Pendant que la Russie allonge la liste des produits frappés d’embargo, les fermiers du pays s’initient aux meilleures techniques de fabrication de fromage de qualité. Le journaliste moscovite Vladimir Borev a organisé au cours des quinze dernières années deux exploitations fermières, dans la région de Moscou et celle de Lipetsk. Il connaît maintenant toutes les astuces pour élever moutons, chèvres, vaches et chevaux.
Ces derniers temps, il s’intéresse de près à l’alimentation. Comment exclure du menu les produits artificiels bourrés d’exhausteurs de goût et imitant le lait, la viande et les légumes ? Qui peut fabriquer les aliments qui arrivaient en Russie depuis l’étranger et qui avaient trouvé leurs amateurs dans le pays ? Vladimir Borev a trouvé les réponses à toutes ces questions.
Il a fait venir dans la région de Lipetsk des professionnels français du fromage : le couple Nicole et Gilles de Vouge. Les deux paysans corses fabriquent du fromage depuis bientôt cinquante ans. À un moment donné, la famille entretenait un troupeau de 120 chèvres. En outre, les époux trouvaient le temps de préparer également quelque 8 000 litres de confitures maison à partir de fruits sauvages qui font la réputation de la Corse.
Les techniques de ces fromagers sont vieilles de plus de 400 ans. Les époux ont eu trois enfants qui, au grand regret de leurs parents, n’ont pas voulu perpétuer les traditions familiales.
Le journaliste-propriétaire moscovite a fait la connaissance de Nicole et de Gilles en France et leur a rapidement proposé de partager leur savoir-faire avec leurs collègues russes.
« Nous ne faisons pas secret de nos techniques et nous apprendrons volontiers aux Russes les vieilles recettes de production de bons fromages », dit Nicole. Les deux Corses expliquent que c’est une affaire de principe, car ils ne peuvent pas regarder sans tressaillir les rayons des magasins russes et ce qui s’y vend sous l’appellation « fromage ».
« Ce qui différencie les fromages français de tous les autres, c’est qu’on ne les fait pas cuire. Le vrai fromage doit être cru. D’ailleurs le mot russe désignant le fromage a justement cette racine », explique Vladimir Borev. Ce procédé permet de préserver toutes les bactéries utiles à l’organisme. Même les ferments utilisés pour le fromage sont vendus en France en pharmacie. Car si l’alimentation ne devient pas un médicament, c’est le médicament qui devient alimentation, sourit-il.
« La durée de vie moyenne des Français est de cinq ans plus élevée que dans les pays voisins comme l’Allemagne et les Pays-Bas. Je suis certain que c’est en raison de la consommation de bons fromages et de vins », poursuit Vladimir Borev.
Selon lui, le fromage est un produit noble et sa fabrication ne doit pas être faite à la hâte, car il est indispensable de le laisser fermenter. En effet, le fromage ne devient que meilleur avec le temps, tout comme le cognac ou un bon vin.
Les époux ont amené en Russie une meule de fromage de 14 ans. D’après eux, elle n’a pas de prix, car elle contient une immense quantité de bactéries utiles indispensables à la fabrication d’un bon fromage.
Le fromage est fabriqué dans le village de Maslovka (région de Lipetsk, ndlr) en petites quantités. C’est un produit fait à la main à partir de lait donné par dix chèvres seulement. Ce petit troupeau est desservi par deux trayeuses et un berger.
« Pour fabriquer du bon fromage, il est très important de comprendre qu’il ne peut pas être obtenu à partir du lait d’une chèvre élevée dans les conditions d’une grande ferme », indique Vladimir Borev. Celles-ci ne vont jamais aux pâturages et restent enfermées à se nourrir de fourrage spécial, tandis que la chèvre « maison » gambade librement dans le champ en décidant quelle herbe elle doit brouter et quand. Ce qui est absolument nécessaire pour que l’animal et son lait soient sains.
Cela étant, pour fabriquer de grandes quantités de fromage, il faut mieux acheter du lait de plusieurs petites exploitations qu’augmenter le nombre d’animaux dans sa grande ferme.
« Nous n’avons pas l’intention de produire du fromage en quantités industrielles, sinon nous aurions choisi une technologie plus rapide et moins chère. Mais nous serions très reconnaissants aux autorités si elles nous aidaient à organiser la coopération pour que nous puissions acheter du lait dans les exploitations privées et puis vendre nos produits ».
Vladimir Borev est convaincu que chaque fermier est capable d’organiser sa propre fabrication de fromage s’il le souhaite. Mais quand ont lui demande s’il sera prêt à faire part de sa nouvelle expérience à tout le monde, Vladimir répond que « c’est une question à débattre ». L’essentiel est de comprendre que celui qui veut se lancer dans cette profession unique en son genre doit avoir de bonnes intentions, fait-il remarquer pour conclure.
Source : Ridus
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