Une idylle d'été dans un village du nord de la Russie.
Vladimir Vyatkin/RIA NovostiLa vie culturelle russe a toujours été animée par une force centripète. L’image du jeune provincial partant à la conquête de la capitale n’est certes pas apparue en Russie, mais c’est sans doute dans la Russie du XXe siècle qu’elle est la plus aboutie. Pendant la période soviétique, il était absolument indispensable de déménager dans la capitale pour assurer le développement de son potentiel créatif, qu’on le veuille ou non. Les écrivains ne faisaient pas exception à la règle.
Au XXIe siècle, lorsque les succès littéraires ne sont plus récompensés avec des appartements dans le centre-ville de Moscou, les écrivains doivent faire un choix : partir à la difficile conquête de la capitale ou rester dans leur région, bien « au chaud » mais complètement inconnus. Il a fallu attendre les années 2010 pour voir apparaître des écrivains ne voulant pas séduire la capitale et préférant que les prix littéraires viennent jusqu’à eux. La vie de la province russe est la matière première de leurs œuvres.
Alexeï Ivanov (Perm – Ekaterinbourg, Oural)
Alexeï Ivanov. Crédit : Pavel Smertin/TASS
Écrivain fécond de nombreux romans – dont l’un, Le Géographe a bu son globe, a été adapté au cinéma – ses œuvres sont écrites dans des styles si différents que sa collègue Olga Slavnikova le qualifie « d’homme à trois hémisphères cérébraux ». En outre, il se consacre à la littérature non-fictionnelle où il décrit la rivière Tchoussovaya, son Oural natal et Ekaterinbourg, ville dans laquelle il vient de déménager. Dans son guide-album paru dernièrement, il se déclare convaincu de l’existence d’une « civilisation de la forge » dans les régions industrielles de l’Oural.
Zakhar Prilepine (Nijni Novgorod, Volga)
Intervenant de la table ronde "État des lieux dans la province trente ans après l’URSS"*
Zakhar Prilepine. Crédit : Vladimir Astapkovich/RIA Novosti
À la différence d’Alexeï Ivanov, Zakhar Prilepine ne s’est jamais limité au cadre d’une seule région. Entre ses 30 et 40 ans (qu’il a fêtés en 2015), il est passé du statut de débutant inconnu dont la prose « fait verser une petite larme » et à la réputation douteuse (aux yeux des critiques littéraires de Moscou) de national-bolchevik et de membre des forces anti-émeute à celui d’auteur reconnu de bestsellers, un intellectuel avec une vision sans concession des problèmes politiques aigus. Le dernier roman de Zakhar Prilepine, Le Monastère, est consacré non pas à la région de la Volga, mais aux îles Solovki (dont le monastère a été transformé en camp de travail dans les années 1920).
Vassili Avtchenko (Vladivostok, Extrême-Orient russe)
Vassili Avtchenko. Crédit : Evgenya Novozhenina/RIA Novosti
Le nom de ce journaliste de 35 ans est devenu célèbre du jour au lendemain, en 2009, avec la parution de son œuvre non-fictionnelle Volant à droite où il défend moins le droit de conduire une voiture d’occasion importée du Japon (comme c’est généralement le cas dans l’Extrême-Orient russe, ndlr) que le droit d’avoir sa propre identité. En 2015, il a fait paraître un livre moins politisé et plus poétique, Un Morceau de cristal dans une monture transparente. Récits sur l’eau et les pierres, consacré à la nature unique de son Extrême-Orient natal.
Maxime Ossipov (Taroussa, à 100 km au sud-ouest de Moscou)
Intervenant de la table ronde "Le médecin dans la littérature russe"*
Maxime Ossipov. Crédit : Aleksandr Utkin/RIA Novosti
La biographie de Maxime Ossipov, 53 ans, est pleine de surprises. Né à Moscou et médecin de formation, il est revenu en Russie à l’issue d’un séjour de deux ans en Californie au début des années 1990, avant d’abandonner sa société médicale en 2005 et de devenir simple cardiologue à l’hôpital central de Taroussa, une petite ville de la région de Kalouga. C’est en continuant à exercer son métier de médecin qu’il écrit des romans, des nouvelles et des pièces, ce pour quoi il a été immédiatement qualifié de « nouveau Tchékhov ». Une comparaison marquante, mais contestable. Toutefois, son premier livre Je n’ai pas à me plaindre (2009) reflète, sans conteste, le grand objectif du médecin-écrivain.
Roman Sentchine (République de Touva – territoire de Krasnoïarsk, Sibérie centrale et orientale – Moscou)
Intervenant de la table ronde "En Russie, la ruralité est-elle toujours gardienne des valeurs et de la spiritualité"*
Roman Sentchine. Crédit : Artyom Geodakyan/TASS
Réaliste sans concessions, Roman Sentchine, continuateur des traditions du réalisme socialiste de l’époque soviétique, il suit la voie typique d’un écrivain de l’URSS, avec des études à l’Institut littéraire et un déménagement à Moscou après obtention de son diplôme. Toutefois, il emprunte cette voie poussé par d’autres circonstances : après la désagrégation de l’Union soviétique, sa Touva natale a connu des troubles ethniques. En d’autres termes, les Russes ont commencé à être évincés de cette république autonome. Les Sentchine ont déménagé dans le territoire de Krasnoïarsk voisin pour devenir fermiers. C’est ce que l’auteur a décrit avec une sincérité impitoyable dans son roman le plus connu, Les Ieltychev, paru en 2009. Pourtant, à en juger d’après sa nouvelle ethnographique Touva, l’écrivain éprouve toujours des sentiments chaleureux envers sa région natale. Quant au territoire de Krasnoïarsk, il le décrit dans son roman La Zone d’inondation paru en 2015. Le roman évoque la destinée tragique des habitants d’un village sibérien qui sont contraints de quitter leur maison parce que la construction d’une centrale hydraulique à cet endroit suppose l’inondation de tout le secteur environnant.
Programme détaillé des Journées du livre russe
Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.
Abonnez-vous
gratuitement à notre newsletter!
Recevez le meilleur de nos publications directement dans votre messagerie.