Dans chaque réserve russe, des surveillants patrouillent en permanence. Crédit : Elizaveta Levitskaïa
A l'intérieur de la zone délimitée, on trouve plusieurs maisons paysannes, deux yourtes décorées, un bania et une petite centrale électrique fonctionnant à l’énergie éolienne et solaire. Depuis peu, le nombre de constructions a été revu à la hausse : un nouveau lieu de visite est apparu ici. C’est à la fois un musée, un centre de conférences et un observatoire ; une vue magnifique sur le lac s’y dévoile à travers une vitre panoramique. L’ouverture du centre a été suivie d’un séminaire de trois jours dédié à l’étude des espèces rares. Des zoologistes en provenance de différentes réserves se sont retrouvés dans l’observation des tigres, léopards et autres panthères des neiges. Entre les études sur le terrain, la récolte d’informations et la préparation à de futures expéditions, l’emploi du temps des scientifiques était des plus serrés.
Méthodes traditionnelles, technologies modernes
Le partage d’expériences revêt une importance vitale pour les zoologistes. Par exemple, un conseil concernant le meilleur accumulateur à utiliser avec un piège photographique peut avoir un rôle décisif dans le succès d’une expédition.
En Russie, il existe de nombreux endroits n’ayant jamais été foulés par l’homme. Malgré tout, le problème de la protection de l’environnement reste très important. En créant des réserves et parcs naturels sur leurs lieux d’habitation des espèces, on s’efforce de protéger du public de nombreux élements de la faune et de la flore inscris dans le « livre rouge russe ». Aujourd’hui, la superficie totale des zones consacrées aux réserves naturelles dépassent les 340 000 kilomètres carré, soit l’équivalent de la Finlande, mais moins de 3% de l’ensemble du territoire russe.
L’hiver est la période-clé pour les chercheurs de la réserve de Saïano-Chouchensk. Car en effet, même en hiver, des expéditions sont organisées dans les endroits difficiles d’accès où vit la panthère des neiges, aussi appelée l’once. Ses traces étant visibles sur la neige, les scientifiques attendent cette période avec impatience et excitation. « Nous avons trois mois pour récolter le maximum de données « vivantes ». C’est comme si durant cette période on écrivait un livre et que tout le reste de l’année était dédié à son interprétation », raconte Serguei Istomov, collaborateur scientifique.
L’apparition des pièges photographiques a conduit à de superbes résultats. « Il ne s’était pas écoulé 10 jours que déjà nous recevions les premières photos des panthères. En plus, c’était trois individus différents, ce qui pour un animal aussi énigmatique, peut être considérer comme un immense succès ! Le cas de la troisième panthère relève au passage une histoire amusante, car au début personne n’avait remarqué l’animal. Il a fallu que mon fils regarde la photographie quelques temps plus tard et me demande « Papa, c’est à qui les pattes sur le caillou ? ». Il s’est révélé que la panthère se trouvait un peu plus haut que l’objectif, et que par conséquent elle n'apparaissait sur le cliché seulement que ses membres inférieurs, membres qu’au début personne n’avait remarqué », s’amuse Istomov. Sur les quatre dernières années, quinze spécimens différents ont été saisis par les pièges photo. Toutefois, selon la WWF, le nombre d’onces ne dépasserait pas les 90 individus sur tout le territoire russe.
Intuition et révélation
Dans chaque réserve russe, des surveillants patrouillent en permanence. Bien souvent, la réserve se compose de zones difficilement accessibles où par conséquent il est impossible d’assurer un contrôle continu. Le braconnage et les séjours illégaux sur le territoire du parc constituent depuis toujours le souci majeur de ses employés. Les braconniers ne s’y rendent rarement qu’une seule fois, car la vente de poissons rares ou de gibier peut rapporter beaucoup d’argent.
Le système russe de parc naturel célébrera bientôt ses 100 ans. On se prépare à cet événement au niveau fédéral, mais aussi local avec par exemple Igor Chpilenok, vainqueur d’un concours photo de la BBC, pendant deux ans a parcouru l’ensemble des réserves naturelles russes, depuis les frontières de l’Ouest jusqu’à l’Extrême Orient.
On a vu récemment apparaître en Russie un nouveau genre de braconniers : « les braconniers publicistes ». Surveillant en chef dans la réserve de Khakassie, Vladimir Savitsky raconte : « Aujourd’hui, la pêche sous-marine est très populaire. Les propriétaires des magasins spécialisés dans la chasse sous-marines viennent pour pécher de très gros poisons, faire la pose avec eux, poster la photo en ligne, et attirer plus de clients. Ils promettent à leurs clients que leur équipement leur permettra de pêcher des poissons de cette taille… »
Les agressions violentes sont en diminution ; ce sont des personnes qui veulent simplement se reposer au calme et fuir l’agitation. Mais ils peuvent tout de même nuire à l’environnement et déclencher des incendies, répandre leurs ordures ou effrayer des oiseaux rares.
Le travail des gardiens du lac Itkoul ressemble de près à celui des autres réserves. Ils travaillent courageusement, une semaine sur deux. Au cours d’une journée, le groupe opérationnel mène plusieurs raids sur l’eau ou en voiture autours du lac. Lors de leurs expéditions sur le lac, les gardiens repèrent bien souvent les sites de braconnage occupés par les habitants des alentours qui ne se sont pas encore fait à l’idée que leurs lieux de pêche habituels se trouvent à présent dans un espace protégé.
En effectuant les 40 kilomètres de leur parcours en voiture, les gardiens distinguent fréquemment des visiteurs indésirables au sommet des collines. Le territoire du lac d’Itkoul étant relativement peu étendu, l’expérience et l’intuition permettent même aux défenseurs de l’ordre de repérer des individus soigneusement dissimulés dans les forêts bordant le lac.
Du fait de la rudesse de leur travail, et de la trempe qu’il nécessite, les gardiens se soucient de chaque infraction. « Chez nous l’hiver est calme, mais dès le retour de la belle saison, c’est le travail actif qui commence. Au printemps, il y a à nouveau ce sentiment désagréable qu’on va devoir faire la morale et verbaliser », se désole le surveillant en chef Vladimir Savitsky.
Il y a cette impression que l’arme principale des gardiens, ce sont les mots. Et ce n’est pas un hasard. Aujourd’hui dans les réserves, une grande attention est portée sur l’éducation environnementale. « Nous essayons en permanence de favoriser l’éducation au détriment des interdictions pures et dures », note Youlia Sourman, sous-directrice en charge de la sensibilisation à l’écologie, du tourisme et des loisirs de la réserve naturelle de Saïano-Chouchensk. « Dans chaque réserve on a un département entier qui est dédié à cette tâche. Sa mission est de transmettre au plus grand nombre les idéaux du parc et d’expliquer que la défense de la nature sauvage est une nécessité ».
Il est donc dans l’intérêt de la nature que le flux de personnes soit limité. Toutefois il est possible de se rendre ici au sein d’un groupe spécialisé ou bien en qualité de volontaire.
Victor Nepomnyaschiy, directeur de la réserve de Khakassie, raconte : « Nous travaillons beaucoup avec les écoliers. Nous leur donnons dès l’enfance l’amour et le souci de la nature. »
Les volontaires
écologistes débarquent ici avec plaisir. Chargée de méthode dans le département
éducatif, Uliana Kuymova explique : « En aidant la réserve, il est possible de
participer à « la propagation de l’écologie » et à l’amélioration des
infrastructures touristiques. On recherche ici des gens capables de contribuer
à la sensibilisation environnementale : des photographes, des réalisateurs, des
traducteurs. Nous essayons de tout faire pour susciter l’intérêt des
bénévoles et les mettre à l’aise, même s'il nous faut aussi une aide véritable
de leur part. »
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