Crédit : Vladimir Fedorenko / RIA Novosti
Ce projet de loi portant sur la limitation de la participation étrangère dans les médias a été élaboré à l’initiative de l’administration présidentielle. Le gouvernement de la Fédération de Russie s’est abstenu de tout commentaire sur ce projet de loi, tout en s’engageant à s’exprimer après réception officielle du document en provenance de la Douma.
Parmi les journalistes, ce projet de loi a suscité de vives réactions. Les experts interrogés par RBTH portent des appréciations divergentes sur ce projet de loi.
Ivan Pankeïev, professeur et directeur du « Centre de droit des médias » de la faculté de journalisme de l’Université d’État de Moscou (MGU) a indiqué à RBTH que l’adoption de ce projet de loi était liée à la situation politique : « Si l’État se trouve sous pression, ce dernier est contraint de réagir. La Russie réagit ».
Dmitri Evstafiev, professeur de la Haute École d’Économie, juge le projet de loi adopté plutôt libéral, mais ne croit pas que les investisseurs étrangers soient prêts à déserter le marché russe des médias : « La Russie est un marché juteux pour les investisseurs occidentaux du secteur des médias et personne n’est prêt à le quitter aussi facilement. Cette situation va déboucher sur la création de schémas opaques et illégaux de participation étrangère dans les médias russes. Cette loi va entraîner une redistribution des actifs sur le marché des médias, et en premier lieu favoriser la corruption ».
Des restrictions sur la participation étrangère dans le capital des médias existent dans de nombreux pays à travers le monde, dont les États-Unis et la Chine.
Cependant, Konstantin Eggert, journaliste indépendant, ancien rédacteur en chef de la radio Kommersant-FM, considère l’adoption de ce projet de loi comme un reflet des réalités russes et de la vision qu’a le pouvoir du rôle des journalistes dans la société : « Le rôle en question, c’est de produire de la propagande, pas d’agir en tant que quatrième branche du pouvoir et instance de contrôle indépendante des activités du gouvernement. Ce projet de loi signifie la poursuite des attaques contre la liberté d’expression et les médias indépendants en Russie ».
Après son adoption par la Douma d’État, le projet de loi sur la limitation des participations étrangères dans les médias fera l’objet d’amendements techniques. Dans le cas où ces derniers seraient adoptés, le projet de loi entrerait en vigueur le 1er janvier 2017.
Conséquences de l’adoption du texte de loi
Dmitri Evstafiev estime que rien de particulièrement effrayant ne devrait se produire après l’entrée en vigueur de la loi : « Il n’y a pas et il n’y a jamais eu en Russie d’investisseurs étrangers de portefeuille actifs dans les médias sociopolitiques. Il y a eu et il y a encore des investisseurs avec des objectifs bien précis, cherchant à influencer la situation à l’intérieur du pays. Mais si l’identité de ces personnes ne fait actuellement aucun doute, la transparence va diminuer suite à l’adoption de ce texte de loi ».
Konstantin Eggert est convaincu que cette loi aura des conséquences sérieuses sur le marché russe des médias : « Ce projet de loi concerne l’ensemble des publications, indépendamment du genre ou du format. Même les magazines culinaires ou dédiés aux activités domestiques sont concernés par ce texte. Cette loi ne va pas faire progresser la démocratie en Russie ».
Les agressions de journalistes seront sanctionnées plus sévèrement
Ivan Pankeïev considère que la qualité du journalisme ne dépend pas des sources de financement des médias de masse : « Un média est avant tout constitué par les personnes qui sont à l’origine de sa création. Le niveau de professionnalisme des journalistes ne dépend pas de qui verse leurs salaires, qu’il s’agisse de l’État, du secteur privé ou bien d’investisseurs étrangers ».
À l’heure actuelle, les restrictions sur les participations étrangères (limitée à 50%) concernent les chaînes hertziennes de télévision et de radio émettant sur le territoire russe, ainsi que les journaux et revues tirés à un million d’exemplaires ou plus. Selon des informations du journal Vedomosti, en cas d’adoption de la nouvelle loi, plus de la moitié des médias russes seraient affectés.
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