Le président russe Vladimir Poutine reçoit le secrétaire d'État américain, John Kerry, au Kremlin.
ReutersLa visite de travail du secrétaire d'État américain John Kerry à Moscou, le mardi 15 décembre, s’est achevée par des négociations de trois heures avec le président Vladimir Poutine et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
L’ordre du jour de cette rencontre comportait trois points : la résorption de la crise syrienne, l’application des accords de Minsk sur l’Ukraine et les relations bilatérales entre la Russie et les États-Unis. Les négociations ont été « substantielles et concrètes », a déclaré Sergueï Lavrov à la conférence de presse qui a suivi l’entretien. « En dépit des divergences entre nos deux pays, nous avons démontré que lorsque la Russie et les États-Unis tirent ensemble dans la même direction, ils peuvent enregistrer des progrès », a renchéri John Kerry.
Le résultat principal de cette rencontre est qu’elle a permis de préciser la liste des forces de l’opposition syrienne qui peuvent être considérées comme d’éventuels partenaires, a indiqué dans une interview à RBTH Andreï Kortounov, directeur général du Conseil des affaires internationales de Russie. En tout cas, les deux pays sont unanimes à estimer que le groupe terroriste État islamique (EI) et l’organisation djihadiste affiliée à Al-Qaïda Front al-Nosra (tous les deux interdits en Russie) seront exclus du processus politique. Les positions de Washington et de Moscou sur cette question se sont réellement rapprochées, a constaté John Kerry.
L’autre point important concerne la rencontre ministérielle du Groupe international de soutien à la Syrie prévue pour le 18 décembre à New York et la participation annoncée de Sergueï Lavrov. La Russie espère qu’à l’issue des entretiens, le projet d’ententes sur la Syrie conclues à Vienne sera soumis au Conseil de sécurité des Nations unies. « Cette rencontre donnera une nouvelle impulsion au processus de Vienne et peut éventuellement concrétiser les étapes et le caractère de la période de transition politique en Syrie », a affirmé Andreï Kortounov.
Changement de ton
Toutefois, aucun changement en profondeur dans les positions de Moscou et de Washington n’est à attendre. Les avis sur le sort du président syrien Bachar el-Assad demeurent inchangés, bien que l’attitude américaine ait été marquée par une certaine souplesse. « Les États-Unis n’exigent plus aussi fermement de remplacer le régime syrien », a fait remarquer Boris Dolgov, du Centre des études arabes et islamiques de l’Institut d’orientalisme, se référant aux propos de John Kerry.
« Nous avons répété que pour Washington, le maintien au pouvoir de Bachar el-Assad n’était pas concevable. Mais aujourd’hui, les entretiens n’ont pas porté sur nos différends ou sur ce qui peut être fait immédiatement à l’encontre d’Assad. Nous nous sommes focalisés sur le processus politique », a noté John Kerry à l’issue des négociations.
Ce qui, pour Boris Dolgov, est « foncièrement nouveau » dans la rhétorique américaine.
Toutefois – et là, tous les interlocuteurs de RBTH sont d’accord –, il ne faut surtout pas interpréter cette souplesse comme le souhait des Etats-Unis de mettre fin à la crise dans les relations avec la Russie. Les objectifs de Washington au Proche-Orient diffèrent toujours de ceux de Moscou, tout comme leurs positions sur d’autres dossiers importants de la politique internationale.
En fait, John Kerry est venu en mission en qualité d’envoyé spécial du président Barack Obama pour évoquer avec Vladimir Poutine les sujets que le leader américain voulait soulever, a souligné Andreï Souzdaltsev, vice-doyen de la faculté de l’économie mondiale et de la politique internationale de la Haute école d'économie. Il ne faut pas oublier non plus que la visite de John Kerry à Moscou s’inscrit dans le droit fil de la campagne de propagande de Washington, qui veut à tout prix maintenir son statut de combattant contre le mal dans le monde ; un statut qui lui est revenu après 2001, mais qui est en train de s’effriter, a indiqué l’expert.
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