« Circuits pétroliers », ou comment mieux connaître l’économie russe

Le tourisme pétrolier existe depuis longtemps à l’étranger. Crédit : Strana.ru

Le tourisme pétrolier existe depuis longtemps à l’étranger. Crédit : Strana.ru

Dans la région autonome de Khanty-Mansiïsk, qui abrite de riches gisements de pétrole, les « oil-tours » ont de plus en plus de succès. Ces excursions pétrolières sont organisées à Sourgout, Nijnevartovsk, Nefteïougansk et Khanty-Mansiïsk.

Les programmes comprennent la visite d’installations pétrolières de grandes compagnies russes, en particulier Sourgouneftegaz, Rosneft et Lukoil. Ils permettent de voir les machines de forage, mais aussi de suivre un petit cours à l’école du personnel de forage, où les touristes apprennent le fonctionnement du secteur, l’ensemble du processus d’extraction de l’« or noir » et l’histoire de la conquête de la Sibérie. À la fin de cette « formation », les visiteurs reçoivent la possibilité d’actionner le dispositif de pompage ou d’appuyer sur l’interrupteur. Les participants au circuit peuvent également faire un tour dans les ateliers, manger un « repas de pétrolier » improvisé, mais aussi repartir avec des souvenirs thématiques, comme une bouteille de véritable « or noir » par exemple.

Khanty-Mansiïsk. Neige à perte de vue en cette nuit noire du Nord. Une magnifique torche de gaz déchire la noirceur avec sa flamme.

« Sais-tu de quelle couleur est Iougra de l’espace ? Rouge ! », expliquent les journalistes locaux. « Toute rouge. Ce sont les flambeaux brûlant en permanence qui l’éclairent.Ils ont déjà brûlé toute l’atmosphère... ».

Khanty-Mansiïsk compte des centaines de ces torches. Elles s’allument grâce au gaz naturel arrivant avec le pétrole. On applique ainsi le principe de la plaque de cuisson : pour éviter que le gaz ne s’accumule et explose, il faut qu’il brûle. On pourrait vendre ce gaz, mais son extraction et son nettoyage coûtent trop cher. C’est ainsi que de l’argent potentiel au sens propre du terme part en fumée. Spectaculairement et majestueusement.

École de pétroliers

C'est à Iougra que le tourisme pétrolier a été lancé en 1999. Crédit : Strana.ru

À Nijnevartovsk, le terrain de l’école du personnel de forage de TNK-BP dispose de presque tout : une gigantesque installation de forage de mille tonnes, différentes machines de pompages comme des pompes à balancier, des oléoducs, etc. Tous les mécanismes qui y sont présentés peuvent être « mis en marche » et observés.

« Le forage d’un puits dure de deux semaines à un an, en fonction de la profondeur du gisement de pétrole ou d’autres facteurs. Chez nous à Iougra, la profondeur est de 2,5 kilomètres. Afin d’éviter de creuser plusieurs puits et de déplacer tous les équipements à chaque fois, on fore souvent en inclinaison », décris brièvement un employé de l’école.

L’école elle-même n’est pas une destination touristique. Il s’agit d’un véritable institut destiné aux futurs et actuels pétroliers. Certains y découvrent les rudiments de la profession, d’autres perfectionnent leurs qualifications. C’est l’endroit idéal pour les tâches pratiques, avec notamment un laboratoire pour les chimistes. On n’arrive pas là par hasard. La région autonome de Khanty-Mansiïsk a toutefois commencé à développer un tourisme pétrolier exotique, toutes les installations pouvant être visitées dans le cadre d’une excursion spéciale.

« Ce type de tourisme existe depuis longtemps à l’étranger. À Iougra, nous sommes les premiers à avoir lancé le tourisme pétrolier dès 1999. Aujourd’hui, le circuit dure une demi-journée. On conduit les touristes vers l’école du personnel, avant de se rendre au gisement de Samotlor, où nous visitons un des laboratoires. Là, on montre comment on sépare le pétrole de l’eau », explique Vassili Sotchiline, directeur adjoint d’une grande société de tourisme de Nijnevartovsk. Son entreprise est actuellement la seule dans le pays prête à ouvrir le secteur pétrolier, très fermé, à la population.

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« Pour visiter un tel laboratoire, il faut réserver l’excursion au minimum un mois à l’avance », poursuit Vassili. « Et ce n’est pas un guide qui la mène, mais un vrai professionnel du domaine. Il décrit les citernes, ainsi que les différentes étapes et processus, tels que la séparation du pétrole de l’eau, la purification du pétrole, etc. On amène ensuite les touristes dans un laboratoire chimique. Il est normalement très compliqué d’accéder à un tel endroit. Après l’excursion, nous mangeons dans une cantine de la zone industrielle de Nijnevartovsk. Elle est ordinaire, mais c’est là que mangent les vrais pétroliers. Ainsi, non seulement les touristes y mangent bien, mais ils peuvent en plus discuter avec ceux qui récoltent quelques millions de tonnes de pétrole par an. Nous n’offrons, il est vrai, pas de bouteilles de pétrole, mais il est possible d’en acheter au magasin de souvenirs en ville… ».

Planète Samotlor

La pompe de ptrole par Rosneft. Crédit : Itar-Tass

Du ciel, le lac Samotlor fait penser à un cœur humain entrelacé de vallées. Ces dernières sont artificielles : il s’agit de barrages composés de routes de remblai et de « buissons ».

« Les buissons sont d’ailleurs un trait caractéristique des gisements de Iourga. La zone est couverte de marécages qu’il est impossible de forer. C’est pourquoi ils sont d’abord asséchés avant d’être recouverts de sable, pour former ce qu’on appelle les « buissons ». Ces derniers sont partout et comprennent des panneaux de signalisation plus grands que dans les zones habitées », indique Vassili Sotchiline, dont les mots sont parfois étouffés par les coups de vent glaciaux.

Nous nous trouvons devant le principal monument historique du lac : le premier puits. Les installations de forage de l’époque, très petites par rapport à celles d’aujourd’hui, rappellent un peu l’ouverture en 1965 d’un des plus grands gisements pétroliers au monde.

Pour un habitant du « continent », nom donné par les pétroliers à la partie européenne de la Russie, cette information reste une « anecdote amusante » tant qu’on n’a pas vu de ses propres yeux comment la bouillie noire se transforme en « or noir » et quel travail est nécessaire pour extraire ces pétrodollars inodores.

Les rues artificielles de Samotlor grouillent de camions, autour desquels les bascules bougent en rythme, les torches de gaz brûlent et les cheminées fument.

Contexte

En 1965, une fontaine de pétrole a transpercé la surface de la région du lac Samotlor. Cet évènement marqua le début d’une nouvelle histoire soviétique, celle De Iougra, en Sibérie occidentale. Certains pays renferment plus de pétrole, mais la Russie occupe pour le moment la première place au monde en termes d’extraction. 57% de l’or noir russe vient de Iougra. À l’échelle internationale, cela représente 7% du pétrole extrait.

Selon les tour-opérateurs locaux, l’intérêt envers de telles excursions a augmenté de plus de 20 fois en 10 ans. Le prix moyen d’un « trip pétrolier » tourne aux alentours de mille roubles (24,64 euros) par personne, alors que les excursions de deux jours coûtent un peu plus cher.

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