L’OSCE hausse le ton contre la Russie

Vote de l'Assamblée parlementaire de l'OSCE le 8 juillet 2015, à Helsinki.

Vote de l'Assamblée parlementaire de l'OSCE le 8 juillet 2015, à Helsinki.

OSCE
L’Assemblée parlementaire de l’OSCE a adopté une résolution antirusse reconnaissant pour la première fois la présence de forces russes dans les régions orientales de l’Ukraine. Le vote de cette résolution au ton « sévère » s’est tenu en l’absence de la délégation de Russie. Le changement de rhétorique n’est pas inattendu, reconnaissent les interlocuteurs de RBTH, qui estiment pourtant que l’affaire n’aura pas de conséquences fâcheuses.

L’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a adopté le 8 juillet à Helsinki une résolution condamnant la Russie pour son « agression » en Ukraine. Le ton du document est reconnu « d’une sévérité sans précédent ». En effet, l’OSCE n’avait jusqu’ici jamais confirmé la présence des forces armées russes dans les régions orientales de l’Ukraine. Cette fois-ci, non seulement l’Assemblée parlementaire affirme la présence de militaires russes dans la zone du conflit, mais elle exige en outre de cesser toute aide aux « groupes armés illégaux » dans « les régions ukrainiennes de Donetsk et de Lougansk », notamment par le biais de « convois dits humanitaires ».

En outre, la résolution évoque une « occupation illégale de la Crimée », où, selon les députés, la situation dans le domaine des droits de l’homme s’est dégradée. Elle affirme également qu’en raison de « l’agression russe », l’Ukraine peine à palper les résultats positifs de ses réformes.

La délégation russe étant absente à la session, elle ne pouvait exercer aucune influence sur le projet de résolution. Le 1er juillet, la Finlande a refusé l’entrée du pays au président de la Douma (chambre basse du parlement russe), Sergueï Narychkine, et à plusieurs députés sanctionnés par l’Union européenne. Le même jour, tous les membres de la délégation russe ont décidé de boycotter la session. Le député Nikolaï Kovaliov a déclaré que Moscou considérerait les décisions de l’actuelle Assemblée comme « illégitimes ». « Telle sera notre attitude envers ces résolutions qui, juridiquement, sont insignifiantes », a-t-il souligné.

Une plateforme constructive

La rédaction finale de la résolution, élaborée par les délégations ukrainienne et canadienne, a été votée par 96 membres de la session. 7 ont voté contre et 32 autres se sont abstenus. Compte tenu de l’absence de la délégation russe, la France, la Suisse, l’Italie et l’Arménie ont refusé de voter.

« Désormais, alors que nous sommes absents, l’Assemblée parlementaire de l’OSCE a cédé à la tentation de faire de la propagande au lieu de déployer un travail concret », a indiqué le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov. « Que pouvons-nous commenter si nous étions absents », a dit de son côté Alexeï Pouchkov, président de la commission des affaires internationales de la Douma, dans une interview au journal Kommersant. Le quotidien rappelle qu’Alexeï Pouchkov a qualifié précédemment l’Assemblée parlementaire de l’OSCE de plateforme de débats entre la Russie et l’Occident la plus constructive.

Toujours est-il que les contacts sont encore possibles et que l’Assemblée parlementaire reste « l’aire de dialogue  la plus constructive», a déclaré à RBTH Leonid Sloutski, président de la commission de la Douma pour les affaires de la CEI (Communauté des Etats indépendants), l’intégration eurasienne et les relations avec les russophones. Il a ajouté que le ton sec de la résolution n’était pas « inattendu en l’absence des délégués russes ».

« Un drapeau de plus »

 Les experts ne doutaient pas non plus de la sévérité de la résolution. « Celle-ci a été élaborée par l’Ukraine et le Canada. En ce qui concerne l’Ukraine, sa position est évidente. Côté canadien, il s’avère que le pouvoir exécutif actuel du pays s’appuie dans une grande mesure sur les voix des Canadiens d’origine ukrainienne. Or, des élections législatives se tiendront dans le pays à l’automne prochain et pour ne pas perdre de voix, le Canada occupe ces derniers temps une position inflexible vis-à-vis de la Russie », explique le directeur de l’Institut international des études humanitaires et politiques, Viatcheslav Igrounov. Toutefois, fait-il remarquer, si la Russie avait été présente à la réunion, le document aurait pu être plus souple. « Les États-Unis et leurs satellites détiennent le bloc de contrôle des voix à l’Assemblée parlementaire de l’OSCE. Rien de plus. Outre les vingt-huit pays de l’UE, il y a la Turquie, la Norvège, le Canada, les États-Unis, l’Azerbaïdjan qui, pour des raisons compréhensibles, soutiennent toute résolution défendant l’intégrité territoriale, ainsi que d’autres pays », a indiqué à RBTH Timofeï Bordatchov, directeur du Centre des études européennes et internationales de la Haute école d'économie. Selon lui, c’est la réaction au refus de Moscou de faire des concessions en réponse aux « ultimatums lancés ces derniers temps ».

Il serait pourtant tout aussi erroné de qualifier la résolution de « radicale », même comparée aux déclarations précédentes des différentes structures de l’OSCE, a fait observer Andreï Kortounov, directeur général du Conseil des affaires étrangères de Russie. De son côté, la mission spéciale d’observation de l’OSCE n’a jamais confirmé la présence de forces armées russes en Ukraine et le secrétaire général de l’OSCE, Lamberto Zannier, a dit qu’il était « difficile de l’attester » et que lui-même « ne les avait jamais vues ». « Il faut faire la différence entre les organismes de l’OSCE. L’Assemblée parlementaire a toujours occupé une ligne plus dure que les autres structures de l’organisation », a-t-il souligné à RBTH.

Selon lui, ce n’est rien d’autre qu’une déclaration politique, un message pouvant être adressé à Moscou, à Kiev et aux forces au sein de l’UE qui ne partagent pas la position dominante à l’Assemblée parlementaire. « Les Américains se voient remettre un drapeau de plus à brandir. Aucune autre conséquence pour la Russie  ne découlera de cette résolution », a affirmé Timofeï Bordatchov. L’Assemblée n’est pas en droit de décréter des sanctions, a rappelé Viatcheslav Igrounov. D’après lui, la résolution antirusse ne débouchera pas sur des mesures concrètes de gouvernements ou des démarches d’États. « Il ne faut s’attendre qu’à une intensification provisoire de la propagande antirusse », a-t-il noté.

 

 

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