Donner un nom étranger à sa société n’a plus la cote

La boulangerie Moscow Cheesecake, créée en 2010, a décidé d'opter pour le nom russe Masterskaïa Piroga (Atelier de tarte). Le cofondateur de l'entreprise, Rouslan Mikhaïlov, est convaincu que les Russes sont las des noms étrangers. Il n’est, visiblement, pas le seul à penser cela. Voronej, Rybi net (Pas de poisson), Sirovarnia (Fromagerie) sont les nouveaux noms que les restaurateurs moscovites donnent à leurs établissements. Le magazine The Village se penche sur les raisons de cet engouement des entrepreneurs pour la langue russe.

Tartes au fromage

Ces dernières années n'ont pas été faciles pour Masterskaïa Piroga. Les problèmes d'approvisionnement en fromage importé Philadelphia ont commencé avant même l’adoption des sanctions. Pendant que l'entreprise cherchait de nouveaux fournisseurs, la production était pratiquement au point mort. Avec le temps, Masterskaïa Piroga est toutefois parvenu à trouver de bons fabricants de beurre, crème fraîche et de fromage à la crème en Russie. 

Pendant sa quête de fournisseurs, l'entreprise s’est également cherché un nom. Moscow Cheesecake a d'abord été remplacé par Cake for you, puis par le nom russe. « On peut se faire passer pour une marque cool en utilisant un nom anglais. Des tas d'entreprises russes ont fait cela. Mais nous nous sommes dit : pourquoi pas lancer une marque russe ? », explique Rouslan Mikhaïlov. « Les entreprises optent souvent pour des noms russes, par exemple, LavkaLavka ou Teremok. C’est bien perçu ».

Le changement de nom visait à mettre l'accent sur le produit sur fond de concurrence étrangère. Avec la baisse des revenus, les Russes fréquentent moins les cafés, mais peuvent se permettre un gâteau à 650 roubles (8 euros) qu'on peut savourer pendant plusieurs jours.

À Moscou, les cheesecakes sont principalement exportés par des entreprises américaines – ces gâteaux peuvent être conservés plus d'un an au congélateur. Masterskaïa Piroga met l'accent sur les ingrédients naturels et envisage de se développer sur le marché de détail. Actuellement, l'entreprise collabore avec des distributeurs et des restaurants et confectionne près de 2 000 gâteaux par mois.

Difficultés de traduction

La langue du nom est déterminée par la catégorie marchande et la stratégie de la marque, explique la directrice générale de BBDO Branding Olga Konovalova. S'il s'agit de mode, de beauté ou de confiseries, le recours au français est légitime, estime-t-elle. Les racines latines aident à créer une marque respectable dans le domaine financier. Pour Konovalova, la langue russe recèle de nombreuses ressources d'inspiration et il est tout à fait possible de trouver un nom qui sonne bien en cyrillique.

« Tout ce qui a une consonance étrangère sonne cool pour le public », assure Vova Lifanov, directeur de la création de l'agence Suprematika spécialisée en image de marque. « Prenez, par exemple, Dreamriders. Ça sonne bien et c’est mystérieux ».

Pourtant, ces dernières années, les marques russes délaissent progressivement l'anglais, explique la fondatrice de CMYK Laboratory Olga Berek. Cela s'explique notamment par l'interdiction légale d'utiliser des termes étrangers sans traduction dans la publicité, une initiative des députés qui interdit l’utilisation de mots étrangers si un équivalent existe en russe, ainsi que par les sanctions.

Olga Berek précise que les produits gastronomiques ont été les premiers à recevoir des noms russes. Par ailleurs, de nombreux restaurants ont eux aussi opté pour la langue de Pouchkine : Siren (Lilas), Voronej, Essénine.

« Aujourd'hui, ce n'est plus un problème si les montres et les fromages ne sont pas suisses, si les mousseux ne viennent pas de France et si les chaussures et les vêtements ne portent pas de noms italiens », explique Mme Berek. « Les stéréotypes commencent à disparaître ».

Source : The Village

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