Mi-décembre, le prix du pétrole sur les marchés mondiaux, y compris celui du pétrole russe URALS, a battu plusieurs records à la baisse pour atteindre des niveaux qu’il n’avait pas connu depuis sept ans, à savoir, moins de 38,5 dollars le baril.
Une surabondance d’offre, liée aux refus des pays de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) de réduire leur production d’or noir est à l’origine de l’effondrement des prix du baril constaté ces dernières semaines.
Pour les pessimistes : un pétrole à moins de 40 dollars et une récession continue
Anton Silouanov, ministre russe des Finances, prédit que la demande et le prix du pétrole vont continuer de baisser l'an prochain. Au final, le cours du baril pourrait descendre sous la barre des 30 dollars. Il rappelle également que le budget russe pour 2016 a été calculé avec un baril de pétrole à 50 dollars : « Il nous faut d'ores et déjà préparer des solutions de secours pour pouvoir réagir si les prix continuent de chuter », a-t-il déclaré lors d'une conférence, à Kazan, le 12 décembre dernier.
Un baril à moins de 40 dollars ? C'est aussi l'un des scénarios à risque planifiés par la Banque centrale de Russie. Dans ce cas, l’institut d’émission estime que l'économie russe pourrait encore reculer de 2 à 3% et continuer à souffrir d’une baisse du niveau d’investissement. Selon Elvira Nabioullina, sa présidente, « ce scénario est de plus en plus d'actualité ces derniers temps ».
Rappelons que les ventes d’hydrocarbures constituent 50% du budget de l’Etat russe et qu’une directive du président Vladimir Poutine décrète que, l’an prochain, le déficit budgétaire ne devra pas dépasser 3% du PIB.
Si les cours du baril tombaient à 35 dollars, il faudrait, pour tenir l’objectif d’un déficit maximal de 3% sur le budget 2016, qu’un dollar soit l’équivalent de 94 roubles (soit une baisse supplémentaire du rouble de 34% par rapport à ses niveaux actuels). Tel est le pronostic qui ressort d'une étude de la Bank of America Merrill Lynch, citée par le média RBC Daily. Selon Vladimir Ossakovskiy, économiste en chef de la banque pour la Russie et la CEI, dans un contexte de variations significatives des prix du pétrole, le cours du rouble reste le principal instrument de contrôle des rentrées budgétaires.
Toujours selon les prévisions de la Banque centrale, même avec un baril à 50 dollars en 2016, l'économie russe devrait reculer de 0,5% à 1%. Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM) tablent aussi sur une nouvelle contraction de l’économie russe, si le prix de l’or noir devait stagner entre 50 et 53 dollars le baril.
Pour l'économiste Sergueï Aleksachenko, l'un des principaux problèmes de 2016 sera l'inflation (15% en novembre) et la chute des revenus réels des habitants. « Malheureusement, il ne faut pas attendre d'amélioration significative en 2016 car le budget fédéral n’a pas d'argent pour augmenter les salaires dans le secteur public, analyse-t-il. Dans ce contexte, la population investit ses revenus dans des produits de longue durée comme les voitures ou les logements, ce qui réduit encore le rythme de la croissance économique ».
La Banque centrale ne s’attend pas à une amélioration des revenus réels de la population ni à une reprise de la consommation avant 2018.
Pour les optimistes : un retour de la croissance
Les prévisions du ministère russe du Développement économique sont plus optimistes. Pour son ministre, Alexeï Oulioukaïev, le flottement des cours de l’or noir ne devrait plus durer que deux ou trois trimestres. « On peut s'attendre à ce qu'un nouvel équilibre de l'offre et de la demande soit trouvé sur le marché du pétrole au milieu de l'année 2016 », a-t-il affirmé lors de « L'Heure du gouvernement » devant le Conseil de la Fédération russe, le 9 décembre. A cette même période, le ministère table également sur un baril à 50 dollars. Par conséquent, ses prévisions de croissance du PIB sont plus optimistes avec une hausse de 0,7% à fin 2016. Le dernier trimestre 2015 donne des raisons d'y croire : de septembre à novembre, pour la première fois de l'année, le PIB russe a affiché une croissance de 0,1-0,2%.
Le consensus Bloomberg pour 2016 s'est fixé sur un prix du baril à 55 dollars : seuls cinq des 27 analystes qui le composent s'attendent à une valeur moyenne inférieure à 50 dollars.
Du côté des agences de notation internationales, on ne prévoit pas non plus d'effondrement de l'économie russe. Fitch et Standards & Poor's pensent que le PIB russe augmentera de 0,5%-0,3%.
« Les principaux processus négatifs ont déjà frappé l'économie russe. Dans ces conditions, même si elle subissait une série d'autres phénomènes négatifs, le monde des affaires serait déjà mieux préparé aux conséquences », juge Vassili Iakimkine, chargé de cours à la Faculté des finances et des affaires bancaires auprès de l'Académie russe de l'économie nationale. Selon l'expert, les affaires se porteront particulièrement bien dans le secteur agroalimentaire, la chimie, la pharmacologie et le tourisme. « Dans ces branches, on constate déjà un processus de substitution aux importations. On peut donc s'attendre à ce que le PIB russe commence à afficher une légère croissance dès le premier trimestre 2016 », conclut l’intéressé.
Agence Fitch : +0,5%
Agence Standards & Poor's : +0,3%
Ministère russe du développement économique : +0,7%
OPEP : +0.3% Banque centrale de Russie : 2-3%
FMI : -0,6%
Banque mondiale : -0,6%
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