Le nucléaire sans danger : de l’utopie à la réalité

Pas de sûreté à 100%, mais tout faire pour « s’en rapprocher ». Crédit : RIA Novosti.

Pas de sûreté à 100%, mais tout faire pour « s’en rapprocher ». Crédit : RIA Novosti.

Après Tchernobyl, les Russes ont voulu faire de la centrale de Rostov un modèle de sécurité. Une leçon après Fukushima ?

La centrale nucléaire abandonnée de la ville de Chtchelkino, en Crimée, est un monument marquant d’une époque révolue de l’énergie nucléaire.

La construction a été « gelée » en 1986, après l’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl. L’ambiance désertique du chantier abandonné a inspiré plus d’une personne : Kazantip – le plus grand festival de musique électronique et de danse de l’ex-URSS – a régulièrement eu lieu ici, et le réalisateur Bondartchouk a tourné ici son film L’île habitée. Parfois quelques touristes s’aventurent à Chtchelkino, mais elle reste quand même une centrale fantôme.

En chiffres :

460 gigawatts de nouvelles capacités nucléaires seront mis en exploitation dans le monde d’ici l’année 2020.

Quelques centaines de kilomètres plus loin, sur l’autre rive de la mer Noire, non loin de Volgodonsk, se situe la centrale nucléaire de Rostov, qui emploie à ce jour plus de 5 000 personnes. Cette centrale alimente en électricité toute la région. Sa construction a également eu lieu à l’époque de la catastrophe de Tchernobyl, mais les pouvoirs publics en ont tiré d’autres conclusions : au lieu de mettre fin au projet, la centrale a été équipée des systèmes de sécurité les plus fiables.

Après la tragédie de Fukushima, certains analystes annonçaient que les jours de l’énergie nucléaire étaient comptés et que les centrales nucléaires étaient vouées à connaître le sort de la centrale de Chtchelkino.

Pourtant, le nucléaire connaît un nouvel essor : sur 20 pays leaders dans la production de gaz, 15 ont lancé des programmes de développement du secteur nucléaire. Selon les estimations de Rosatom, vers l’année 2020, 460 gigawatts de nouvelles capacités nucléaires seront mis en exploitation dans le monde (à titre de comparaison : une grande ville occidentale ne consomme pas plus d’un gigawatt).

Le réacteur le plus récent de la centrale nucléaire de Rostov a été conçu pour résister à un tremblement de terre de magnitude 9 sur l’échelle de Richter, explique Alexandre Polouchkine, le directeur de l’ingénierie chez Rosenergoatom, une filiale de Rosatom. Il souligne que les nouvelles technologies permettent à la centrale de fonctionner normalement même en cas de longue coupure d’électricité. En outre, le nouveau modèle est moins cher à produire que ses prédécesseurs.

Pas de sûreté à 100%, mais tout faire pour « s’en rapprocher ». Crédit : Itar-Tass.

Il devient de plus en plus évident que l’énergie nucléaire occupera bientôt une place centrale dans le système énergétique mondial. Il faut également tenir compte de la croissance de la consommation énergétique de la part des pays en développement. Une centrale nucléaire peut remplacer cinq centrales thermiques pour ce qui est de la quantité d’énergie produite à rejets équivalents. « Si quelque part il existe une possibilité d’extraire du gaz de schiste au prix de 30-50 dollars/mètre cube, alors il n’est pas nécessaire d’y construire une centrale nucléaire, explique le directeur général de Rosatom, Sergeï Kirienko. De la même façon, auparavant on n’en construisait pas à côte des bassins miniers ».

Ce qui est important, c’est la stabilité du prix, poursuit-il. « Je me souviens bien de la fin des années 90, quand le prix du pétrole est descendu au-dessous de 9 dollars le baril. Nombreux étaient les experts qui pensaient que son prix ne franchirait pas la barre des 20 dollars ». Kirienko rappelle qu’en 2008, plusieurs spécialistes ont émis l’idée que, dans un avenir proche, le prix du pétrole ne descendrait pas au-dessous de 150 dollars. Le chef de Rosatom note que l’énergie nucléaire permet de garantir la stabilité des prix tout au long des 60 ans d’exploitation du réacteur.

Alexandre Moskalenko, président du groupe de sociétés G.C.E (Gorodskoj Centr Expertiz) estime que le préjudice lié à l’énergie nucléaire est insignifiant, par rapport à ceux causés par la plupart des autres sources d’énergie. « Une centrale nucléaire ne rend pas inexploitables de vastes terrains agricoles comme un barrage hydro-électrique, explique-t-il. Les centrales électriques à charbon avec leurs rejets de matières cancérigènes sont le danger numéro un pour l’homme et l’environnement, par rapport aux autres sources d’énergie disponibles. L’énergie nucléaire est donc une alternative relativement inoffensive ».

Et de constater que « la demande en énergie croît toujours aussi vite et l’humanité ne peut renoncer à cette source-là. Car nous n’aurons pas d’énergies de substitution à l’énergie nucléaire pour les 100 ans à venir et, dans certains pays, les centrales nucléaires satisferont jusqu’à 80 % de la demande ».

L’accident sur la centrale nucléaire de Fukushima a fortement incité les constructeurs de réacteurs nucléaires de la région à privilégier la sécurité, ajoute Moskalenko, et toute la branche est actuellement focalisée sur la minimisation des risques.

« Aucun réacteur ne peut être sûr à 100%, de même qu’aucune voiture ne peut l’être, fait-il remarquer. Nous ne pouvons que perfectionner le niveau de sécurité afin de répondre à la demande croissante en énergie. Pour cela, les améliorations correspondantes sont nécessaires. Notre but reste de nous rapprocher, autant que possible, des 100% de sûreté ».

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