communication en entreprise, a évoqué à son interlocuteur russe l’éventualité de passer au « tu », elle s’est vue refuser cette « familiarité ». Un cas caractéristique de ce gouffre qui sépare le modèle de communication en entreprise européen et russe.
Par quoi commencer ?
Dans la correspondance professionnelle, en Russie, il est de coutume de s’adresser à son interlocuteur en utilisant son nom et son patronyme. Pour accentuer le respect, il faut ajouter « Ouvajaemy (aïa) » (Respecté(e)). Ce qui nous donne approximativement : « Très respecté Ivan Nikolaevitch ».
Il est possible également d’ajouter le terme « Gospodine ou gospoja » (Monsieur et madame): « Très respecté monsieur Nikolaev »
« Si vous écrivez à un collègue de service ou à un supérieur, mieux vaut ne pas oublier le patronyme », confirme Jessie Loeb, un Américain travaillant à Moscou.
Vous, vous ou tu ?
Faites toujours attention à votre « vous ». Le « vous » avec une minuscule s’employe pour s’adresser à plusieurs personnes et le « Vous » avec majuscule comme marque de politesse, pour le vouvoiement.
Mais cette règle a tendance à être délaissée, surtout dans les milieux créatifs.
« Je ne supporte pas le vouvoiement dans les mails. Les attachés de presse adorent l’utiliser. C’est tellement guindé ! le « Vous » avec la majuscule. Le vouvoiement simple est déjà une marque de politesse », s’indigne Olga Frolova.
« Cette règle m’a toujours rendu fou. Majuscule ou minuscule, je me casse encore parfois la tête. En anglais, la différence est évidente et puis dans la correspondance informelle, on n’utilise quasiment pas de majuscules », explique Loeb.
Les spécialistes, eux, conseillent d’écrire « Vous » au début et si l’interlocuteur répond par un « vous », alors passez à la minuscule.
Le passage au tutoiement est moins évident. Les étrangers mettent cette particularité sur le compte de règles hiérarchiques plus strictes.
« En Allemagne, tout est plus simple. Si le boss vous tutoie, vous aussi. En Russie, il est toujours de coutume de respecter l’ordre hiérarchique et le rapport de force », explique Brahmann.
Dans certains cas, le tutoiement par ses supérieurs peut être vu comme une marque de reconnaissance de son travail et l’acceptation par l’équipe.
Lire entre les lignes
Ivaïlo Hetsov vient du Bulgarie, directeur des transports dans une grosse société de logistique, il remarque que les Russes aiment les phrases longues et ont du mal à aller droit au but. « Ils en viennent à l’essentiel que vers le moment de signer le contrat ».
Selon Sergueï Kouzine, coach et conseiller d’entreprise chez Oratorika et expert international en communication d’entreprise, c’est propre à la culture russe.
Si en Occident, c’est le contexte « bas » qui prime, le contenu est plus important, en Russie c’est le contexte « haut » qui domine, l’accent porte sur la forme, les tournures et il est nécessaire d’apprendre à lire entre les lignes.
« Selon mon expérience, les étrangers mettent 2-3 ans à s’adapter aux particularités de travail en Russie », souligne Kouzine.
Et pour terminer en beauté...
Les formules de politesse sont le plus souvent : « S ouvajeniem » (Avec tout mon respect), « S nailoutchemi pojelaniami » (Avec mes souhaits les meilleurs), « Iskrenni vach » (Sincèrement votre).
Certains usent même d’expressions désuètes et non dénuées d’humour comme « Je vous tire ma révérence » et vont même parfois jusqu’à évoquer le baise-main en s’adressant au sexe faible.
« Cela est propre aux personnes âgées ou aux professions artistiques. Dans le premier cas, cela donne une teinte de sentimentalisme, dans le second, un côté original », affirme Frolova.
Toutefois, il n’est pas conseillé d’en abuser. A proscrire dans le domaine de la finance, assure Jessie Loeb.
Judith Callos, spécialiste de la communication électronique et auteur du projet web NetManners.com, affirme qu’il faut faire attention avec ce genre de formule : « Dans les affaires, le but est de donner l’impression de quelqu’un de cultivé, professionnel. En employant le jargon ou des expressions tirées par les cheveux, vous risquez d’obtenir l’effet inverse. »
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