Bain, flasques et autres secrets de la marche sportive

Denis Nizhegorodov : "Sortir sans montre sur la piste, c’est se perdre". Crédit : AP

Denis Nizhegorodov : "Sortir sans montre sur la piste, c’est se perdre". Crédit : AP

Moscou accueillera du 10 au 18 août les Championnats mondiaux d’athlétisme. La marche athlétique est une des disciplines dominées par la Russie et l’on s’attend à voir beaucoup de médailles. Le détenteur du record mondial en titre, Denis Nizhegorodov, a confié dans une interview à « Moscow news » ce que les marcheurs portent dans leurs flasques pour mieux supporter le marathon et pourquoi ils sont toujours les derniers à quitter les Jeux Olympiques.

Sans attelle au genou

L’homme ordinaire ne marche pas de la même façon que nous, les athlètes, durant l’épreuve. La jambe doit être droite, le genou complètement déplié, la phase de vol absente. Mais nous devons obtenir ce résultat sans attelle au genou, ni tout autre fixateur. Nous ne servons pas dans l’armée de Paul Ier.

Flasque qui porte un nom

Pour préserver notre énergie, pendant la course nous consommons des glucides préparés à l’avance. Il s’agit de toute sorte de poudres produites par différentes compagnies et composées à 98% de glucides. Il suffit d’ajouter de l’eau et le melange est prêt à la consommation. Chacun choisit la proportion qui lui convient – certains préfèrent que ce cocktail soit sucré, d’autres pas. Parfaitement absorbé, il nous aide beaucoup, par exemple empêche les spasmes dans les muscles. D’habitude, le matin de la course nous préparons trois litres de cette boisson. Nos entraîneurs placent les récipients dans des containeurs de glace et les acheminent vers la piste. Nous devons en consommer tous les deux kilomètres. Seul l’entraîneur ou son auxiliaire peuvent nous passer la flasque. Il est indispensable que notre nom soit inscrit dessus. Les volontaires présents le long de la piste ramassent nos flasques et les rendent à nos entraîneurs qui les lavent et remplissent.

Bain après l’arrivée

Après la course, tout athlète a besoin de repos. Il ne faut surtout pas qu’il prenne l’avion peu de temps après la course. Nous recevons des perfusions intraveineuses de solutions glucidiques. Parfois, nous avons besoin de médicaments pour maintenir le muscle cardiaque et le foie. Trois jours après la compétition il est conseillé de s’offrir une séance de bania (bain russe) avec un balai de bouleau pour activer la transpiration. Et, bien évidemment, la piscine contrastée.

Plus vite que les coureurs

D’habitude nous parcourons la distance de 50 km avec une vitesse moyenne d’un kilomètre en 4’15 minutes. Lorsque j’ai cherché à battre le record mondial, j’ai alors développé une vitesse encore plus rapide. Chacun peut se présenter sur la piste et essayer. Mais gardez en tête que nous conservons ce rythme pendant 50 kilomètres ! Il me semble que tout le monde ne puisse pas franchir une telle distance en vélo.

La montre est indispensable

Sortir sans montre sur la piste, c’est se perdre. Sans montre on est comme un chaton aveugle, comme un pilote sans instruments de bord. Cela m’est arrivé lors des Championnats du monde de Berlin. J’ai perdu ma montre durant une course et j’ai été obligé de passer un tour entier dans l’obscurité. Heureusement, un juge s’en est aperçu; il a pris ma montre et me l’a rendue au cours du tour suivant. C’est contre les règles, mais il était un homme instruit et comprenait que s’il ne le faisait pas, je pourrais quitter la course. Cet geste de l’arbitre m’a aidé à regagner mon rythme.   

Les chaussures de marcheurs

Il y a une différence entre les chaussures de course et de marche : la semelle des chaussures de course est plus épaisse près du talon, tandis que la semelle des chaussures de marche est de la même épaisseur le long de la plante. Elles ne sont pas conçues pour courir, mais quand on marche, on peut poser le pied sur le sol entièrement; c’est impossible quand on porte les baskets, on a l’impression de marcher sur les talons. Les marcheurs professionnels ne peuvent pas se permettre de s’entraîner en chaussures de course car ils risquent de recevoir des blessures graves.

L’expulsion qui peut être désirable

Une fois l’arbitre m’a expulsé et s’est excusé, et moi, j’ai répondu « merci! ». Cela m’est arrivé en 2006 à Göteborg, lors des Championnats d’Europe. On m’a alors obligé à prendre part à l’épreuve de 50 km, malgré une blessure que j’avais reçue. Je marchais d’une manière tellement laide que j’en avais honte. Je ne rêvais qu’à ce qu’ils m’expulsent.  Finalement, après 19 km de souffrance, l’arbitre m’a finalement montré le carton rouge avant de s’excuser. Moi, je lui ai dit que cela faisait un bon moment que je rêvais de ce carton rouge et je l’ai remercié pour m’avoir « libéré ». Cet arbitre m’a même demandé un autographe.

Texte original (en russe) publié sur le site de Moskovskie Novosti le 4 août 2013.

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